Déjà au moins 170 morts et 7700 cas déclarés. C’est plus que le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) des années 2002/2003 (5327 malades). Ces chiffres pourraient même être en-dessous de la réalité et minimiser l’ampleur de l’épidémie de pneumonie liée à une nouvelle forme de Coronavirus, dont la ville de Wuhan en est l’épicentre. Des dizaines de millions d’habitants sont déjà en quarantaine dans la région et les autorités sanitaires internationales ont été mobilisées. Plusieurs compagnies aériennes ont suspendu leurs vols vers la Chine continentale et l'OMS a décrété l'urgence internationale. D’après le Financial Times, les officiels chinois redoutent un choc sur le secteur manufacturier, et plus généralement sur la croissance du premier trimestre alors que le géant asiatique célèbre son Nouvel An cette semaine.

En Australie, après les tensions commerciales et les incendies, l’épidémie du voisin chinois menace désormais sérieusement la croissance de l’île-continent. En attendant, les chiffres de l’emploi, particulièrement scrutés par la banque centrale (RBA), rassurent : 29k embauches en décembre (contre 10k attendu) et un taux de chômage qui se replie contre toute attente à 5.1% (-0.1%).

En Europe, la BCE vient d’annoncer un statu quo logique après le paquet de mesures lancé en septembre. Christine Lagarde s’est une nouvelle fois voulue optimiste, évoquant une stabilisation de l’inflation et des risques conjoncturels « moins prononcés » après l’accord sino-américain sur le commerce. Elle juge en outre « positive » l’avancée de discussions équivalentes entre l’Europe et les Etats-Unis. Paris et Washington viennent en effet de s’entendre sur une trêve dans le cadre du désaccord sur la taxe sur le numérique (taxe GAFA). Emmanuel Macron a accepté de prolonger les discussions jusqu’à la fin de l’année 2020 de façon à éviter les représailles sur les exportations françaises. La patronne de la banque centrale a toutefois échoué à rassurer les cambistes alors que l’institution semble manquer d’idées pour faire évoluer sa stratégie.

Au Royaume-Uni, avec une croissance en berne et une inflation faible d’un côté, un marché du travail vigoureux et une confiance des entreprises en plein essor de l’autre, les investisseurs attendaient la décision de la Banque d’Angleterre avec une certaine impatience. Pour la dernière du président Mark Carney, les argentiers britanniques n’ont finalement pas fait varier leur position par rapport à leur dernière réunion. Deux des neufs membres du Comité préconisent toujours une baisse de taux tandis que la majorité préfère temporiser. A la veille du Brexit, la BoE appuie sa décision sur une embellie de l’activité depuis le début de l’année ainsi que sur le recul des incertitudes liées au divorce entre Londres et Bruxelles.

De l’autre côté de l’Atlantique, la Banque du Canada n’a pas baissé son taux directeur depuis le mois de juillet 2015, tout en le relevant d’un quart de point à cinq reprises depuis lors. L’autorité monétaire prépare désormais le terrain en soignant sa rhétorique. La BoC déplore ainsi une faiblesse « inattendue » de la consommation et de l’investissement. Une ou plusieurs baisses de taux pourraient donc venir soutenir un ralentissement persistant en 2020, de mauvais augure pour le Loonie.

Aux Etats-Unis, malgré les nouvelles pressions de Donald Trump, la FED n’a pas bougé à l’occasion de sa dernière réunion. Une telle décision était largement anticipée par les marchés alors que la confiance des consommateurs américains a enregistré un plus haut depuis août dernier. En conférence de presse, Jerome Powell s’est par ailleurs félicité de l’accord entre Pékin et Washington mais a qualifié le Coronavirus de « problème très sérieux ». Dans la foulée, l’Oncle Sam a révélé un taux de croissance de +2.3% en 2019, le plus faible score depuis 2016 en raison des tensions commerciales.

Enfin au Japon, la banque centrale n’a pas davantage modifié sa politique monétaire mais elle a tout de même révisé en hausse ses prévisions de croissance tout en abaissant légèrement ses projections en matière d’inflation. En tant que valeur refuge, le Yen profite largement des craintes que fait peser le Coronavirus sur la croissance mondiale. Notons cependant l’exposition potentielle de la péninsule nippone à l’épidémie liée à une certaine proximité géographique favorisant le tourisme et le commerce de détail.

Dans les prochains jours, les cambistes s’intéresseront avant tout à l’inflation européenne vendredi, aux indicateurs ISM américains du secteur manufacturier et de celui des services, respectivement lundi et mercredi, et surtout à la décision de politique monétaire de la RBA dans la nuit de lundi et mardi. Le consensus anticipe une baisse d’un quart de point à 0.50%, pourtant le risque d’un ton moins accommodant que prévu, voire d’un statu quo, existe bel et bien puisque celui-ci serait cohérent avec la vigueur du marché du travail tout en compensant la dernière baisse de l’Aussie entamée au début de l’année.

Graphiquement, la monnaie unique, en qui d’aucuns voient parfois une valeur refuge en raison des faibles taux d’intérêts adossés à la devise, décroche bel et bien lorsque l’appétit du risque diminue. Après avoir rallié 1.10, une respiration pourrait toutefois s’imposer et nous restons à l’affût de potentielles ventes sur rebond. Dans l’idéal au contact de 1.1096 et 1.1152.

Plus ou moins condamné à subir le même sort, le cable parvient néanmoins à préserver 1.30 dans le sillage de la décision de la BoE ce jeudi 30 janvier. Si nous sommes plutôt neutres sur la paire, les incertitudes pourraient rapidement revenir sur le devant de la scène au moment où va s’ouvrir la période de transition. Nous conservons donc un attrait plus particulier pour les ventes sur rebond, de préférence au contact de 1.3260 et 1.3473 USD.

De son côté, le Loonie trébuche à son tour et la paire USD/CAD pourrait désormais consolider sous 1.3255 CAD, non sans avoir déjà comblé un gap de cotations datant du 11 décembre. Anticipant des actions de la banque centrale canadienne, nous sommes plutôt pessimistes quant à la vigueur du CAD à moyen terme. Nous privilégions donc logiquement les achats de billets verts, de préférence sur repli à 1.3163 et 1.3067 CAD.

Profitant du climat d’aversion au risque, le Yen se reprend après que le couple USD/JPY a franchi le prix psychologique de 110. Désormais au contact de 108.60, le potentiel de baisse se réduit drastiquement, d’autant que les incertitudes demeurent quant au réel impact du virus chinois sur l’économie mondiale. Nous sommes à nouveau neutres sur la parité.

Quant à l’inénarrable EUR/CHF, la réaction haussière attendue au contact de 1.07 CHF tarde à se dessiner en raison d’un fort attrait pour le Franc en période d’incertitudes et de repli des indices boursiers. Mais l’Euro s’accroche à ce niveau-clé malgré tout et nous restons convaincus que le potentiel de hausse est ici largement dominant. Nous conservons des positions longues dans une optique de long terme.

Enfin,  le Dollar australien décroche la palme de la plus belle dégringolade parmi les devises majeures en 2020. Une accélération baissière qui pourrait provoquer un net rebond technique, en particulier si les prix parviennent à glisser jusqu’à une zone très riche en liquidité, laquelle se matérialise par une grande quantité d’ordres stops placés sous les plus bas niveaux échangés en près de 11 ans (0.6670). La prochaine réunion de la RBA pourrait concrétiser un tel scénario et offrir une belle occasion de passer à l’action. Nous viserions un retour vers 0.6853.