CSG fait partie des entreprises étrangères qui ont accepté, au début de l'année, d'établir des bureaux régionaux en Arabie saoudite plutôt que de superviser les opérations à distance depuis Dubaï, le centre commercial en effervescence des Émirats arabes unis voisins.

Un ultimatum saoudien lancé à la mi-février a incité certaines entreprises à repenser leur stratégie : à partir de 2024, les entreprises souhaitant obtenir des contrats publics dans la plus grande économie du Moyen-Orient devront avoir des bureaux dans le royaume.

Mais, parallèlement à cette approche brutale, le gouvernement a lancé de vastes réformes économiques et sociales pour attirer les investisseurs, visant à faire du royaume un endroit plus facile à vivre, et à réduire les formalités administratives qui les ont longtemps dissuadés.

Dubaï, dotée d’un des aéroports les plus fréquentés au monde - du moins à l'époque pré-pandémique - ainsi que d'hôtels et de restaurants de luxe, voudrait bien rester le centre d'affaires de la région. 

Mais l'Arabie saoudite met tout en œuvre pour rattraper son retard. L'agence de presse nationale SPA a déclaré début février que 24 entreprises internationales avaient signé des accords pour établir des bureaux régionaux principaux à Riyad. Parmi lesquelles : PepsiCo, Schlumberger, Deloitte, PwC, Tim Hortons, Bechtel, Robert Bosch et Boston Scientific.

Bechtel a confirmé avoir établi un siège régional en Arabie saoudite, PwC a déclaré avoir un bureau de conseil régional à Riyad et Deloitte s'est dit prêt à agir en tant que "partenaire stratégique" pour aider l'Arabie saoudite à atteindre ses objectifs. Bosch a déclaré qu'elle explorait les opportunités commerciales dans le royaume. Les autres entreprises figurant sur la liste n'ont pas répondu aux demandes de commentaires de Reuters.

Faciliter le climat des affaires

Dans le cadre des changements économiques poussés par le dirigeant de facto du royaume, le prince héritier Mohammed bin Salman, l'Arabie saoudite a fait un bond de 30 places depuis 2019 dans le classement de la Banque mondiale sur la facilité de faire des affaires. Elle se classe désormais à la 62e place, derrière les Émirats arabes unis, à la 16e place.

Parmi les réformes clefs avancées par le ministre saoudien de l'Investissement Khalid al-Falih pour faciliter l’installation de sociétés étrangères, celle de l'introduction de la propriété étrangère à 100% dans un certain nombre de secteurs. L'obtention d'une licence d'investisseur étranger nécessite désormais deux documents, et non plus 12, et peut prendre trois heures, et non plus trois jours.

La Commission royale pour la ville de Riyad a déclaré aux médias saoudiens qu'elle prévoyait d'attirer 500 entreprises étrangères d'ici 2030.

Pour y parvenir, l'Arabie saoudite a dévoilé une série d'initiatives. Son fonds souverain vise à lancer une nouvelle compagnie aérienne pour concurrencer les transporteurs du Golfe et de nouveaux hôtels sont prévus. Riyad, une immense étendue urbaine, est en train de construire un système de métro, tandis que certaines restrictions sociales, comme l'interdiction des cinémas, ont été assouplies dans cette nation musulmane religieusement conservatrice.

Mais il reste de nombreuses lacunes à combler pour rivaliser avec Dubaï. Selon les dirigeants, Riyad a notamment besoin de davantage d'écoles internationales pour attirer les expatriés qualifiés et leurs familles.

Des problématiques plus larges

Les investisseurs ont également d'autres inquiétudes. L'Arabie saoudite a fait face à un barrage de critiques occidentales sur son bilan en matière de droits, notamment le meurtre en 2018 de Jamal Khashoggi par des agents saoudiens dans le consulat du royaume en Turquie, tandis qu'une campagne anti-corruption en 2017 a vu des princes saoudiens, d'anciens ministres et des dirigeants d'entreprise enfermés, certains pendant des semaines ou des mois, dans un hôtel devenu centre de détention.

Pour l'Arabie saoudite, qui a bâti sa richesse sur de vastes réserves de pétrole, la nécessité d'attirer les investisseurs et de se diversifier est de plus en plus pressante alors que le monde cherche à réduire sa dépendance aux combustibles fossiles.

Pourtant, donner un ultimatum aux entreprises étrangères pour qu'elles s'installent dans le royaume pourrait nuire à sa cause plutôt que de l'aider, a déclaré Jim Krane, chargé de recherche au Baker Institute de l'université Rice à Houston, estimant que cela "sent un peu le désespoir et l'arbitraire. C'est l'une des choses qui va probablement faire hésiter les entreprises et leurs dirigeants."

Dubaï, qui a arraché la couronne régionale au Bahreïn voisin dans les années 1990, a déjà montré qu'elle était prête à se battre pour conserver son titre. Le dirigeant de Dubaï a annoncé un plan quinquennal visant à augmenter de 50 % les liaisons aériennes et maritimes et à plus que doubler la capacité touristique et hôtelière au cours des deux prochaines décennies.