Paris (awp/afp) - L'ex-président de la Banque centrale européenne (BCE), Jean-Claude Trichet, juge la situation actuelle "plus vulnérable" qu'avant la crise de 2008 avec l'augmentation de l'endettement mondial, estimant que le "détonateur" pourrait se trouver chez les émergents.

"Le risque d'éclatement de bulle financière au niveau mondial est très sérieux. Je ne dis pas qu'il se matérialisera en 2018 ou en 2019, mais c'est un risque important", a affirmé M. Trichet lors d'une intervention à l'occasion du colloque "Risque pays 2018" organisé par l'assureur-crédit Coface à Paris.

"Au niveau mondial comme dans chacun des grands ensembles de pays, l'explosif est là. Le détonateur n'a pas explosé de lui-même, mais l'explosif est potentiellement là", a-t-il insisté, après avoir signalé l'endettement public et privé comme l'un des principaux risques pour l'économie mondiale.

"Nous avons continué après la crise à nous endetter au même rythme qu'avant", a-t-il souligné. "Si cet indicateur a un sens, alors nous sommes aujourd'hui dans une situation plus vulnérable qu'elle ne l'était en 2007-2008", a-t-il prévenu.

"Au niveau mondial, on peut être encore plus inquiet aujourd'hui qu'on ne l'était avant 2007-2008", a-t-il ajouté. "Avec la crise et après la crise, les pays émergents ont découvert les joies du surendettement et ils ont commencé à s'endetter de manière extrêmement rapide", a-t-il regretté.

"Il est probable que le détonateur sera cette fois-ci plutôt dans le monde émergent, à moins qu'il ne corrige sa trajectoire actuelle, que dans le monde des pays avancés", a affirmé M. Trichet.

Selon lui, plusieurs pays émergents ont connu une augmentation "assez considérable" de leur endettement. "La Chine est un exemple, compte tenu de sa taille et de son influence mondiale. Mais il n'y a pas qu'elle".

Du coup, l'ex-président de la BCE, de 2003 à 2011, a également estimé que les "munitions" des Etats étaient inférieures à celles dont ils disposaient en 2008 face à la crise.

La capacité budgétaire pour réagir est "très limitée" en raison de la croissance de l'endettement public. Quant à la politique monétaire, la politique accommodante actuelle ne laisse pas beaucoup de marge de manoeuvre, a-t-il estimé.

Dans ce contexte, M. Trichet a lancé un appel aux Etats: "Avec les leçons que nous venons de tirer de la crise internationale de 2007-2008 (...), le pire des dangers serait celui de la complaisance à l'égard d'une croissance qui est encourageante", a-t-il dit.

"C'est le moment de faire tout ce qu'il faut (...) pour faire en sorte que l'on renforce la résilience de l'ensemble de nos économies", a-t-il ajouté.

afp/rp