par Patrick Vignal

PARIS, 8 décembre (Reuters) - La réponse à apporter au creusement des inégalités entraîné notamment par les effets sur l'emploi et le tissu social des progrès technologiques sera l'un des défis majeurs de l'année 2021 et des suivantes, dit-on chez Saxo Bank.

"Nous entrons dans une période qui va entraîner beaucoup de disruption et de changements, rendant nécessaires des choix de société", dit à Reuters Christopher Dembik, responsable de la recherche macroéconomique pour la banque danoise, qui publie mardi ses 10 "prévisions choc" pour l'année prochaine.

"L'année 2020 a été très perturbante et a entraîné la nécessité de réfléchir davantage que les autres années mais les deux dernières années, il y avait déjà eu pas mal d'événements qui nous avaient un peu surpris", ajoute-t-il.

Parmi les scénarios retenus par Saxo Bank, improbables dans l'immédiat mais imprégnés des évolutions structurelles en cours, figure celui d'une refonte majeure de la pensée politique, caractérisée par l'avènement d'une nouvelle approche visant à réduire les inégalités, avec notamment la création d'un "fonds technologique citoyen" faisant de chaque citoyen un investisseur.

"On appelle ce scénario de nos voeux et on pense qu'il n'est pas totalement utopique", dit Christopher Dembik.

"Si on devait définir le risque majeur des 5-10 prochaines années, pour nous, du point de vue économique, ce serait une crise des inégalités, qu'elles soient réelles ou perçues".

"On considère qu'il y a la nécessité d'apporter des réponses et ce fonds technologique peut-être une réponse intéressante, moins problématique finalement qu'un revenu de base ou que la monnaie hélicoptère."

LE YUAN NUMÉRIQUE FAIT DES SIENNES

Un autre scénario imagine une crise des banques de nature systémique après une vague de faillites conduisant la France, confrontée à des finances dégradées et à une dette publique colossale, à se tourner vers l'Allemagne afin de convaincre la Banque centrale européenne d'injecter suffisamment de liquidités pour renflouer massivement le système bancaire et éviter un effondrement.

"On a évité une crise de liquidité mais le risque de solvabilité reste bien présent", commente Christopher Dembik. "On aura davantage de visibilité en 2021 sur l'ampleur des faillites d'entreprises à attendre. L'impact sur le bilan des banques de l'augmentation des prêts non performants est à mon avis très sous-estimé."

L'une des prévisions les moins invraisembables envisage un mouvement tectonique des flux de capitaux provoqué par l'introduction par la Chine d'une version numérique du yuan.

"Nous nous sommes basés sur un élément nouveau par rapport aux crises précédentes qui est l'augmentation des flux entrants de capitaux étrangers sur les marchés actions et obligataire chinois", explique Christopher Dembik.

La technologie n'est pas oubliée avec notamment la vision d'un réacteur révolutionnaire propulsant grâce à la fusion nucléaire l'humanité vers l'abondance énergétique.

"On essaye de voir les grandes tendances de fond et d'y apporter des réponses qui peuvent paraître un peu utopiques mais qui devraient participer au débat public", résume l'économiste de Saxo Bank.

"Nos "prévisions choc", finalement, ne sont pas si "choc" que cela."

(édité par Blandine Hénault)