Pour démarrer la semaine, je vais parler en priorité de trois choses. Primo, le rebond énorme des marchés américains après une chute énorme des marchés américains. Secundo, des revirements incessants sur les droits de douane. Tertio, de ce qu'il faut absolument garder à l'œil pour naviguer dans le primo et le secundo.

Au cours des dix derniers jours, Wall Street a connu l'une des pires séries baissières de trois jours de son histoire, et l'une des plus fortes hausses jamais enregistrée sur une seule séance. Jamais les investisseurs n'avaient connu de telles créations ou destructions de valeur dans un laps de temps si court. Jamais ils n'avaient réorienté autant de flux aussi rapidement. Bref, c'est la période des superlatifs depuis que les Etats-Unis ont décidé de jeter des seaux de sables dans les engrenages de la mondialisation. La semaine dernière, le S&P 500 a gagné 5,7% après avoir chuté de 9,1% au cours de la précédente. L'élément déclencheur du rebond ? Donald Trump est revenu, temporairement, sur une partie des droits de douane infligés quelques jours plus tôt à la terre entière. Sauf sur ceux visant la Chine, l'automobile, l'aluminium et l'acier. Si le marché obligataire américain n'avait pas montré des signes aussi inquiétants la semaine dernière, la Maison Blanche aurait probablement maintenu une ligne dure. Mais la situation était en train de partir en quenouille et plusieurs soutiens bruyants de la présidence Trump étaient en train de se désolidariser devant le risque de sortie de route de l'économie américaine, voire de la stabilité financière globale.

Au cours des dernières 72 heures, la fable des droits de douane s'est enrichie de nouveaux rebondissements. L'administration Trump a commencé par sortir les smartphones et les ordinateurs des droits de douane de 145% désormais appliqués à la Chine, sous la pression d'influents groupes technologiques comme Apple. Sur Truth Social dimanche, le président américain a toutefois précisé qu'il ne s'agit pas d'une exonération totale, mais qu'une surtaxe de 20% concernera ces produits. Qui pourraient faire l'objet par la suite de droits de douane additionnels distincts, a fait savoir le secrétaire américain au Commerce Howard Lutnick. Il y aura en parallèle des droits de douane spécifiques sur les semiconducteurs et les médicaments, une fois que les travaux en cours pour déterminer leur intensité seront terminés. La cacophonie et l'improvisation sont toujours de mise. A force d'empiler les annonces, les réactions, les surréactions, les rétorsions, les punitions, les exemptions et tutti quanti, "personne ne comprend plus ce qu'il faut appliquer ni à qui", écrit un gérant américain réputé proche du camp républicain. Et imaginez le boulot des services douaniers US dans ce contexte ! "Le plus grand rallye de l'année se produirait le jour où Lutnick serait licencié… Je suggère que l'administration détermine qui contrôle le message, quel qu'il soit, car il change tous les jours. Les entreprises américaines ne peuvent ni planifier ni investir avec ces allers-retours incessants", a écrit pour sa part Sven Henrich, de NorthmanTrader. Le financier haussier Ed Yardeni, désabusé comme rarement, en est rendu à paraphraser Forrest Gump : "les droits de douane, c'est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais ce qu'on va avoir".

Pour s'extirper des allers-retours incessants sur les droits de douane et prendre de la hauteur, il faut surveiller trois choses : le rendement du 10 ans US, Scott Bessent et la Fed. Rien n'a vraiment arrêté Donald Trump dernièrement, hormis le marché obligataire. Ce que les financiers américains appellent les bond vigilantes, c’est-à-dire les sentinelles des taux, se sont réveillés la semaine dernière, face au risque créé par la politique de la Maison Blanche. Le rendement de la dette US à 10 ans est monté en flèche en direction de 4,5%, ce qui suggérait un potentiel de panique sur le marché de la dette. L'équipe Trump a été forcée de faire machine arrière sur les droits de douane réciproques. On garde donc un œil attentif sur les fluctuations des rendements US.

Les milieux d'affaires scrutent désormais le comportement de Scott Bessent, qui est jugé comme le plus capable et le plus pragmatique des hommes de Trump. Pas Navarro, Lutnick ou Greer. Bessent était auparavant gérant de hedge fund. Il a une excellente compréhension des marchés financiers et c'est lui qui a forcé le président américain à mettre de l'eau dans son vin la semaine dernière. Il a notamment été alerté par le fait que les banques américaines n'avaient pas ou très peu participé aux adjudications de dette américaine en début de semaine dernière. Au contraire, elles ont dû vendre de la dette américaine pour répondre aux besoins de liquidités de leurs clients. Un signal funeste qui explique en partie la volte-face de l'administration.

Enfin, la Fed est entrée dans la danse vendredi, ce qui explique le rebond de Wall Street après la rechute de jeudi. Manifestement, Jerome Powell a envoyé ses troupes faire passer des messages. La présidente de la réserve fédérale de Boston, Susan Collins, a déclaré que la Fed est prête à assurer le fonctionnement des marchés financiers en cas de besoin. Son collègue de la Fed de New York, John Williams, a lui indiqué que la banque centrale agirait pour tenir à distance le risque de stagflation. Il va de soi que la Fed assurera le fonctionnement des marchés et fera tout pour éviter la stagflation, mais le fait que cela ait été annoncé publiquement est volontaire et marque l'entrée de la banque centrale dans un processus plus actif. Les plus cyniques souligneront, à juste titre, que cela signifie aussi que quelque chose de moche est en train de grossir en arrière-plan, et qu'il faut le traiter au plus vite. Je suis tombé sur une remarque très juste faite par son mentor à Larry McDonald, un excellent connaisseur du marché qui anime le Bear Trap Report, un chat réputé de professionnels de la finance aux Etats-Unis. "Plus tu ressens de la peur en tant que trader, je te garantis que plus les banquiers centraux et les politiciens sont sous le feu des projecteurs pour apporter une réponse politique". C'est une autre façon de souligner que la Fed et les institutions américaines sont censées servir de garde-fou aux politiques de la Maison Blanche.

Les informations à ne pas manquer pour démarrer la semaine :

  • En Chine, les exportations explosent en mars, les importations se tassent. Logique… les clients de la Chine ont cherché à anticiper les droits de douane.
  • S&P relève la note souveraine de l'Italie à "BBB+".
  • Le chancelier allemand Merz devrait être élu le 6 mai, aux dernières nouvelles.
  • Sur l'agenda macro : la réunion de la Banque centrale européenne, jeudi. Le consensus table sur une baisse de 25 points de base. La veille, la Chine dévoilera sa première estimation de croissance pour le premier trimestre 2025. Aux Etats-Unis, plusieurs indicateurs rythmeront la semaine : ventes de détail mercredi, permis de construire et inscriptions au chômage jeudi, sans oublier une salve d'interventions de membres de la Fed.
  • Côté sociétés : après un creux, la saison des résultats repart cette semaine. Parmi les premières grosses affiches : Goldman Sachs, Johnson & Johnson, LVMH, ASML, Hermès, L'Oréal ou encore Rio Tinto. L'occasion de prendre le pouls des entreprises, dans un contexte encore marqué par le choc des droits de douane.

En Asie Pacifique, le rebond se poursuit après les signaux de détente relative sur les droits de douane. Le Japon et l'Inde gagnent près de 2%, pendant que la Corée du Sud et l'Australie progressent d'un peu plus de 1%. La Chine est dans le vert, notamment Hong Kong qui gagne 2%. Taiwan est plus hésitante avec les interrogations sur les droits de douane relatifs aux semiconducteurs. Les indicateurs avancés européens et américains sont vert fluo.

Le CAC40 démarre la séance en hausse de 1,9% à 7240 points. Le SMI prend 2,1% à 11 490 points. Le Bel20 gagne 2% à 4111 points.

Les temps forts économiques du jour

Pas grand-chose à se mettre sous la dent aujourd'hui. Tout l'agenda ici.

Les cotations sont celles du jour autour de 7h00 :

Les principaux changements de recommandations

  • AP Moller : Arctic Securities dégrade son conseil d'achat à conserver avec un objectif de cours réduit de 16000 DKK à 11000 DKK.
  • Adyen : TD Cowen maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 2103 à 1710 EUR.
  • Alten : AlphaValue/Baader Europe déclasse de vendre à réduire avec un objectif de cours réduit de 90,70 à 87,80 EUR.
  • AMS-Osram : JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 10,20 à 8,70 CHF.
  • Antin Infrastructure : Citi dégrade d'acheter à neutre avec un objectif de cours réduit de 14,90 EUR à 11 EUR.
  • ASML Holding : GF Securities dégrade de conserver à sousperformance avec un objectif de cours réduit de 742 USD à 582 USD.
  • Barry Callebaut : JP Morgan maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours réduit de 1300 à 1100 CHF.
  • Elior Group : Citigroup maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 4 à 3,80 EUR.
  • Galp Energia : Mediobanca passe de sousperformance à surperformance avec un objectif de cours relevé de 16,50 EUR à 17,50 EUR.
  • Givaudan : JP Morgan maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 4400 à 4300 CHF.
  • Holcim : RBC Capital maintient sa recommandation de performance de secteur et réduit l'objectif de cours de 103 à 95 CHF.
  • Indutrade : SEB Bank passe de conserver à acheter avec un objectif de cours réduit de 325 SEK à 285 SEK.
  • L'Oréal : Barclays maintient sa recommandation de surpondérer et réduit l'objectif de cours de 422 à 384 EUR.
  • Partners Group : Citi dégrade d'acheter à neutre avec un objectif de cours réduit de 1470 CHF à 1120 CHF.
  • QT Group : Inderes passe d'accumuler à acheter avec un objectif de cours réduit de 100 à 85 EUR.
  • Rolls-Royce : Baptista Research démarre le suivi à sousperformance avec un objectif de cours de 590 GBX.
  • Rheinmetall : AlphaValue/Baader Europe dégrade son conseil d'accumuler à alléger avec un objectif de cours réduit de 1450 à 1445 EUR.
  • Rightmove : Barclays améliore sa recommandation de souspondérer à pondération de marché avec un objectif de cours de 700 GBX.
  • Svenska Han : SEB Bank améliore sa recommandation de conserver à acheter avec un objectif de cours de 127 SEK.
  • Saint-Gobain : Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 96 à 92 EUR.
  • Saipem : Mediobanca passe de neutre à surperformance avec un objectif de cours réduit de 2,70 à 2,296 EUR.
  • Sika : Stifel maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 275 à 265 CHF.
  • Swissquote Group : AlphaValue/Baader Europe passe d'acheter à accumuler avec un objectif de cours relevé de 453 CHF à 454 CHF.
  • Tikehau Capital : Citigroup maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 25,50 à 20,80 EUR.
  • TotalEnergies : Gerdes Energy Research LLC maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 85 à 87 USD. Mediobanca dégrade de neutre à sousperformance avec un objectif de cours réduit de 60,50 EUR à 58 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l'ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)

  • BNP Paribas vise un closing de l'acquisition d'AXA Investment Managers début juillet 2025.
  • Nexans lance un programme de rachat d'actions portant sur un maximum de 750 000 titres.
  • Vallourec en discussion avec Aldebaran pour la vente de Serimax pour 79 millions d'euros.
  • McPhy Energy contraint de lancer une procédure de conciliation.
  • La Plantation des Terres Rouges, contrôlée par Vincent Bolloré, dépasse 6% du capital de Rubis.
  • NFL Biosciences dispose d’un horizon de trésorerie jusqu’au début du quatrième trimestre 2025.
  • Les principales publications du jour : LVMH, Kaufman, Robertet, HipayLe reste ici.

Dans le vaste monde

Annonces importantes (et moins importantes)

D'Europe

  • Ageas acquiert esure au Royaume-Uni pour 1,7 milliard de dollars.
  • Salzgitter met fin aux négociations de son rachat par un consortium.
  • Les actionnaires d'Holcim se prononceront le 14 mai sur la scission d'Amrize.
  • John Wood reçoit une proposition conditionnelle non contraignante de Sidara à 35 GBX par action.
  • Les actifs gérés par Ashmore baissent de 5% en raison des retraits institutionnels.
  • Scania (Volkswagen) reprend la division batteries pour l'industrie lourde de Northvolt, qui a fait faillite.
  • Sandoz lance une action en justice contre Amgen aux Etats-Unis.
  • SoftwareOne prolonge l'offre de rachat sur Crayon.
  • Energean signe un contrat de fourniture de gaz en Israël.
  • Andritz signe des contrats de service pour une usine de pâte à papier en Suède.
  • Burkhalter prévoit une augmentation modérée du bénéfice par action en 2025.
  • Legal & General votera contre la réélection du président de BP Plc.
  • Les principales publications du jour : Galp Energia, Ashmore, Burkhalter

D'Amérique du Nord

  • CVC étudierait une offre de 75 milliards de dollars pour le prêteur privé américain Golub Capital, selon le FT.
  • KKR s'apprête à acheter OSTTRA pour environ 3 milliards de dollars, selon Bloomberg.
  • General Motors supprime 500 emplois au Canada.
  • Les principales publications du jour : Goldman Sachs, M&T Bank

D'Asie Pacifique et d'ailleurs

  • L'entreprise familiale du milliardaire italien Gianluigi Aponte apparaît comme le principal investisseur d'un groupe cherchant à acheter 43 ports au conglomérat CK Hutchison, selon Bloomberg.
  • Le bénéfice du premier trimestre de TSMC a probablement grimpé en flèche, mais les politiques de Trump assombrissent les perspectives.
  • Les principales publications du jour : néant…

Le reste de l'agenda mondial des publications ici.

Lectures