Le retour aux affaires de Donald Trump a poussé les investisseurs à se positionner sur des stratégies relativement simples, en lien avec les orientations politiques du nouveau président. Mais la plupart de ces stratégies ont échoué, parce que la réalité et la fiction ont rapidement divergé. Le dollar fort ? Le billet vert a perdu près de 4% depuis le 1er janvier, soit l'une de ses pires performances trimestrielles depuis la crise de 2008. L'avènement du bitcoin ? La cryptomonnaie est la classe d'actifs la moins prolifique de ce début d'année, avec un chute de 26%. Les petites capitalisations américaines ? L'indice Russell 2000 est à -9% en 2025, alors que l'indice des valeurs moyennes européennes (MSCI Europe MidCap) est à +9%. Tous les "Trump Trade" n'ont pas échoué, mais les plus emblématiques ont tourné au fiasco. C'est une bonne leçon pour tout le monde : en investissement, l'écart entre une idée simple et une idée simpliste est souvent ténu.
Pourquoi cette entrée en matière ? Parce que nous sommes le 31 mars et que les statistiques trimestrielles vont prendre fin ce soir. L'indice large S&P500 accuse pour le moment une baisse de 5,1% en 2025 et de 6,27% en mars. Si Wall Street échoue à se redresser aujourd'hui, mars 2025 pourrait être le pire mois boursier depuis avril 2022. Dit autrement, ce serait le pire mois sur les trente derniers. 31 mars donc, mais aussi semaine cruciale puisque la Maison Blanche a fixé au 2 avril la date d'annonce de multiples barrières douanières.
Le décrochage des marchés la semaine dernière est lié à la question des droits de douane. Donald Trump a planté une première banderille dans l'industrie automobile. Une décision qui a dérouté, sans mauvais jeu de mots (bon OK, un peu quand même) aux Etats-Unis, parce qu'elle risque de frapper durement les locaux de l'étape, Ford, General Motors et Stellantis. Et leurs salariés, qui font partie des classes laborieuses censées être protégées par la politique du républicain. D'autres annonces vont suivre cette semaine, avec un niveau d'incertitude élevé sur le contenu exact, et beaucoup d'inconnues sur ce qui pourrait se produire d'ici demain. L'indice de volatilité VIX est remonté en flèche, signe de la nervosité qui monte à mesure que la date butoir approche.
Les milieux d'affaires américains ont tendance à considérer que la baisse de Wall Street reflète assez bien le risque lié à la guerre commerciale, mais ils ont du mal à se projeter sur le coup d'après. Le camp de ceux qui redoutent une récession à cause d'un cocktail de vents contraires (droits de douane, désordres engendrés par le DOGE, inflation…) n'est pas majoritaire, mais il se renforce de jour en jour. JPMorgan a relevé en fin de semaine dernière à 40% le risque de récession. Bank of America souligne toutefois pour sa part que si le sentiment à Wall Street est clairement morose, le marché des dérivés ne signale pas encore de peur extrême. Le marché est-il prêt à acheter la nouvelle après avoir vendu la rumeur, pour inverser le célèbre adage ? Rien n'est moins sûr, même si les banques américaines pensent généralement que Trump pourrait faire pas mal d'esbrouffe d'ici demain, pour finalement laisser la porte ouverte à une approche plus souple. La dernière mode à Wall Street consiste aussi à se projeter sur le 4 avril et la publication des donnée sur l'emploi de mars. Il devrait s'agir du premier mois où l'impact des coupes sombres du DOGE seront visibles sur l'emploi fédéral. Problème, les données de janvier et février ont été biaisées par la météo défavorable. La statistique pourrait donc être difficile à interpréter. Pour aiguiller vos choix, je vous partage cette citation d'un grand gérant américain piochée dans une dépêche d'agence ce matin : "Soit nous nous dirigeons vers une période de risque important, soit nous nous dirigeons vers un rebond". Ben voilà, c'est pas compliqué la finance. Je tairai son nom par pudeur.
Les informations à ne pas rater pour bien démarrer la semaine :
- Donald Trump s'est-il fait macroniser par Vladimir Poutine ? Trump s'est dit "très en colère" contre le Kremlin à cause de l'absence d'avancées dans le processus de trêve en Ukraine. Il a menacé la Russie de pénalités sur le pétrole. Par ailleurs, le président américain a mis la pression sur l'Iran en évoquant des bombardements si le pays ne conclut pas d'accord sur le nucléaire. Enfin, Donald Trump envisage sérieusement un troisième mandat présidentiel, même si la constitution américaine l'interdit.
- La Norvège est invitée à renoncer à l'interdiction faite à son richissime fonds souverain d'investir dans les entreprises de défense.
- L'UE va investir 1,4 milliard de dollars dans l'intelligence artificielle, la cybersécurité et les compétences numériques.
- Plusieurs sociétés françaises ont reçu un questionnaire en provenance des autorités américaines, leur demandant si elles mettent en place des programmes de lutte contre les discriminations, auquel cas elles pourraient être bannies des contrats fédéraux.
- Benjamin Netanyahu se rend en Hongrie du 2 au 6 avril.
- La Chine poursuit son offensive économique en soutenant ses banques et en annonçant une réorganisation de ses constructeurs automobiles.
- Elon Musk va racheter X avec sa société xAI, en titres, sur la base d'une valeur d'entreprise de 45 Mds$.
- Les indicateurs PMI Chinois de mars ont légèrement dépassé les attentes dans l'industrie et les services.
- Sur l'agenda : outre le fameux 2 avril, on surveillera l'inflation européenne de mars (mardi) et les traditionnels chiffres mensuels de l'emploi américain (vendredi). Sans oublier un véritable feu d'artifice de discours de banquiers centraux tout au long de la semaine, dont celui du grand prêtre de la politique monétaire mondiale, Jerome Powell, attendu vendredi après-midi. Côté entreprises, l'agenda sonne creux. C'est le calme avant la tempête des résultats trimestriels, qui reprendront dès le 11 avril... déjà.
En Asie Pacifique ce matin, les cachettes sont rares. Tokyo coule de près de 4%, Taiwan de 3,5% et Séoul de près de 3%. Les trois économies, très tournées vers l'export, ont tout à perdre des tarifs douaniers. L'Australie souffre aussi (-1,7%), comme Hong Kong (-1,5%), tandis que l'Inde limite la casse (-0,3%). Les indicateurs avancés occidentaux sont rouge vif.
Le CAC40 perdait 1% à 7834 points peu après l'ouverture. Le SMI reculait de 0,8% à 12 736 points. Le Bel20 abandonnait 0,8% à 4363 points.
Les temps forts économiques du jour
La première estimation de l'inflation allemande de mars tombera à 14h00. Aux Etats-Unis, l'indicateur PMI de Chicago et l'indice manufacturier de la Fed de Dallas suivront dans l'après-midi. Tout l'agenda ici.
Les cotations sont celles du jour autour de 7h00 :
- Euro : 1,0835 USD
- Spread Bund / OAT : 71 points (+1,3%)
- VIX : 21,7 (+3%)
- Once d'or : 3107 USD
- Brent : 72,43 USD
- 10 ans US : 4,209%
- Bitcoin : 81 550 USD
Les principaux changements de recommandations
- Bunzl : Barclays surpondère de pondération de marché à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 3500 GBX à 3650 GBX.
- Eiffage : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 119 à 128 EUR.
- Energean : Jefferies passe de sousperformance à conserver avec un objectif de cours relevé de 800 GBX à 910 GBX.
- Euroapi : Bernstein dégrade de surperformance à performance de marché avec un objectif de cours réduit de 4,40 EUR à 2,90 EUR.
- Genfit : Guggenheim maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours relevé de 7 à 9 EUR.
- Gerresheimer : KeyBanc Capital Markets dégrade de surpondérer à pondération de secteur.
- Hochtief : Jefferies passe d'acheter à conserver avec un objectif de cours relevé de 156 à 158 EUR.
- Ipsos : Bernstein maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours réduit de 79 à 72 EUR.
- Kitron : Nordea Bank démarre le suivi à l'achat avec un objectif de cours de 57 NOK.
- Legrand : Barclays maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 124 à 123 EUR.
- Norion Bank : SEB Bank améliore son conseil de vente à conserver avec un objectif de cours relevé de 36 SEK à 37 SEK.
- Opmobility : Oddo BHF maintient sa recommandation de surperformance avec un objectif de cours relevé de 12 à 14 EUR.
- Pernod Ricard : Barclays maintient sa recommandation de souspondérer avec un objectif de cours réduit de 102 à 98 EUR. Deutsche Bank maintient sa recommandation de conserver avec un objectif de cours réduit de 103 à 97 EUR.
- Sartorius Stedim Biotech : Goldman Sachs maintient sa recommandation d'achat avec un objectif de cours réduit de 243 à 234 EUR.
- Schneider Electric : Barclays maintient sa recommandation de surpondérer avec un objectif de cours réduit de 300 à 276 EUR.
- Scor : UBS passe d'acheter à neutre.
- SMA Solar Technology : Jefferies passe d'acheter à conserver avec un objectif de cours de 20 EUR.
- Société Générale : Mediobanca maintient sa recommandation neutre avec un objectif de cours relevé de 38,80 à 43,70 EUR.
- Soitec : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 66 à 58 EUR.
- STMicroelectronics : Citigroup maintient sa recommandation d'achat et réduit l'objectif de cours de 30 EUR à 27 EUR.
- Vinci : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 135 à 141 EUR.
En France
Annonces importantes (et moins importantes… Je précise que les informations sont données à chaud avant l'ouverture et ne préjugent pas de la couleur des actions pendant la séance)
- Airbus, Thales et Leonardo ont déposé un dossier préliminaire auprès de l'UE pour rapprocher leurs filiales spatiales. Par ailleurs, le singapourien BOC Aviation va acheter 70 A320Neo (et 50 B737MAX à Boeing).
- Stellantis continuera à acheter des crédits CO2 auprès du "pool" Tesla en 2025.
- Sanofi annonce que Qfitlia est la première thérapie approuvée aux Etats-Unis pour le traitement de l'hémophilie A ou B avec ou sans inhibiteurs.
- La filiale britannique d'Airbus remporte un contrat de 194 millions de dollars pour la plate-forme d'atterrissage d'un rover martien.
- LVMH regroupe La Samaritaine et le Bon Marché sous la même gouvernance.
- Fnac Darty lance une offre de rachat d'OCEANE à échéance mars 2027.
- Valneva soumet au Royaume-Uni une demande d'extension d'étiquetage pour le vaccin contre le chikungunya IXCHIQ destiné aux adolescents.
- Casino vend pour 71 millions d'euros d'actifs immobiliers.
- Maurel annonce que l'OFAC a révoqué sa licence pour le Venezuela et que la période de liquidation s'étend jusqu'au 27 mai 2025.
- Drone Volt lève 5 M€ via une ABSA.
- Les principales publications du jour : Equasens, Dekuple, Vranken, Sapmer, Gérard Perrier, UTI Group, Saint Jean Groupe, Solutions 30… Le reste ici.
Dans le vaste monde
Annonces importantes (et moins importantes)
D'Europe
- Poste Italiane a acquis l'essentiel de la participation de Vivendi dans Telecom Italia, pour monter de 9,8% à 24,8% contre 684 M€ (0,2975 EUR l'action).
- UniCredit, qui a reçu l'approbation de la BCE pour l'achat de Banco BPM, laisse toutes les possibilités
- Le président d'Unipol laisse entendre qu'ING pourrait étudier une offre sur Banca Popolare di Sondrio, courtisé par BPER Banca.
- EQT et First Kraft lancent une OPA amicale à 90 SEK par action sur Fortnox.
- ISS invite les actionnaires de Banca Monte dei Paschi à voter contre le relèvement du plafond de l'offre de Mediobanca.
- Hakan Samuelsson est nommé CEO de Volvo Car.
- Aston Martin obtient un nouveau financement de 68 millions de dollars et veut vendre des parts dans l'écurie de F1.
- Pets at Home prévoit un bénéfice sous-jacent inférieur pour l'exercice 2026.
- John Wood Group a identifié des "faiblesses matérielles et des défaillances" dans sa culture financière au sein de son unité commerciale Projects.
- ISS et Glass Lewis soutiennent la fusion de SoftwareOne avec Crayon.
- Associated British Foods a déclaré que le patron de sa filiale Primark, Paul Marchant, a démissionné avec effet immédiat à la suite d'une allégation faite par une personne au sujet de son comportement.
- Alcon va lancer son programme de rachats d'actions.
- UBS n'a pas l'intention de quitter la Suisse, selon son chef de la conformité.
- Eni confirme que les Etats-Unis n'autoriseront plus les paiements de pétrole en provenance de PDVSA (Venezuela).
- Julius Bär finalise la vente des activités au Brésil à BTG Pactual.
- La Juventus, qui a besoin de plus d'argent, obtient déjà 16 millions de dollars des Agnelli.
- Les principales publications du jour : CPI Property, Cancom, Yougov…
D'Amérique du Nord
- Le FBI enquête sur une cyberattaque visant Oracle, rapporte Bloomberg.
- Blackstone envisage de prendre une participation dans l'entreprise dérivée de TikTok aux Etats-Unis, selon Reuters.
- Une filiale de Johnson & Johnson condamnée à payer 1,64 milliard de dollars dans une affaire de commercialisation de médicaments contre le VIH.
- Un médicament expérimental d'Eli Lilly, le lepodisiran, réduit de 94% le facteur de risque génétique de maladie cardiaque dans un essai clinique de phase II.
- Glass Lewis recommande de voter contre la rémunération du PDG de Goldman Sachs.
- Les principales publications du jour : néant…
D'Asie Pacifique et d'ailleurs
- Les grandes banques chinoises (Bank of Communications, Bank of China, Postal Savings Bank of China et China Construction Bank montent après le renforcement de leurs fonds propres par Pékin via des augmentations de capital conséquentes.
- Les actions de CK Hutchison chutent après le retard probable de la signature de l'accord sur les ports du Panama.
- Country Garden publie une perte 2024 équivalente à 4,5 milliards de dollars.
- Jingdong Industrials, la filiale industrielle de com, postule à une IPO à Hong Kong pour le 3e fois en deux ans.
- Saint German, le fond de Nelson Tanure veut peser plus lourd au conseil de GPA, dont Casino détient 22,5%.
- Les principales publications du jour : néant…
Le reste de l'agenda mondial des publications ici.
Lectures
- Comment faire des plus-values énormes ou des pertes inouies avec des obligations d'Etat ? (Wall Street Journal, en anglais).
- Microsoft a 50 ans (The Conversation).
- La carte des liens entre le DOGE et la Silicon Valley (Wired, en anglais).
- "The White Lotus" saison 3 : pourquoi le changement de générique fait tant parler (The Conversation).
- Christophe Guilluy, auteur de "La France périphérique", penseur d’un pays fracturé et homme blessé (Le Monde).
- Marie-Jeanne n'aime pas aller à la salle (Klement on Investing, en anglais).
- Quand une économie passe des règles aux tractations, il est difficile de faire marchine arrière (Bloomberg, en anglais).