par Julien Toyer

Les ministres des Finances de la zone euro se sont entendus la semaine dernière sur un dispositif de prêts bilatéraux à Athènes coordonné par la Commission européenne mais la chancelière Angela Merkel est réticente à donner son feu vert politique à ce mécanisme.

Selon plusieurs sources diplomatiques européennes, l'hypothèse désormais la plus sérieusement étudiée à Bruxelles est celle d'une action conjointe des pays de la zone euro et du Fonds monétaire international (FMI), même si la possibilité d'une intervention de la zone euro seule n'est pas écartée.

Des prêts bilatéraux à des taux inférieurs à ceux du marché et pour un montant global compris entre 20 et 22 milliards d'euros seraient offerts à Athènes par un groupe de pays, sur une base volontaire uniquement.

Des conditions strictes en matière de gestion de la dette et de réduction des déficits y seraient assorties, afin de satisfaire notamment l'Allemagne et les Pays-Bas.

Ces conditions reprendraient en grande partie celles déjà énoncées par la Commission lorsque le plan d'austérité grec a été endossé en février, dit-on dans l'entourage d'Olli Rehn.

Lors d'une audition au Parlement européen, le président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, a d'ailleurs évoqué cette solution en insistant sur le fait qu'il ne s'agissait en aucun cas d'un renflouement comparable à ceux organisés par le FMI.

"Il ne faut pas confondre un transfert ou une subvention avec un prêt sans condition comme ceux accordés par le FMI (...) Je crois que nous ne pouvons parler que d'un prêt sans aucun caractère d'aide. Cela doit être extrêmement clair", a-t-il dit.

ACCORD AVANT JEUDI ?

Le Premier ministre grec, Georges Papandréou, a abondé dans ce sens et fait valoir qu'il ne demandait pas que la Grèce soit renflouée mais qu'elle puisse "bénéficier d'une période de calme et de stabilité suffisamment longue pour réforme en profondeur".

Ces déclarations visent avant tout à rassurer l'Allemagne, qui s'inquiète de la compatibilité d'une aide avec les traités européens et de l'abandon de la clause de "non-renflouement" d'un Etat par un autre, l'un des piliers de la monnaie unique.

Auparavant, le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, avait de son côté que le mécanisme de prêts bilatéraux sur lequel se sont mis d'accords les pays de la zone euro la semaine dernière pourrait être complété par une action du FMI.

Selon plusieurs sources haut placées participant directement aux négociations, l'institution dirigée par Dominique Strauss-Kahn pourrait prêter jusqu'à 15 milliards d'euros à la Grèce et fournir la majeure partie de l'expertise technique nécessaire au suivi des mesures.

D'autres sources diplomatiques ont dit que le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, avait des contacts bilatéraux avec les principaux dirigeants de l'UE et qu'il espérait parvenir à un consensus avant l'ouverture du sommet.

Il devait dîner lundi soir avec les ministres chargés des Affaires européennes puis rencontrer José Manuel Barroso mardi matin et, selon ces mêmes sources, il travaille à une nouvelle version, plus précise, de la déclaration du 11 février.

Son objectif est de parvenir sans tarder à un accord permettant de lever toute ambiguïté politique sur une aide des Vingt-Sept à la Grèce, tout en évitant d'infliger à Angela Merkel une pénible discussion jeudi et vendredi.

DISCUSSION "PAS NÉCESSAIRE" LORS DU SOMMET

La chancelière allemande a répété lundi qu'il n'était "pas nécessaire de discuter d'une aide d'urgence lors du sommet" car la Grèce n'avait encore demandé d'aide.

Elle fait face début mai à des élections régionales importantes pour sa majorité au Bundesrat et doit composer à la fois avec l'hostilité d'une majorité d'Allemands à une aide à la Grèce et avec les vues divergentes de son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, et de son partenaire de coalition, le parti libéral FDP.

Le leader du FDP, le ministre des Affaires étrangères Guido Westerwelle, a déclaré à Bruxelles qu'il défendrait les intérêts des contribuables allemands.

"Nous montrons une solidarité politique mais il n'est pas possible que l'Allemagne ou l'UE mette de l'argent à disposition comme cela car la pression en vue de mener des réformes s'amenuiserait en Grèce", a-t-il dit.

Lundi matin, dans un entretien au quotidien économique allemand Handelsblatt, José Manuel Barroso s'était dit "certain que l'Allemagne fera une contribution constructive pour résoudre la crise actuelle".

Cet appel avait immédiatement été relayé par plusieurs ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept, dont le Français Bernard Kouchner, l'Italien Franco Frattini et l'Autrichien Michael Spindelegger.

Avec les bureaux de Bruxelles et Berlin, édité par Marc Angrand