L'administrateur judiciaire a assuré que l'entreprise, dont dépendent quelque 25.000 emplois directs et indirects en Angleterre et au Pays de Galles, allait pouvoir poursuivre ses activités pendant qu'une réflexion était engagée sur son avenir.

"L'entreprise en liquidation poursuit son activité et fournit ses clients pendant que je réfléchis aux options la concernant. Le personnel a été payé et continuera à être employé", a-t-il ajouté.

Le ministre des Entreprises, Greg Clark, a pour sa part déclaré que le gouvernement s'efforcerait d'assurer l'avenir de British Steel dans les semaines à venir, ajoutant qu'il aurait été contraire à la loi de lui consentir un prêt.

Il a indiqué que British Steel était ouvert à de nouveaux repreneurs, tandis que le parti travailliste a appelé le gouvernement à nationaliser British Steel.

Reuters a rapporté mardi que British Steel serait déclaré en faillite s'il n'obtenait pas une rallonge financière de 30 millions de livres (34 millions d'euros) de la part du gouvernement.

"Dans les jours et les semaines à venir, je vais m'atteler (...) sans relâche à explorer toutes les pistes possibles pour garantir l'avenir des activités importantes sur les sites de Scunthorpe, Skinningrove et Teesside", a dit Greg Clark.

LES PRÉCÉDENTS DE GREYBULL

L'entreprise est détenue par la société de capital investissement Greybull Capital, qui a racheté l'entreprise déficitaire à Tata Steel en 2016 pour une livre symbolique. Le groupe emploie directement 5.000 personnes, essentiellement à Scunthorpe, dans le nord de l'Angleterre.

Greybull Capital a déclaré avoir tenté d'assurer la survie de British Steel, mais que les défis posés par la sortie imminente de la Grande-Bretagne de l'Union européenne s'étaient révélés insurmontables.

British Steel a été désigné début mai par la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg comme repreneur d'Ascoval, qui était en redressement judiciaire depuis novembre 2017.

Pour le ministère français des Finances, le placement sous administration judiciaire de British Steel "n'inclut pas l’aciérie de British Steel Saint-Saulve qui est détenue par une autre société du groupe" et la maison-mère du sidérurgiste britannique "a confirmé sa capacité à mener à bien la reprise d’Ascoval et à apporter les fonds nécessaires dans le calendrier prévu."

En France, British Steel détient déjà une usine à Hayange en Moselle, spécialisée dans la fabrication de rails.

"Au vu des événements de ces dernières semaines, il est désormais évident que Greybull doit prendre la seule bonne décision possible : céder la place et laisser ceux qui sont attachés à notre industrie travailler pour sauver l'activité", a réagi dans un communiqué le syndicat britannique Unite.

Ce dernier a exhorté le gouvernement à utiliser toutes les options possibles pour garantir les actifs et rebâtir l'activité, ajoutant que le nettoyage des sites industriels de British Steel pourraient coûter plus d'un milliard de livres aux contribuables.

Ce n'est pas la première fois que Greybull, spécialisé dans le rachat d'entreprises en difficulté, est impliqué dans des liquidations judiciaires. La société était propriétaire de la compagnie aérienne Monarch, qui a fait faillite en 2017.

L'Etat britannique avait alors été contraint de rapatrier les quelque 100.000 touristes coincés par cette faillite, ce qui lui avait coûté 60 millions de livres. Greybull avait également contribué au rachat du distributeur spécialisé dans l'électronique Comet avant que ce dernier ne mette la clé sous la porte en 2012.

UN SECTEUR FRAGMENTÉ

L'annonce du placement en redressement judiciaire de British Steel intervient moins de 10 jours après l'abandon du projet de fusion des activités sidérurgiques de Thyssenkrupp en Europe avec celles de l'indien Tata Steel, un projet qui aurait donner naissance au numéro deux du secteur, derrière ArcelorMittal.

L'abandon de ce projet laisse le secteur sidérurgique européen fragmenté et exposé à des retournements économiques. Cela remet aussi en cause l'avenir de la plus grande aciérie britannique à Port Talbot, au Pays de Galles, qui appartient à Tata Steel.

Les entreprises sidérurgiques britanniques s'acquittent des taxes "vertes" parmi les plus élevées d'Europe et sont également confrontées à d'importants coûts en main-d'oeuvre, en énergie et en logistique, tout en faisant face à des incertitudes sur le Brexit.

Après avoir dégagé un bénéfice en 2017, British Steel a supprimé l'an dernier environ 400 emplois, en raison notamment de la faiblesse de la livre et des incertitudes concernant le calendrier de sortie de la Grande-Bretagne de l'Union européenne qui, selon l'entreprise, a fait fondre son carnet de commandes.

La Haute Cour d'Angleterre et du Pays de Galles a désigné des représentants du cabinet EY pour gérer British Steel parallèlement à la mission menée par l'administrateur judiciaire.

(Avec la contribution de Myriam Rivet à Paris, Bertrand Boucey et Benoît Van Overstraeten pour le service français)

par Maytaal Angel et Costas Pitas