Publié le 14/07/2021
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Par Antoine Berthou et Sebastian Stumpner

Les confinements imposés par les gouvernements durant la pandémie de Covid-19 ont contribué aux perturbations du commerce international de biens. Nous montrons que les échanges bilatéraux ont davantage diminué lors des premiers confinements, plus stricts, introduits au printemps 2020. En outre, l'impact quantitatif des confinements sur le commerce s'est atténué au second semestre 2020, notamment dans le cas du pays exportateur.

Graphique 1 : Affaiblissement progressif en 2020 de l'effet des confinements sur le commerce bilatéral

Note : Mois de l'année 2020. Coefficients (et intervalles de confiance à 95 %) estimés à partir des équations d'exportations et d'importations. Données du Trade Data Monitor et sur indicateur d'intensité du confinement de l'université d'Oxford. Pour plus de détails, cf. B&S (2020, à paraître).

Effondrement et rebond du commerce mondial durant la pandémie de Covid-19.

La pandémie de Covid-19 a contraint les gouvernements à introduire une série de restrictions, dont le degré de sévérité a varié dans le temps et dans l'espace et qui ont fortement perturbé l'activité économique et sociale. Ces restrictions ont affecté en particulier la capacité des agents à se rendre sur leur lieu de travail, à consommer ou à voyager. Elles ont contribué à désorganiser la production, notamment du point de vue de la coordination des entreprises avec leurs fournisseurs et leurs clients. Pour les entreprises participant au commerce international, leur capacité à mener des échanges transfrontaliers a souffert d'une combinaison de chocs d'offre et de demande liés à ces restrictions. Les perturbations qui ont affecté la logistique des transports internationaux ont constitué une difficulté supplémentaire.

Le graphique 2 retrace le taux de croissance annuel des exportations de biens pour un groupe de 31 pays comprenant les principales nations commerçantes du monde ; la croissance de leurs échanges commerciaux constitue par conséquent une bonne approximation de la croissance du commerce mondial.

Graphique 2 : Effondrement du commerce mondial durant la première vague, mais redressement rapide.

Note : Mois de l'année 2020. Calculs à partir des données du Trade Data Monitor pour 31 pays déclarants représentant environ 75 % du commerce mondial. Une relation commerciale est représentée par un pays exportateur, un pays importateur et un produit. Une « relation continue » correspond à une relation commerciale qui reste « active » entre deux années consécutives. La valeur entrée moins sortie correspond à la contribution des créations nettes de relations commerciales.

Le graphique montre que la valeur du commerce mondial a chuté au printemps 2020, au moment où de nombreux pays ont introduit des confinements et d'autres restrictions liées à la Covid-19. En avril et en mai 2020 notamment, la valeur totale des exportations a diminué de 25 % environ par rapport au même mois de l'année précédente. Cela est dû à un plus faible montant d'exportations au sein des relations commerciales continues (pays exportateur, pays importateur et produit détaillé) et également, dans une moindre mesure, à une diminution du nombre de transactions (nombre de partenaires commerciaux étrangers et de produits exportés).

Les exportations mondiales ont commencé à se redresser en juin 2020, retrouvant leurs niveaux d'avant-crise dès septembre 2020. Étonnamment, la reprise s'est poursuivie à l'automne 2020 à un rythme rapide, en dépit des nouveaux confinements introduits en Europe durant la deuxième vague de la pandémie.

La chute des exportations a été plus forte dans les pays avec des confinements plus stricts.

La diminution des exportations à l'échelle des pays durant la première vague de la pandémie est étroitement liée à la sévérité des restrictions mises en place par les gouvernements.

Cette conclusion ressort du graphique 3, qui combine des données sur la croissance des exportations par pays entre avril 2020 et avril 2019 et des données sur l'intensité des confinements par pays en avril 2020. L'intensité des confinements prend en compte l'ensemble des restrictions imposées par les gouvernements, y compris la fermeture des lieux de travail, des écoles, les restrictions aux rassemblements et la fermeture des restaurants, des commerces et les restrictions sur les transports et les voyages internationaux. Le graphique 3 montre que les pays ayant introduit des restrictions plus sévères en avril 2020 ont connu une baisse plus forte de leurs exportations.

Dans un pays comme la France où ces restrictions ont été particulièrement sévères au printemps 2020, on observe une très forte baisse de la valeur des exportations par rapport à l'année précédente. Dans les pays ayant introduit moins de restrictions, en raison d'une gestion différente de la pandémie (Suède) ou d'une vague de pandémie moins sévère (Japon), les exportations agrégées ont beaucoup moins diminué.

Dans une analyse plus détaillée, Berthou et Stumpner (Banque de France mimeo, 2021) évaluent quantitativement l'effet de l'intensité des restrictions sur les exportations et sur les importations, à l'aide de données détaillées au niveau des produits sur le commerce bilatéral. Leurs estimations confirment que la valeur du commerce bilatéral entre pays a diminué plus fortement lorsque le degré de sévérité des restrictions était plus élevé. Cela vaut même lorsque des contrôles additionnels sont introduits dans l'estimation, par exemple pour prendre en compte les différences entre pays concernant la dynamique de la pandémie, qui, en plus de la sévérité des restrictions imposées par les autorités, ont pu influer sur les exportations et les importations.

Graphique 3 : Première vague : plus forte baisse des exportations des pays avec des confinements plus stricts (Variation annuelle des exportations et intensité du confinement en avril 2020)

Note : Axe des ordonnées : croissance annuelle de la valeur des exportations mensuelles (Trade Data Monitor ; axe des abscisses : indicateur d'intensité du confinement de l'université d'Oxford. Pays : AR Argentine ; AU Australie ; BE Belgique ; BR Brésil ; CA Canada ; CH Suisse ; CL Chili ; CN Chine ; DE Allemagne ; DK Danemark ; ES Espagne ; FI Finlande ; FR France ; GB Royaume-Uni ; ID Indonésie; IL Israël ; IN Inde ; IT Italie ; JP Japon ; KR Corée du Sud ; MX Mexique ; MY Malaisie ; NL Pays-Bas ; NO Norvège ; NZ Nouvelle Zélande ; PL Pologne ; RU Russie ; SE Suède ; TH Thaïlande ; TR Turquie ; US États-Unis.

L'impact des restrictions sur le commerce s'est progressivement atténué.

Le graphique 1 montre l'évolution de l'effet sur le commerce bilatéral des confinements imposés dans le pays exportateur (courbe bleue) et dans le pays importateur (courbe rouge). Lorsque les restrictions ont été introduites pour la première fois au printemps 2020, celles du pays importateur ont eu un effet plus fort sur le commerce bilatéral que celles du pays exportateur. Cela suggère qu'initialement, les restrictions ont eu un effet plus important sur la demande des consommateurs que sur la capacité des entreprises à produire.

Au fil du temps, l'effet des restrictions dans le pays exportateur comme dans le pays importateur s'est atténué, les entreprises et les ménages s'étant vraisemblablement adaptés au nouvel environnement. Le télétravail a été étendu à de nombreux secteurs économiques, permettant, à l'exception des activités nécessitant des interactions sociales (bars et restaurants, par exemple), une poursuite de l'activité économique.

Fin 2020, l'effet des confinements imposés dans le pays exportateur sur le commerce bilatéral n'est plus significatif d'un point de vue statistique : en s'adaptant, les exportateurs ont pu approvisionner leurs clients étrangers indépendamment des confinements mis en place dans leur propre pays. Du côté de la demande, l'effet des confinements dans le pays importateur a également diminué au second semestre 2020. Cet effet demeure toutefois significatif même fin 2020, ce qui suggère que les restrictions continuent d'entraver les échanges et les importations en provenance de partenaires étrangers.

Mis à jour le 14/07/2021 16:10

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Banque de France published this content on 14 July 2021 and is solely responsible for the information contained therein. Distributed by Public, unedited and unaltered, on 14 July 2021 15:00:01 UTC.