* Les hôpitaux de l'Est submergés

* Situation très tendue en Ile-de-France

* L'armée multiplie les transferts sanitaires

par Christian Hartmann et Tangi Salaün

STRASBOURG/PARIS, 30 mars (Reuters) - Le ballet des hélicoptères militaires s'est poursuivi lundi dans l'est de la France pour soulager les services de réanimation des hôpitaux de la région, submergés depuis une dizaine de jours par un afflux de malades du coronavirus.

La situation est aussi très tendue dans les hôpitaux de Paris et d'Ile-de-France, à leur tour frappés par la vague de malades dans un état grave, même si le nombre de patients en réanimation a enregistré dimanche, au niveau national, sa plus faible hausse depuis plusieurs jours (+8,4%, à 4.632).

"Aujourd'hui, en pneumologie, on est complet. Complet de chez complet", a déclaré lundi à Reuters Jérôme Pinot, un médecin de l'hôpital Georges-Pompidou, à Paris.

"Pour trouver une place en réanimation, c'est un casse-tête incessant. Est-ce qu'on peut faire sortir ce patient pour le mettre dans cette unité-là pour prendre un autre patient? C'est un jeu incessant."

La France a réussi depuis le début de la crise à doubler le nombre de lits de réanimation, passé de 5.000 à 10.000, et le gouvernement a promis ce week-end de porter ce nombre à 14.500 dans les meilleurs délais.

"On a survécu au week-end. Il y a eu difficultés après difficultés et mauvaises nouvelles après mauvaises nouvelles mais on est toujours debout", a déclaré lundi une infirmière parisienne, épuisée à la fin d'une longue garde.

La situation est particulièrement critique dans les régions les plus touchées, comme l'Ile-de-France et l'Alsace, ce qui a contraint les autorités à multiplier les transferts de malades vers des villes plus réservées, et même vers des pays voisins.

A Strasbourg, des pompiers en combinaison de protection ont chargé lundi matin six nouveaux patients à bord d'hélicoptères Caïman NH90 médicalisés de l'armée de terre, qui les ont amenés vers des hôpitaux à Berne et Saint-Gall, en Suisse, ainsi que Francfort en Allemagne, a annoncé l'état-major des Armées.

D'autres rotations étaient envisagées dans la journée et les jours prochains en fonction de l'état des malades, des demandes des autorités sanitaires locales et des disponibilités dans les hôpitaux qui se sont portés volontaires pour accueillir des patients, a-t-on dit de même source.

20% DES PATIENTS TRANSFÉRÉS PAR L'ARMÉE

"Nos hélicoptères effectuent depuis samedi de nombreuses missions dans des délais très contraints", a déclaré la ministre des Armées, Florence Parly, à Reuters.

"Ce sont des opérations logistiques et sanitaires complexes, chaque appareil est désinfecté après son vol", a poursuivi la ministre en saluant le "professionnalisme" des soldats chargés de mener à bien les évacuations en étroite coordination avec les pompiers.

"Ces évacuations s'inscrivent dans un effort global. Depuis le début de la crise, les armées ont assuré près de 20% des transferts de patients atteints du covid-19 : par avion de l'armée de l'air, hélicoptère de l'armée de terre ou bâtiment de la marine."

Des hélicoptères militaires avaient déjà transporté samedi et dimanche une douzaine de patients vers l'Allemagne, la Suisse mais aussi des villes de régions françaises moins touchées par l'épidémie de Covid-19, au moins pour le moment, comme Clermont-Ferrand et Grenoble.

"Les opérations de désengorgement des hôpitaux de l'Est de la France se poursuivront aussi longtemps que nécessaire", a déclaré le porte-parole de l'état-major, le colonel Frédéric Barbry.

Un Airbus A400M médicalisé de la Luftwaffe a de son côté transporté dimanche deux malades vers un hôpital d'Ulm, en Allemagne.

Auparavant, l'armée de l'air française avait évacué 24 patients de l'Est de la France vers des villes du sud et de l'ouest du pays à bord d'un Airbus A330 MRTT médicalisé, tandis qu'un porte-hélicoptères amphibie, le Tonnerre, a transporté 12 malades de la Corse vers le continent. (Avec Antony Paone et John Irish à Paris, édité par Jean-Stéphane Brosse)