(Actualisé tout du long, production photo/TV à disposition)

LA PAZ, 11 novembre (Reuters) - Le président bolivien Evo Morales a annoncé dimanche qu'il allait démissionner en réponse aux troubles depuis l'élection présidentielle contestée du mois dernier, mais il a alimenté les craintes de nouveaux heurts en se disant victime d'un "coup d'Etat civique" et en dénonçant un mandat d'arrêt le visant.

Evo Morales est contesté depuis le 20 octobre, date de l'élection présidentielle dont il a été déclaré vainqueur dès le premier tour par la commission électorale mais dont l'opposition a contesté la régularité.

De vastes manifestations ont débuté dans la capitale La Paz lorsque le Tribunal électoral suprême (TSE) a interrompu la publication des projections au soir du scrutin, quand un second tour semblait se profiler entre le président sortant et Carlos Mesa, son plus proche adversaire.

Morales a fait l'annonce de sa démission après que l'armée lui a recommandé de quitter le pouvoir et alors qu'il avait lui-même déclaré qu'une nouvelle élection présidentielle serait organisée, un rapport de l'Organisation des États américains (OEA) réclamant l'annulation du scrutin pour cause d'irrégularités.

Le vice-président Alvaro Garcia a lui aussi annoncé sa démission.

Arrivé au pouvoir en 2006, le dirigeant socialiste a déclaré dans un discours télévisé qu'il allait soumettre sa démission afin de contribuer à restaurer la stabilité dans le pays, soulignant que son "obligation en tant que président autochtone et de tous les Boliviens est de rechercher la paix".

Toutefois, mettant en exergue les tensions actuelles, Morales a dit plus tard dans la journée que la police avait émis à son encontre un mandat d'arrêt qu'il a qualifié d'"illégal".

S'exprimant sur Twitter, il a ajouté que des "groupes violents" avaient attaqué son domicile.

Le commandant de la police nationale a nié, dans un entretien télévisé, l'existence d'un mandat d'arrêt visant Morales.

UNE OMBRE SUR LA GOUVERNANCE DU PAYS

Plusieurs alliés du dirigeant socialiste dans la région, parmi lesquels le président vénézuélien Nicolas Maduro et le président élu argentin Alberto Fernandez, ont dénoncé un "coup d'Etat".

Le ministre mexicain des Affaires étrangères a déclaré que le Mexique était disposé à offrir l'asile à Morales si celui-ci le demandait.

Les démissions de Morales et de son vice-président jettent une ombre sur la gouvernance du pays dans l'attente des résultats d'un nouveau scrutin.

Aux termes de la loi, le président du Sénat est chargé d'assurer l'intérim en cas d'absence de président et de vice-président. Mais la présidente du Sénat, Adriana Salvatierra, a elle aussi démissionné dimanche soir.

Un avocat spécialiste du droit constitutionnel a déclaré à Reuters que les parlementaires devaient se rencontrer pour s'accorder sur la mise en place d'une commission intérimaire ou sur l'identité d'un parlementaire chargé d'expédier les affaires courantes.

Dans un rapport rédigé sur la base d'un audit de l'élection qui n'a pas permis d'en vérifier le résultat, les émissaires de l'OEA ont jugé statistiquement peu probable qu'Evo Morales ait obtenu la marge de 10% nécessaire pour être élu à l'issue du premier tour du scrutin.

"Les manipulations du système informatique sont d'une telle ampleur qu'elles doivent faire l'objet d'une enquête approfondie de la part de l'État bolivien qui doit aller au fond des choses et déterminer la responsabilité de cette grave affaire", ont-ils écrit, invitant la Bolivie à se doter de nouvelles autorités électorales avant la tenue d'une nouvelle élection.

L'annonce de l'OEA a affaibli la position de Morales, plusieurs de ses alliés - au gouvernement et dans la législature - ayant alors démissionné. (Daniel Ramos et Monica Machicao, avec Cassandra Garrison; Jean-Philippe Lefief, Nicolas Delame et Jean Terzian pour le service français)