* Les deux principaux suspects sont Britanniques

* "Nous ne céderons jamais au terrorisme", dit Cameron

* La vidéo du meurtre filmée par un passant (Actualisé avec nouvelles arrestations, Obama)

par Guy Faulconbridge et Michael Holden

LONDRES, 23 mai (Reuters) - La police britannique a annoncé jeudi l'arrestation d'un homme et d'une femme, tous deux âgés de 29 ans, soupçonnés d'implication dans le complot qui a conduit à l'assassinat d'un militaire, la veille à Woolwich, dans l'est de Londres.

Les autorités ont par ailleurs établi que les deux hommes accusés du meurtre à l'arme blanche du soldat ayant servi en Afghanistan sont des Britanniques dont l'un au moins est d'origine nigériane, a-t-on appris jeudi de source proche de l'enquête.

L'un des deux hommes, âgé de 28 ans, a été identifié par des proches comme étant Michael Adebolajo, né en Grande-Bretagne. La police a perquisitionné jeudi dans la demeure de sa famille dans un village proche de Lincoln, dans l'est de l'Angleterre, ainsi que dans d'autres maisons de la région.

Le Premier ministre, David Cameron, a précisé que les deux suspects, interpellés après avoir été blessés par la police, étaient connus des services de renseignement et qu'une enquête de routine serait menée pour vérifier si ces services avaient bien fonctionné. Les deux hommes n'étaient jusqu'alors pas jugés dangereux, a-t-on souligné de source gouvernementale.

Les deux suspects interpellés jeudi n'ont pas de lien de parenté avec eux, a-t-on précisé de source policière.

"Il s'agit d'une enquête vaste, complexe, qui évolue rapidement et qui continue à s'élargir. De nombreuses pistes sont suivies par des détectives et l'enquête avance bien", dit la police de Londres dans un communiqué.

Selon la presse, les assassins présumés semblent avoir été élevés dans la religion chrétienne avant de se convertir à l'islam.

Leur acte renforce la thèse des "loups solitaires" qui menaceraient les grandes villes occidentales par des opérations telles que l'attentat du marathon de Boston, commis le mois dernier.

"Nous ne céderons jamais devant la terreur ou le terrorisme quelles qu'en soient les formes", a déclaré jeudi David Cameron, après avoir présidé une réunion de crise dans le cadre du dispositif "Cobra", appliqué en cas de menace sur la sécurité nationale.

"Ce n'est pas seulement une attaque contre la Grande-Bretagne et son mode de vie, c'est aussi une trahison de l'islam et des communautés musulmanes qui donnent tant à notre pays. Rien dans l'islam ne justifie cet acte véritablement affreux", a-t-il ajouté devant le 10 Downing Street, la résidence du chef du gouvernement britannique.

"Les Etats-Unis se tiennent résolument aux côtés du Royaume Uni, notre ami et allié, dans la lutte contre l'extrémisme violent et le terrorisme", dit quant à lui Barack Obama dans un communiqué.

UN "MOUDJAHID"

Anjem Choudary, l'un des chefs religieux musulmans les plus en vue de Grande-Bretagne, responsable d'une organisation interdite, a déclaré qu'Adebolajo était connu pour être un moudjahid, un combattant en arabe.

Au Nigeria, où les autorités luttent dans le nord contre une insurrection islamiste, on dit de source gouvernementale qu'il n'existe aucune preuve de liens entre les deux hommes et des organisations islamistes d'Afrique de l'Ouest.

Mercredi après-midi, près d'une caserne de l'armée à Woolwich, dans le sud-est de la capitale, les deux hommes en voiture ont d'abord percuté le soldat, Lee Rigby, un ancien combattant de l'Afghanistan âgé de 25 ans et père d'un garçon de deux ans.

Membre d'une fanfare, il travaillait à Londres comme recruteur de l'armée. Il n'était pas en uniforme et portait un T-shirt avec l'inscription "Help for heroes", nom d'une association caritative britannique d'aide aux anciens combattants d'Afghanistan et d'Irak.

Munis de couteaux et d'un hachoir, les assaillants l'ont poignardé. Devant la violence de l'agression, certains témoins ont pensé qu'ils voulaient le décapiter.

Une vidéo, prise par un passant avant l'arrivée de la police, montre un homme les mains couvertes de sang et tenant un couteau et un hachoir ensanglantés.

"Nous jurons par Allah le tout-puissant que nous ne cesserons jamais de vous combattre. La seule raison pour laquelle nous faisons ça est parce que des musulmans meurent chaque jour", dit l'homme, selon un enregistrement obtenu par la chaîne de télévision ITV.

"Ce soldat britannique, c'est oeil pour oeil, dent pour dent", ajoute le meurtrier présumé, qui porte un gilet en laine et un jean.

Cette agression est le premier meurtre à mobile apparemment islamiste en Grande-Bretagne depuis les attentats de Londres en juillet 2005. Quatre kamikazes avaient fait exploser des bombes dans les transports en commun, faisant 52 morts et des centaines de blessés.

Selon la police, la victime a été prise à partie par ces deux hommes dans John Wilson Street, près d'une caserne de Woolwich, quartier ayant longtemps abrité une caserne de l'artillerie royale. A son arrivée sur place, la police n'a pu que constater son décès.

D'après certains médias, les agresseurs criaient en arabe "Dieu est le plus grand !" pendant qu'ils poignardaient la victime.

UN ACTE ISOLÉ ?

L'homme sur la vidéo, déclare : "Je demande pardon aux femmes qui ont assisté à cela mais dans nos pays, nos femmes aussi doivent assister à de pareilles choses."

"Vous ne serez jamais en sécurité. Débarrassez-vous de votre gouvernement. Il ne se soucie pas de vous", ajoute cet homme avant de traverser la rue et de s'adresser tranquillement à l'autre agresseur présumé.

Scotland Yard n'a pas établi formellement si les deux agresseurs avaient agi seuls ou s'ils font partie d'une organisation.

Pour Peter Clarke, responsable de l'antiterrorisme lors de l'enquête sur les attentats de 2005, il ne fait pas de doute qu'il s'agit d'un acte isolé.

"Une telle opération ne nécessite pas un financement sophistiqué, ni une préparation et des communications complexes. Elle peut être organisée et effectuée ensuite dans la foulée", a-t-il expliqué à Reuters. (Avec Peter Griffiths, Danielle Rouquié, Pascal Liétout et Jean-Philippe Lefief pour le service français, édité par)