Hier, les places boursières occidentales ont marqué le pas après une semaine particulièrement favorable pour les indices. En Europe, la contraction a été contenue à moins de 1%, un peu partout, tandis qu'aux États-Unis, le S&P500 a failli terminer à l'équilibre, pendant que le Nasdaq 100 reculait de 0,3%. Mais la principale information du jour est venue de la banque centrale américaine, et plus particulièrement d'un discours de son président Jérôme Powell dans l'après-midi. Un discours qui a entraîné une accélération des ventes de bons du trésor américain, provoquant mécaniquement une remontée des rendements obligataires, avec une dette à 10 ans dont la rémunération est passée à 2,33%.

Il faut dire que Jay (le petit nom de Jerome Powell) n'y est pas allé avec le dos de la cuillère en laissant entendre que la Fed doit agir rapidement pour contrer une inflation "beaucoup trop élevée". Concrètement, l'institution est prête à relever ses taux par demi-point plutôt que par quart de point si le besoin s'en fait sentir. Powell a même parlé de "passer à des niveaux plus restrictifs si nécessaire". Je rappelle ici une fois de plus que les périodes de hausse de taux ne sont pas des fatalités pour l'économie et les marchés boursiers, du moins si elles sont correctement menées, et progressives. Ce que les économistes redoutent par-dessus tout, c'est la situation dans laquelle une banque centrale est forcée d'agir dans l'urgence, avec le risque d'abîmer l'équilibre économique au point de provoquer des remous graves et/ou une récession. Et là, vous allez me dire : mais il nous débite toujours le même blabla le gars de la Fed, il assure juste son SAV pour éviter de déstabiliser les marchés financiers. Sauf que maintenant, il transpire un peu, parce qu'il voit bien qu'aucun miracle ne viendra courber l'inflation.

Ce qui est cocasse, c'est que le patron de la Fed tient pour "évident" qu'il faut agir vite, après avoir tenu le discours inverse pendant des mois. "Les erreurs de politique monétaire commises par la Fed ces deux dernières années se sont accumulées au point d'égaler celles des années 1970", écrivait hier un économiste américain de First Trust, qui a du mal à comprendre la "désinvolture" des banquiers centraux. Mais livrons-nous à un exercice mathématique basique : les derniers pointages sur le marché des dérivés montrent que le marché anticipe 7 ou 8 hausses de taux d'un quart de point d'ici la fin de l'année, alors qu'il reste 6 réunions de la Fed. Bien vu, cela signifie qu'il pourrait y avoir une ou deux hausses de taux d'un demi-point. Si le marché a raison, mais il paraît que c'est toujours le cas. Powell et son comité de politique monétaire tiennent-là leur ananké. Peut-être que Jay devrait profiter de sa prochaine conférence de presse pour arrêter de tourner autour du pot en disant "OK, on a été un peu nuls jusqu'ici, mais on va accélérer les choses pour que tout rentre dans l'ordre, parce que nous n'avons pas le choix".

Face à ces remous et à la guerre qui fait toujours rage en Ukraine, les investisseurs en actions affichent un calme olympien qui me laisse circonspect. La semaine passée, théâtre d'un rebond de 6%, a revigoré des marchés actions qui ont désormais effacé les pertes liées à l'invasion russe. Le STOXX Europe 600 cotait 453 points à la veille du 24 février, date du passage de la frontière par les blindés russes. Il est remonté hier à 454,80 points. Quand on voit le bazar ambiant sur les prix, les relations internationales, la politique monétaire et les chaînes d'approvisionnement, on se dit que les investisseurs ont les nerfs solides, ou qu'ils sont toujours animés par le double courant FOMOTINA. C’est-à-dire la peur de rater le train en marche (FOMO, Fear Of Missing Out) combinée à l'absence de meilleure option que les actions (TINA, There Is No Alternative).

Sur le front ukrainien, Joe Biden a peur que Vladimir Poutine utilise des armes chimiques à cause de l'enlisement du conflit. Volodymyr Zelensky s'est de son côté déclaré prêt à évoquer la Crimée et le Donbass avec son homologue russe, mais seulement avec certaines garanties et avec pour préalable un arrêt des hostilités. Les positions des deux camps semblent toujours irréconciliables à ce stade.

Il n'y aura pas d'indicateur macroéconomique majeur aujourd'hui. Dans le reste de l'actualité, les marchés japonais ont le vent en poupe, et à l'ancienne s'il vous plaît : la poursuite de la glissade du yen face au dollar renforce la compétitivité d'une économie japonaise tournée vers l'export. Par ailleurs, la Chine a l'air d'avoir lancé un programme de soutien économique par le biais de la TVA. Un programme qui n'est sans doute pas étranger à la bonne tenue du marché boursier local ce matin. On notera aussi dans un tout autre registre que la SEC américaine a dévoilé hier un projet de règlement concernant la communication de l'impact environnemental des sociétés cotées, avec quelques innovations au niveau de la prise en compte des émissions tierces des fournisseurs et de la standardisation de l'information. Un pas dans la bonne direction, qui devra encore franchir plusieurs écueils et échapper au greenwashing ambiant. En finance, la politique environnementale est encore plus en retard que la politique monétaire.

Le CAC40 ouvre stable à 6588 points.

Les temps forts économiques du jour

L'indice manufacturier de la Fed de Richmond sera publié à 15h00. Quelque mots sur cet indicateur, compilé depuis 1993. Il est issu d'un questionnaire envoyé aux entreprises manufacturières du cinquième district de la Réserve fédérale (soit Washington DC, le Maryland, la Caroline du Nord, la Caroline du Sud, la Virginie et la majeure partie de la Virginie occidentale), sur les expéditions, les stocks, la demande, les salaires, l'utilisation des capacités, etc. L'indicateur est double et comprend une composante de court terme qui mesure la différence par rapport aux réponses du mois précédent et une composante moyen terme qui mesure les anticipations à six mois. Dans l'échelles des indicateurs américains, il figure plutôt dans la catégorie des statistiques d'importance modérée. Tout l'agenda macro ici.

L'euro recule à 1,09858 USD. L'once d'or remonte légèrement à 1934 USD. Le pétrole a repris son ascension, avec un Brent de Mer du Nord à 118,7 USD et un brut léger américain WTI à 112,7 USD. Le rendement de la dette américaine monte à 2,33% sur 10 ans, pendant que la dette allemande offre un coupon de 0,46% sur la même durée. Le bitcoin se négocie autour de 43 000 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • AT&S : Jefferies démarre le suivi à l'achat en visant 78 EUR.
  • Bechtle : Stifel passe de conserver à acheter en visant 62 EUR.
  • Bénéteau : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 18 à 19 EUR.
  • Big Yellow : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 1140 à 1500 GBp.
  • Diploma : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 2500 GBp.
  • Enel : Exane BNP Paribas passe de neutre à surperformance en visant 6,90 EUR.
  • GFT Technologies : Berenberg démarre le suivi à conserver en visant 49 EUR.
  • Lancashire : Jefferies démarre le suivi à l'achat en visant 500 GBp.
  • Moncler : Goldman Sachs passe de vendre à neutre en visant 62 EUR.
  • MR Bricolage : Midcap Partners reste à l'achat avec un objectif réduit de 19 à 16 EUR.
  • OCI : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 33 à 40 EUR.
  • Palfinger : Hauck & Aufhaeuser passe d'achat à conserver en visant 29,80 EUR.
  • Ryanair : Bernstein passe de neutre à surperformance en visant 16,80 EUR.
  • Siemens Energy : DZ Bank reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 24 à 27 EUR.
  • Sinch : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 140 SEK.
  • Streamwide : Midcap Partners reste à l'achat avec un objectif réduit de 40 à 37 EUR.
  • Tecan : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 551 à 467 CHF.
  • The Swatch Group : Goldman Sachs réduit son objectif de cours de 430 à 350 CHF.
  • Zignago Vetro : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 19 à 16,50 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Air Liquide vise une amélioration de sa marge opérationnelle de plus de 160 pbs sur 4 ans.
  • BNP Paribas suspend tout nouveau financement en Russie.
  • Vinci Concessions et ses partenaires signent avec les autorités grecques un contrat pour l'extension de la concession de l'autoroute Athènes-Corinthe-Patras.
  • Orange et Publicis créent Voila JV pour la numérisation des événements.
  • SES S.A. va racheter l'américain DRS Global Enterprise Solutions pour 450 M$.
  • S&P réduit la perspective du groupe Casino à négative à cause de ses mauvaises performances financières.
  • Orpea souffre après de nouvelles révélations du Monde, notamment sur des anomalies financières. La société nie privilégier le profit.
  • Ipsos va prendre 20% du bolivien Ciesmori.
  • OSE Immuno obtient un brevet pour OSE-279 aux Etats-Unis.
  • Spineguard obtient un brevet aux Etats-Unis.
  • Aqualabo et Kerlink collaborent sur un démonstrateur d'un système LoRaWAN complet pour surveiller la qualité de l'eau de mer à l'île Maurice.
  • Hydrogène de France poursuit le développement de ses centrales Renewstable en Asie.
  • Alan Allman Associates rachète la société belge Jidoka.
  • Peugeot Invest, Tikehau, ABC Arbitrage, Groupe Gorgé, Upergy et Streamwide ont publié leurs comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et autres)

  • La Russie interdit Facebook et Instagram (Meta Platforms) pour "extrémisme".
  • Nike rebondit de 5% hors séance après la publication de résultats trimestriels solides.
  • Alibaba va lancer un programme de rachat d'actions de 25 Mds$, représentant 8,9% de la capitalisation actuelle.
  • Shell repense le retrait du champ pétrolifère de Cambo face à la flambée des prix du pétrole brut.
  • GlaxoSmithKlineémet 8,75 Mds$ d'obligations en vue de la scission de sa branche grand public.
  • Nokian Renkaat choisit de rester en Russie pour conserver le contrôle de son usine.
  • Fortum conclut un accord de 1,1 Md$ pour vendre son activité de chauffage à Oslo.
  • Partners Group dépasse les prévisions du consensus AWP, notamment avec un bénéfice net en hausse de 90% à 1,46 MdCHF en 2021.
  • Switch étudierait des options stratégiques et une vente potentielle, selon des informations de Bloomberg.
  • Volkswagen s'approvisionnera en acier à faible teneur en carbone auprès de Salzgitter pour ses projets futurs.
  • BASF s'associe à Zhejiang REEF pour améliorer les matériaux de recyclage des plastiques.
  • Les autorités antitrust américaines demandent plus d'informations à Activision et Microsoft.
  • Prologis envisage de faire une offre informelle à 21 Mds€ sur Mileway (détenu par Blackstone), selon le Financial Times.
  • Orphazyme va retirer ses American Depositary Shares de la cote du Nasdaq.
  • China Evergrande Group, China Evergrande New Energy Vehicle et Evergrande Property Services repoussent la publication de leurs résultats.
  • Les principales publications du jour : Adobe, Xiaomi, Anta Sports, Partners Group, Iliad, Nemetschek, Kingfisher, VirbacTout l'agenda ici.

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