Les marchés actions cash connaissent d'importants bouleversements en raison de la chute des volumes d'échanges et de l'inflation des coûts réglementaires. Ces changements ont entraîné - au mieux - des marges très ténues, que peinent à atteindre les plus petits acteurs, face aux colosses de Wall Street comme JPMorgan, Goldman Sachs et Morgan Stanley. L'Europe a été encore plus sévèrement touchée par les règles introduites en 2018, qui dissocient la négociation des autres services de courtage tels que la recherche et les présentations aux investisseurs. Une décision qui a plombé les performances financières de nombreux acteurs, qui ont réduit à tours de bras leurs équipes.

Pression supplémentaire

Cette année, tous les segments actions sont en repli en Europe. Les revenus européens du trading actions ont chuté de 15 à 17% au premier semestre de l'année par rapport à la même période un an plus tôt, selon les données compilées par Coalition Development. Cela implique que plusieurs établissements fonctionnent en marges négatives. Les acteurs sont également touchés par le développement de la gestion passive (ETF, fonds indiciels), dont la part ne cesse de croître. Jefferies a récemment calculé que ces deux véhicules d'investissement sont passés de moins de 700 Mds$ avant 2008 à plus de 5 000 Mds$ en 2018.

Ce changement, conjugué au contexte de taux d'intérêt faibles ou négatifs et aux modifications apportées à la réglementation après 2008, a considérablement réduit les bénéfices et exerce de fortes pressions sur les hauts managements des petites et moyennes banques pour qu'ils justifient le maintien de leurs opérations sur actions dans d'autres régions avec des marges nulles ou négatives.

Les cinq premières banques américaines, les trois précitées plus Citigroup et Bank of America Merrill Lynch, n'ont cessé de croître face à leurs rivales européennes ces cinq dernières années, avec une part de marché de 59,1% au premier semestre 2019, contre 46% en 2014.

Des accords en vue

Bien que Macquarie ne soit pas la première banque à signaler ses projets de sortie du marché des actions cette année, ni même la plus importante puisque la Deutsche Bank a des plans à peu près identiques, la décision surprend car l'établissement embauchait encore récemment à Londres. Une recherche effectuée par Reuters sur le site de réseautage LinkedIn pour le personnel de Macquarie Group basé à Londres a identifié 38 employés dont le titre de poste montrait un lien clair avec l'équipe actions, dont 20 avaient démarré en 2018 ou 2019.

L'annonce est pourtant intervenue alors que l'établissement a enregistré des bénéfices records. Mais le directeur financier de la banque a expliqué qu'il ne voyait pas une rentabilité suffisante sur ces activités, que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis. La décision entraînera une centaine de suppressions de postes. Mais les clients de la banque australienne ne se retrouveront pas le bec dans l'eau en Europe, puisqu'un accord a été trouvé avec Kepler Cheuvreux pour assurer la transition. En échange, la clientèle asiatique du groupe français bénéficiera des services de Macquarie.

Les intervenants de marché voient dans la volte-face de l'établissement un signe que de nouvelles transactions vont se dessiner dans le secteur, même si le mouvement de consolidation déjà annoncé par le passé n'avait pas vraiment eu lieu, hormis quelques accords sporadiques comme l'externalisation par BNP Paribas de ses activités sur action en Asie, en 2016.

Les données de Coalition Development montrent que les suppressions de postes se sont accélérées dans la branche cash actions au cours du premier semestre 2019 : elles ont été deux fois plus nombreuses sur le seul 1er semestre 2020 que sur chacune des trois dernières années.