Commençons par une remise à niveau macroéconomique, aussi bien pour vous que pour moi. Dimanche, la Chine a fait état d'un indicateur d'activité PMI manufacturier de retour en zone de contraction en avril, assez en dessous des attentes. Les économistes y voient un avertissement pour la reprise tant attendue du pays, qui semble pénalisé par le ralentissement des exportations. La dynamique dans les services reste forte. Hier, les Etats-Unis affichaient une configuration assez proche, avec un indice ISM manufacturier qui reste lui aussi en zone de contraction. La vigueur des dépenses de construction et des prix industriels américains a toutefois conduit le marché à renforcer son pari d'une hausse de taux de la Fed de 25 points de base cette semaine (la probabilité est de 95,4% ce matin sur l'outil de prévision FedWatch du CME).

Ah oui, parce que c'est la semaine des banques centrales quand même, ne l'oublions pas. Et ça a commencé tambour battant puisqu'au moment où j'écris, la Banque d'Australie vient de relever ses taux de 25 points de base pour les porter à 3,85%. Contre toute attente puisque les économistes pariaient sur un statu quo. La RBA précise qu'elle a besoin de ça pour contenir l'inflation. Les faucons sont donc de sortie (on oppose les tenants d'une politique monétaire dure, les faucons, aux colombes, qui sont partisans d'une politique plus souple). Demain soir, c'est la banque centrale américaine qui rendra son verdict. Comme précisé plus haut, le marché a parfaitement intégré qu'un nouveau tour de vis est en vue. La Fed pense qu'elle a encore un peu de pain sur la planche pour parvenir à un équilibre satisfaisant entre jugulation de l'inflation et dégonflement de la dynamique économique. Les investisseurs espèrent surtout que Jerome Powell et son équipe annonceront une pause après cela, en tenant compte des remous qui continuent dans le secteur bancaire et dont je vais parler juste après, non sans avoir refermé ce volet macro sur la troisième banque centrale de la semaine, la BCE, qui doit, elle aussi selon les pronostics, relever ses taux d'un quart de point jeudi.

Mais ce qui a une fois encore agité le secteur financier ce weekend, c'est la fin de l'agonie de la banque américaine First Republic. Embarqué dans la spirale perte de confiance / retraits de fonds / chute en bourse / perte de confiance / retrait de fonds, etc., l'établissement a été fermé d'autorité par l'Etat de Californie, avant d'être cédé à JPMorgan Chase, la plus grosse banque américaine. L'organisme américain de garantie des placements, la FDIC, assumera une partie des pertes. A court terme, l'opération supprime un important foyer de tension. Mais elle soulève naturellement pas mal d'autres questions, au premier rang desquelles : après la mort de Silvergate, de SVB Financial, de Signature Bank et de First Republic, qui sera la prochaine ? Les autorités américaines répondent "personne", mais le marché est un poil plus sceptique, comme le montrent les baisses d'autres acteurs bancaires hier, dont Citizens Financial, PNC Financial ou Keycorp, qui ont cédé 5 à 6%. La culture du sauvetage orchestré par les autorités est probablement l'un des biais les plus importants inoculé par la crise financière dans le cerveau des investisseurs. On comprend dès lors pourquoi les mots des banques centrales sont devenus parole d'évangile.

Dans le reste de l'actualité, les marchés actions japonais terminent leur semaine ce matin avant les trois jours fériés traditionnels de la semaine d'or ("golden week"). Aux Etats-Unis en dehors des débats sur les sauvetages bancaires et la décision de la Fed, c'est le bras de fer politique récurrent autour du plafond de la dette qui domine. La secrétaire du trésor Janet Yellen estime qu'il faut craindre une impasse dès le 1er juin si aucun accord n'intervient entre Démocrates et Républicains. Joe Biden a demandé aux chefs de file du Congrès de se réunir le 9 mai pour évoquer une sortie de crise. Dette toujours, l'agence de notation Fitch a abaissé la note crédit de la France de "AA" à "AA-", en estimant que le contexte social explosif pèse sur la réduction des dépenses publiques.

Les publications de résultats d'entreprises continuent. Cette semaine, place à Apple, Airbus, Porsche, Novo Nordisk ou Shell. Ce matin, HSBC et BP Plc sont sur le pont, avant Pfizer et Advanced Micro Devices aux Etats-Unis plus tard dans la journée. Dans son bilan hebdomadaire traditionnel, FactSet indique que la moitié des entreprises du S&P500 ont déjà publié, avec des bénéfices en moyenne en retrait de 3,7% sur un an. Les résultats baissent mais ils sont supérieurs aux attentes des analystes. Donc en absolu c'est médiocre, mais en relatif c'est bon. Les investisseurs réagissent généralement sur le relatif puisqu'ils se basent sur les estimations des analystes.

Le Nikkei 225 a clôturé en hausse de 0,21% ce matin au Japon. Dans le même temps, le Hang Seng grappillait 0,2% à Hong Kong. Les hausses de l'Inde et de la Corée étaient plus solides, autour de 0,6%. L'Australie en revanche a perdu plus de 1,1%, grevée par ses valeurs de l'énergie, de l'immobilier et des matériaux de base. C'est la première variation de plus de 1% pour l'ASX200 sur les 14 dernières séances. La bourse de Shanghai est close depuis le weekend pour la fête du travail chinoise. Elle rouvrira demain. Les indicateurs avancés européens sont indécis. Le CAC40 perdait finalement 0,4% à 7462 points à l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

Plein d'indicateurs d'activité manufacturière aujourd'hui. Ce sont les lectures affinées des données publiées il y a dix jours pour les principales économies. Plus intéressant, il y aura la première estimation de l'inflation dans la zone euro en avril (11h00) et l'enquête JOLTS sur les ouvertures de postes aux Etats-Unis (16h00). Tout l'agenda ici.

L'euro a reculé à 1,0985 USD. L'once d'or revient à 1981 USD. Le pétrole se redresse un peu, avec un Brent de Mer du Nord à 79,33 USD le baril et un brut léger américain WTI à 75,70 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans est remonté à 3,55%. Le bitcoin baisse à 28 050 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Air Liquide : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 150 à 165 EUR.
  • Amadeus : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 67 à 73 EUR.
  • Essity : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 276 à 340 SEK.
  • Ferrari : Barclays démarre le suivi à pondération en ligne en visant 274,73 USD.
  • Kitron : Arctic Securities passe de conserver à acheter en visant 52 NOK.
  • Logitech : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 50 CHF.
  • Mercedes : BRC reste à surpondérer avec un objectif de cours relevé de 90 à 92 EUR.
  • QT Group : Inderes passe d'accumuler à alléger en visant 78 EUR.
  • Rémy Cointreau : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 200 à 190 EUR.
  • Rightmove : HSBC passe de conserver à acheter en visant 645 GBp.
  • Royal Unibrew : Jyske Bank passe d'acheter à conserver en visant 650 DKK.
  • Sanofi : Deutsche Bank passe de conserver à vendre en visant 90 EUR.
  • SGL Carbon : Deutsche Bank passe de conserver à acheter en visant 13 EUR.
  • SGS : RBC passe de performance de marché à surperformance en visant 90 CHF.
  • Stora Enso : J.P. Morgan passe de neutre à surpondérer en visant 12,60 EUR.
  • Tomra : ABG passe de vendre à conserver en visant 160 NOK.
  • Umicore : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 32 à 30 EUR.
  • UPM : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 39,25 à 36,25 EUR.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Les immatriculations de voitures neuves en France en hausse de 21,88% en avril, selon la PFA.
  • Airbus, Safran et Tikehau finalisent l’acquisition d'Aubert & Duval.
  • Le directeur général de TotalEnergies explique aux investisseurs que la cotation européenne est responsable de la décote du groupe pétrolier, mais exclut de traverser l'Atlantique. Par ailleurs, ADNOC Gas a annoncé lundi un accord d'au moins un milliard de dollars sur trois ans avec le Français pour l'approvisionner en gaz naturel liquéfié.
  • Stellantis et Alliance Nickel concluent un accord d'achat de sulfate de nickel et de sulfate de cobalt.
  • Saint-Gobain a finalisé l'acquisition de l'indien UP Twiga Fiber Glass.
  • Un braquage express a eu lieu samedi place Vendôme dans une bijouterie Bulgari (LVMH), où plusieurs millions d'euros de bijoux auraient été dérobés.
  • Eurazeo et Montefiore, premiers actionnaires de Groupe Premium, n'ont pas reçu d'offres à la hauteur de leurs ambitions, selon Les Echos.
  • McPhy annonce le retard du projet CEOG à cause de la suspension du contrat par Siemens Energy, fournisseur de l'électrolyseur. La suspension est indépendante de la volonté de McPhy et n’est pas liée à l’exécution du contrat par la société, mais on ne sait pas pourquoi la clause de suspension a été activée.
  • SES annonce le lancement de deux nouveaux satellites O3b mPOWER.
  • Osmozis a levé 7 M€ à 10,25 EUR l'action.
  • Teva annonce l'approbation par la FDA américaine de UZEDY (risperidone), un antipsychotique sous forme de suspension injectable sous-cutanée à libération prolongée pour le traitement de la schizophrénie chez l'adulte. Le système de contrôle de délivrance est fourni par MedinCell.
  • Lysogène repousse la publication de ses comptes, alors que l'action est suspendue en attendant le verdict du tribunal de commerce.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Imerys, Neoen, AB Science, Mastrad, Erold, Ikonisys, Foncière Volta, Metadvertise, Cybergun, Vergnet, Mare Nostrum, Methanor, Coil, Crosswood, NSE, Theraclion

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Geberit : le chiffre d'affaires de 893 MCHF est en recul de 8,9% au T1, mais l'Ebitda ne se contracte que de 2,5% à 296 MCHF.
  • HSBC : le bénéfice trimestriel avant impôts est plus élevé que prévu, à 12,9 Mds$. Le groupe va racheter jusqu'à 2 Mds$ de ses propres actions.
  • Logitech : le chiffre d'affaires du T4 fiscal recule de 22% à 960 M$.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • First Republic saisie par les autorités et rachetée par JPMorgan Chase.
  • Astellas s'offre IVERIC Bio pour 5,9 Mds$.
  • Le chinois Midea aurait approché Electrolux en vue d'une acquisition, selon Bloomberg.
  • IBM devrait suspendre ses recrutements alors que quelque 7 800 emplois pourraient à terme être remplacés par l'intelligence artificielle, selon le CEO du groupe informatique à Bloomberg.
  • Axon va remplacer First Republic dans le S&P 500.
  • Le spécialiste du soutien éducatif Chegg s'effondre en bourse à cause de la concurrence des IA de dialogue.
  • UBS envisage une scission de la partie suisse de Crédit Suisse, selon NZZ.
  • Adidas veut mettre les bouchées doubles sur le marché US.
  • Repsol rachète la part de Sinopec dans leur société commune britannique.
  • Vanessa Hudson, cadre de longue date de Qantas, nommée au poste de PDG.
  • Morgan Stanley va supprimer 3 000 emplois au deuxième trimestre, selon Reuters.
  • Sanlorenzo annonce l'acquisition d'une participation majoritaire dans Duerre.
  • Arm, contrôlé par Softbank, dépose une demande d'IPO à New York.
  • BlackBerry va procéder à l'examen d'alternatives stratégiques pour ses activités, y compris la séparation éventuelle d'une ou de plusieurs de ses activités.
  • BP PLC accepte d'acquérir la participation de Shell dans le projet gazier Browse en Australie.
  • Petrofac remporte un contrat EPC pour la modernisation d'une raffinerie en Lituanie.
  • Glanbia vend pour 178,9 M€ d'actifs dans le secteur de la mozzarella.
  • AstraZeneca "déçu" par les recommandations de l'ODAC sur Lynparza.
  • Les principales publications du jour : Pfizer, HSBC, Advanced Micro Devices, BP PLC, Starbucks, Marriott, Unicredit, Royal DSM, Geberit, Davide Campari, Traton, LogitechTout l'agenda ici.

Lectures