* Une défaite historique pour le parti de droite

* Un résultat "pas à la hauteur" des espoirs, dit Wauquiez

* Retailleau lance un appel aux cadres (Actualisé avec Gérard Larcher, §§ 12-13)

par Simon Carraud

PARIS, 26 mai (Reuters) - Les Républicains (LR) ont vécu un dimanche noir, promettant des lendemains chaotiques à Laurent Wauquiez, lui qui voyait pourtant les élections européennes comme la première étape de la refondation de la droite.

La liste conduite par François-Xavier Bellamy, le candidat qu'il a imposé à des cadres pour la plupart sceptiques, a recueilli entre 8% et 9% des voix selon les premières estimations des instituts de sondage.

C'est un score historiquement faible pour ce parti autrefois hégémonique à droite, à comparer avec les 20,81% enregistrés en 2014, les 27,88% de 2009 et, plus loin, les 12,82% obtenus par Nicolas Sarkozy en 1999, la défaite la plus cuisante aux européennes jusqu'à ce dimanche.

La formation, héritière du RPR de Jacques Chirac, a encore perdu des plumes par rapport aux 20,01% récoltés par François Fillon au premier tour de la présidentielle, un résultat qu'il l'avait déjà ébranlée comme jamais auparavant.

"Nous n'avons pas pu faire entendre notre voix et ce résultat n'est évidement pas à la hauteur des espoirs soulevés dans cette campagne", a admis Laurent Wauquiez lors de sa première déclaration post-résultats.

Ces dernières semaines, la direction avait retrouvé un peu d'espoir, nourri par des sondages moins calamiteux qu'en début de campagne, les images de rassemblement offertes par les rivaux de Laurent Wauquiez et la ferveur mesurée dans les meetings.

"Il restera de cette campagne des acquis, faire émerger des nouveaux talents, la nécessité, si la droite veut avoir un avenir, de faire cesser les divisions, la certitude que la droite et le centre peuvent s'unir autour de convictions fortes", a encore dit le président de LR.

Sans le formuler clairement, il a laissé entendre qu'il souhaitait conserver sa place, en évoquant les trois années à venir, jusqu'à la prochaine présidentielle, pour "proposer une nouvelle voie" et "faire naître de l'espoir".

Le mandat que lui ont confié les adhérents en décembre 2017, avec une majorité confortable de trois quarts des suffrages, court théoriquement jusqu'en 2022.

"SE RÉINVENTER POUR NE PAS DISPARAÎTRE"

Mais le score de dimanche risque de réveiller les vieilles rivalités à droite, qui s'étaient temporairement tues le temps de la campagne, Valérie Pécresse ou Bruno Retailleau faisant bloc autour de François-Xavier Bellamy.

Le président du Sénat, Gérard Larcher, a appelé à une "remise en question profonde".

"Notre mouvement devra repenser sa ligne politique, il devra rassembler plus largement. Il devra exprimer plus clairement la diversité des sensibilités qui le compose", a averti l'élu francilien, qui avait ouvertement critiqué le choix du conservateur François-Xavier Bellamy en janvier, avant de se ranger derrière lui durant la campagne.

Dans un registre proche, Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, a lancé un "appel à toutes les personnalités" de son camp, jusqu'à Xavier Bertrand, lequel a rendu sa carte dans la foulée de l'intronisation de Laurent Wauquiez, trop droitier à son goût.

"Je pense que très vite, il faut qu'on se voie et que, enfin on puisse refonder, enfin on puisse reconstruire", a-t-il déclaré sur le plateau de France 2.

Il a toutefois éludé la question de l'avenir de Laurent Wauquiez, refusant d'"individualiser" les résultats.

"Je pense que les choses sont beaucoup plus graves que cela", a-t-il justifié. "On doit se rassembler, on doit se réinventer pour ne pas disparaître."

Les figures de LR, y compris parmi les soutiens les plus solides de Laurent Wauquiez, se sont toutes retrouvées sur ce diagnostic d'une crise plus profonde encore qu'ils ne l'avaient imaginé. Pour Nadine Morano, qui s'est exprimée sur TF1, il faudra "tirer les conséquences" de la déroute.

"Nous devons tout refonder", a pour sa part jugé, sur Twitter, Guillaume Peltier, premier vice-président de LR, sans dire ce qu'il fallait entendre par là.

Un message auquel François-Xavier Bellamy, professeur de philosophie et adjoint au maire de Versailles (Yvelines), a lui-même fait écho : "Tout est à reconstruire."

Le parti, toujours pas remis de sa déconfiture de 2017, devra notamment trouver le moyen de desserrer enfin l'étau entre le Rassemblement national et La République en marche, arrivés en tête des européennes après une campagne qu'ils ont dominée.

"L'électorat de droite est pris par Emmanuel Macron et le Rassemblement national", estime Frédéric Dabi, directeur général adjoint de l'Ifop, joint par Reuters. "Malgré un bon candidat et une bonne campagne, l'électorat est phagocyté par ces deux camps." (Avec Sophie Louet et Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)