Derrière cette performance française, le tableau d’ensemble est plus préoccupant : les investissements étrangers en Europe sont au plus bas depuis neuf ans, alors qu’ils progressent de 20% aux États-Unis en 2024.

Les investisseurs étrangers pointent du doigt les coûts élevés de l’énergie, une fiscalité dissuasive et des incertitudes face aux crises. Autant de faiblesses là où les États-Unis marquent des points, soutenus par des plans ambitieux comme l’Inflation Reduction Act ou le Chips Act, qui dopent leurs industries stratégiques.

À cela s’ajoutent les freins à l’innovation, renforcés par une sur-réglementation qui paralyse le développement. La plus grande menace pour l’Europe ne vient peut-être ni de Chine ni des États-Unis, mais bien de Bruxelles.

D’après EY, les groupes nord-américains, historiquement moteurs de l’investissement en Europe, se montrent désormais plus prudents : le nombre d’emplois créés par leurs projets en Europe a chuté de 18% en un an, et celui des projets de 11%. Les tensions géopolitiques arrivent en tête des risques perçus, devant le contexte macroéconomique et les barrières commerciales.

La France reste solide, mais confrontée à ses limites

Selon l’enquête menée par EY auprès de 200 dirigeants internationaux, la France séduit par la taille de son marché intérieur, son écosystème de R&D, et la qualité de sa main-d’œuvre. Mais ces atouts ne suffisent pas à masquer des blocages structurels.

En comparaison à d'autres pays européens, les investissements étrangers génèrent moins d’emplois en France : 33 postes en moyenne par projet industriel, contre 180 en Espagne et 128 en Allemagne. Un écart lié au coût du travail, à la rigidité du marché de l’emploi, et à un climat social jugé peu prévisible.

Les critiques récurrentes ciblent aussi le manque de foncier industriel, une énergie peu compétitive, un retard en robotisation et un déficit d’agilité. Des freins qui pèsent sur l’attractivité industrielle, même si la France reste première en Europe pour les projets manufacturiers, avec un quart des implantations en 2024.

Reste que la dynamique ralentit : le nombre de projets baisse de 14%, et celui des créations d’emplois de 27%. Une chute record

L’intelligence artificielle, nouvel atout tricolore

Autre levier d’attractivité, l’intelligence artificielle. La France a promis 5 milliards d’euros d’investissements publics sur cinq ans pour soutenir la filière. S’y ajoutent 109 milliards d’investissements privés annoncés récemment, dont 50 milliards émiratis pour un campus IA et 59 pour des data centers notamment.

À l’échelle européenne, Ursula von der Leyen a évoqué 200 milliards d’euros d’investissements publics et privés pour soutenir les technologies d’avenir d’ici 2030.

On est loin, très loin, des montants annoncés en Chine et aux États-Unis. À eux seuls, les 'Magnificent 7' prévoient d’investir 320 milliards de dollars en 2025. À cela s’ajoutent les 500 milliards de dollars qu'Open AI prévoit d’investir d’ici 2030 avec le projet Stargate. En Chine, plus de 500 projets en intelligence artificielle sont déjà lancés, soutenus par des centaines de milliards d’investissements.

Des marges de progrès identifiées

Toujours selon EY, les dirigeants étrangers attendent de la France qu’elle concentre ses efforts sur trois priorités :

  • Réduire la fiscalité ;

  • Soutenir les industries stratégiques ;

  • Favoriser l’innovation numérique et la compétitivité.

Choose France : un sommet record pour l’attractivité tricolore

La huitième édition du sommet Choose France se tient ce lundi à Paris. À cette occasion, Emmanuel Macron doit annoncer 20 milliards d’euros de nouveaux investissements, un record. A cela doivent s’ajouter 17 milliards correspondent aux engagements pris lors du dernier sommet sur l’intelligence artificielle.

L’Élysée vante un “paradis énergétique”, porté par le nucléaire. C’est effectivement les data centers qui concentrent une part importante des annonces : 6,4 milliards d’euros pour quatre sites portés par Prologis, 10 milliards investis par Brookfield dans le nord du pays, et 2,3 milliards par Digital Realty pour deux nouveaux centres.

En 2024, la France a accueilli autant de projets industriels que le Royaume-Uni, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie réunis. Mais cette performance mérite d’être nuancée : la majorité de ces projets sont des extensions de sites existants, donc moins créateurs d’emplois. Sur un an, le nombre de créations nettes est en recul de 22%.