On va commencer ce matin par parler un peu de complaisance, sans bouder notre plaisir face à une belle reprise des marchés actions. La complaisance, c'est ce qui aboutit à créer des bulles sur les actifs. Un mélange de peur de rater la bonne occasion, de panurgisme et de paresse intellectuelle. Elle revient au galop dès que l'appétit pour le risque grandit et c'est elle qui contribue à créer les déséquilibres qui provoqueront les prochaines chutes. Bref, la vitesse à laquelle les marchés investisseurs reviennent dans les contrées spéculatives en ce moment est stupéfiante. Le Nasdaq 100 a repris 22,6% par rapport à son plancher du mois d'octobre, ce qui signifie qu'il répond à la définition technique d'un "marché haussier", un événement qui sans être rare n'est pas si fréquent. L'indice technologique en est à 17% de hausse depuis le 1er janvier, après avoir bondi à nouveau de 3,5% hier. En Europe, même schéma avec des indices majeurs en vive hausse : 2,1% pour le DAX et 1,3% pour le CAC40 par exemple.

Le principe même du redressement n'est pas illogique au vu du scénario qui est en train de se dessiner, mais son ampleur pose question. Dans l'esprit des investisseurs, le principal écueil qui se dressait devant la reprise des marchés actions était la banque centrale américaine et sa politique monétaire restrictive. Le contexte macroéconomique sous-jacent arrivait en seconde position, assez loin derrière. Parlons un peu des deux.

La Fed a donné l'impression mercredi d'avoir manqué son exercice de communication. Quand elle a dit gris, le marché a entendu blanc. Et quand elle a dit noir, le marché n'a pas écouté du tout. En d'autres termes, il a enterré le fameux adage "Don't Fight the Fed", qui signifie grosso modo que parier contre la politique monétaire américaine est une entreprise vouée à l'échec. J'entends les plus cyniques souligner que c'est peut-être la Fed elle-même qui a offert un enterrement de première classe à sa crédibilité. Tout cela est une affaire de nuances, parfois de coupage de cheveux en quatre vu de l'extérieur, mais c'est quand même ce qui dirige le monde financier. Sur ce premier point, les investisseurs ont perçu que la fin des hausses de taux est imminente et ils ont l'air confiants sur le fait que ces taux ne resteront pas élevés à moyen terme.

C'est sur le second point, le contexte macroéconomique, qu'il devrait y avoir plus de débats dans les semaines à venir. Dans la nuit, Apple, Amazon et Alphabet ont toutes publié des résultats inférieurs aux attentes. Les trois titres reculent d'ailleurs hors séance, même s'ils avaient bien profité de la séance exubérante de la veille, qui a vu leur comparse Meta Platforms terminer en hausse de 23%. Les remous dans les performances trimestrielles des stars de la technologie – Meta étant l'exception - sont le signe que la courroie de transmission de la politique monétaire restrictive de la Fed a commencé à produire des effets sur l'économie, même les pans réputés les mieux protégés. C'est plutôt logique, mais cela va conduire les analystes, qui tardent généralement à réviser leurs anticipations, à rectifier le tir lors de cette saison des trimestriels. C'est un point de vigilance, même si le moteur des semaines à venir reste clairement la dynamique de la politique monétaire.

Dans le reste de l'actualité, le redressement de l'économie chinoise a été confirmé par la publication d'un indicateur PMI Caixin des services de retour en zone d'expansion, sur une dynamique plus forte que ne le prévoyaient les économistes. Impossible de faire l'impasse sur la débâcle de l'empire Adani à la bourse de Bombay, avec le titre de la holding de tête Adani Enterprises qui s'effondre encore de plus de 25% aujourd'hui. Cette crise provoque des remous jusqu'au sein du parlement indien et jette un voile de suspicion sur d'autres entreprises phares du pays. Le plongeon a pour origine la publication, le 24 janvier, d'un rapport à charge du vendeur à découvert Hindenburg Research. J'imagine que la firme américaine ne pouvait même pas imaginer elle-même que cette publication prendrait une telle résonance.

Nous n'en avons pas fini avec les publications d'entreprises, encore très nombreuses depuis hier soir aux Etats-Unis, en Europe et en Asie. Ni avec les statistiques macroéconomiques, en particulier aux Etats-Unis où seront publiés les chiffres de l'emploi du mois de janvier. Les dernières données sont toujours allées dans le sens du scénario "ciel bleu" des investisseurs, c’est-à-dire celui d'une économie qui ralentit mais pas trop, permettant à la Fed de mettre fin à son cycle de resserrement monétaire sans avoir provoqué trop de dégâts. Nous verrons si cette tendance continue, auquel cas, tout serait au mieux dans le meilleur des mondes possibles dans l'esprit des financiers.

Les marchés ronronnent toujours correctement au Japon (+0,4%), en Corée du Sud (+0,5%) et en Australie (+0,6%) pour terminer la semaine. La Chine fait la moue en revanche, aussi bien à Shanghai (-0,6%) qu'à Hong Kong (-1,5%), avec cette capacité à naviguer parfois à contre-tendance du sentiment général. Les marchés européens sont attendus en baisse modérée, malgré les chiffres fadasses du trio technologique américain la nuit dernière. Le CAC40 perdait 0,4% à 7136 points à l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

La seconde lecture des indices PMI des services des grandes économies en janvier permettront de patienter jusqu'à la principale statistique du jour, l'emploi aux Etats-Unis en janvier (14h30). Il faudra aussi garder un œil sur l'ISM des services à 16h00. Tout l'agenda ici. Cette nuit, l'indice PMI Caixin des services en Chine en janvier est remonté à 52,9 points, bien plus que prévu.

L'euro a reculé à 1,0897 USD. L'once d'or aussi, à 1915 USD. Le pétrole reste sous pression, avec un Brent de Mer du Nord à 81,94 USD le baril et un brut léger américain WTI à 75,82 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans baisse encore à 3,37%. Le bitcoin est remonté autour de 23 500 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Alfa Laval : Citigroup reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 360 à 410 SEK.
  • Asos : Deutsche Bank passe d'acheter à conserver en visant 950 GBp.
  • Bakkavor : HSBC passe de conserver à alléger en visant 100 GBp.
  • Cargotec : Inderes passe d'alléger à accumuler en visant 50 EUR.
  • Dassault Systèmes : Jefferies reste à sousperformance avec un objectif de cours relevé de 28 à 33 EUR.
  • Hapag-Lloyd : Stifel passe de conserver à vendre en visant 175 EUR.
  • Julius Bär : CFRA reste à l'achat fort avec un objectif de cours relevé de 65 à 75 CHF.
  • Kesko : Inderes passe d'accumuler à alléger en visant 21,50 EUR.
  • Kuehne + Nagel : Stifel passe d'acheter à conserver en visant 238 CHF.
  • Melexis : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 90 à 100 EUR.
  • Pirelli : Morgan Stanley passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 5,50 EUR.
  • Publicis : Barclays passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 85 EUR.
  • Rockwool : Barclays passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 2600 DKK.
  • Vastned : Oddo BHF passe de sousperformance à neutre en visant 22 EUR.
  • Vidrala : Jefferies reste à sousperformance avec un objectif de cours relevé de 59 à 74 EUR.
  • Wereldhave : Oddo BHF passe de neutre à surperformance en visant 17 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Sanofi : le bénéfice net est en hausse de 8% à 6,72 Mds€ en 2022, dont 17,1% pour le BNPA. La croissance du bénéfice net par action devrait ralentir nettement cette année.

Annonces importantes (et moins importantes)

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Alphabet : l'action perd 4,6% hors séance après ses trimestriels.
  • Amazon : le titre est en baisse de 5% hors séance après l'annonce des derniers résultats.
  • Apple : baisse là aussi, de 3%, pour le titre après les résultats trimestriels.
  • Assa Abloy : affiche une hausse de 22% de son bénéfice net attribuable pour 2022.
  • CaixaBank : le bénéfice est en hausse de 30% en 2022 à base comparable.
  • Ford : le titre chute de 6% hors séance après des résultats trimestriels décevants.
  • Qualcomm : l'action perd 3% post-clôture à Wall Street après la publication du T4.
  • Starbucks : les résultats sont inférieurs aux prévisions. Le titre perd 2% hors séance.

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures