Paris (awp/afp) - Le taux d'emprunt de l'Italie s'est envolé mardi face à l'incertitude suscitée par la crise politique dans la péninsule, entraînant dans son sillage les pays du sud de l'Europe.

Cette aversion pour le risque a permis à l'Allemagne de jouer pleinement son rôle de valeur refuge: la première économie de la zone euro a vu son taux d'emprunt à dix ans reculer nettement.

Ces deux mouvements opposés ont accru le "spread" italien (l'écart entre le taux d'emprunt à dix ans du pays par rapport à celui de l'Allemagne). Il a ainsi dépassé la barre des 300 points au cours de la séance.

"Nous avons de l'inquiétude à cause de ce qui se passe en Italie, avec l'impression pour les investisseurs que le nouveau gouvernement n'obtiendra pas la confiance" du Parlement, a expliqué auprès de l'AFP Jean-François Robin, stratégiste obligataire chez Natixis.

"Il y a eu une vraie tension", qui s'est propagée aux titres des autres pays de l'Europe du Sud, a-t-il ajouté.

L'Italie est plongée dans le doute avant la formation du gouvernement de l'économiste Carlo Cottarelli, incarnation de l'austérité budgétaire choisi par le président Sergio Mattarella après son veto sur un gouvernement populiste sans garantie de maintien dans l'euro.

Attendu dans les prochaines heures, ce gouvernement a peu de chance d'obtenir la confiance d'un Parlement dominé par les populistes eurosceptiques. Il devrait en être réduit à expédier les affaires courantes avant des élections, sans doute dès cet automne.

"Nous allons vers de nouvelles élections avec (...) une crainte sur le maintien de l'Italie dans la zone euro", a poursuivi M. Robin.

"Les derniers sondages notent une progression de la Ligue (parti d'extrême droite) assez significative", a rappelé pour sa part Gilles Pradere, gérant obligataire senior de RAM Active Investments, basé à Genève. Dans ce contexte, il semble assez "probable" selon lui "que le prochain vote soit pour ou contre l'euro et c'est ça que redoute le marché".

La situation politique en Espagne était également dans tous les esprits, à trois jours du vote d'une motion de censure contre le gouvernement de Mariano Rajoy vendredi. Mais ces incertitudes n'étaient pas, selon M. Pradere, source de "stress majeur".

La motion de censure a été déposée par le parti socialiste espagnol, principale force d'opposition, pour tenter de renverser le gouvernement Rajoy, affaibli par un scandale de corruption.

A 18H00 (16H00 GMT), le taux d'emprunt à dix ans de l'Allemagne a nettement reculé, à 0,260% contre 0,344% lundi à la clôture du marché secondaire, où s'échange la dette déjà émise.

Le taux d'emprunt à dix ans de la France a également baissé, à 0,655% contre 0,699%.

A l'inverse, le rendement de même maturité de l'Italie s'est nettement tendu à 3,164% contre 2,684% lundi. Celui de l'Espagne a suivi la même pente, à 1,621% contre 1,525%, tout comme celui du Portugal à 2,193% contre 2,071%.

Le taux d'emprunt à dix ans de la Grèce a également progressé à 4,799% contre 4,487%.

En dehors de la zone euro, le taux d'emprunt britannique à dix ans s'est détendu à 1,197% contre 1,321% vendredi à la clôture.

Le taux d'emprunt à 10 ans des États-Unis reculait à 2,817% contre 2,931% vendredi, comme celui à 30 ans à 2,997% contre 3,092%. Le taux d'emprunt américain à deux ans s'établissait pour sa part à 2,391%, contre 2,476%.

Les marchés américain et britannique étaient fermés lundi en raison de jours fériés.

afp/rp