On en parle tellement et le sujet devient tellement anxiogène pour les citoyens qu’un groupe de télécommunications britannique a lancé une chaine d’information garantie sans Brexit (Sky News Brexit-Free). Dans le même temps, Londres et Bruxelles annonçaient avoir trouvé un nouveau terrain d’entente, après l’accord de Theresa May conclu en Novembre dernier et plusieurs fois rejeté par le Parlement. Cependant le nouveau texte qui, même sans filet de sécurité, confère inévitablement un statut particulier à l’Irlande du Nord, semble davantage satisfaire l’UE et le Premier ministre britannique que les députés de sa Majesté. Bis repetita.

Alors entre l’opposition travailliste ou les Libéraux-démocrates qui veulent faire tomber le chef du gouvernement, les indépendantistes de l’Ulster (DUP) qui souhaitent rompre plus nettement avec l’Europe, les Ecossais qui réclament les mêmes privilèges que la province nord-irlandaise et les dissensions au sein même du Parti conservateur, le ras-le-bol général d’outre-Manche pourrait être le meilleur allié de Boris Johnson avant un vote à Westminster, prévu samedi 19 octobre. Et si cette proposition n’est pas adoptée, scénario le plus probable selon les bookmakers, Bruxelles devrait accorder au Royaume-Uni un nouveau report du divorce, jusqu’ici prévu le 31 octobre. Les observateurs auront alors une nouvelle occasion d’analyser l’inéluctable incompatibilité entre les accords de Belfast et l’idée d’unité du Royaume-Uni en dehors de l’UE. Le locataire du 10 Downing street, lui, pourra au moins se targuer de ne pas avoir fait pire que l’équipe dirigeante précédente, même si ce fut par l’obtention à l’arrachée d’un compromis bancal et précipité.

Dans un tel contexte, le reste de l’actualité fut largement relégué au second plan. Sans plus de détails, Donald Trump a toutefois annoncé un accord commercial partiel mais « très important » avec la Chine. Washington a en effet renoncé à un relèvement de 25 à 30% de ses tarifs douaniers, initialement prévu le 15 octobre et portant sur 250 milliards de dollars d’importations chinoises. En échange, Pékin aurait concédé des progrès dans plusieurs secteurs : achats de produits agricoles américains, taux de change, droits de propriété intellectuelle, services financiers ou transfert de technologies notamment.

Sur le plan monétaire, les minutes de la BCE ont confirmé de profondes divisions au sein du Conseil des gouverneurs, essentiellement autour de l’utilité d’un nouveau QE, le compte-rendu créant ainsi une certaine confusion dans les anticipations. Christine Lagarde prendra la succession de Mario Draghi à la tête de l’autorité monétaire dès le mois prochain avec le défi de rassembler ses membres autour d’une ligne commune, laquelle pourrait donc s’avérer moins accommodante qu’actuellement.

Enfin côté macro, les Etats-Unis enregistrent en septembre des ventes au détail en recul d’un mois sur l’autre (-0.3%) mais une hausse des prix à la consommation stable (+1.7% sur un an).

Le regard des cambistes se tournent désormais vers Westminster qui scellera le sort du nouvel accord sur le Brexit dès ce samedi. La semaine prochaine sera pauvre en publication, à l’exception de jeudi où sont attendus les derniers indicateurs PMI européens, particulièrement médiocres le mois dernier, et surtout le communiqué de la BCE qui précèdera la dernière conférence de presse de Mario Draghi.

Graphiquement, l’Euro profite de l’actualité pour rebondir au contact d’un niveau-clé maintes fois évoqué : 1.1143 USD, une très sérieuse opportunité de vente, en particulier tant que ce seuil est préservé en clôture quotidienne.

Mais le mouvement haussier de l’année 2019 est à créditer au profit du Pound qui s’est apprécié de près de 8 figures en une semaine. Encouragé par la perspective d’un Brexit ordonné et un niveau de valorisation proche de ses points bas depuis les années 80, le cable n’a échoué qu’à proximité d’une résistance psychologique (1.30 USD). Le moment est opportun pour encaisser ses profits et se protéger d’un potentiel gap à l’ouverture du marché dimanche. Un rejet de Westminster samedi pourrait sanctionner la devise et contenir les assauts du Sterling à court terme. Dans une logique de gestion du risque, nous sommes à l’écart avant le weekend.

Enfin, le recul général de l’aversion au risque profite à l’Aussie et au Kiwi et pénalise le Yen. Des mouvements contraires aux tendances de fond et à nos convictions fondamentales de plus long terme qui nous offrent en conséquence des opportunités de ventes sous résistance daily. Ainsi, nous sommes baissiers AUD/USD sous 0.6878, NZD/USD sous 06384 et USD/JPY sous 108.80. A un an des élections américaines, nous avons en effet du mal à imaginer Donald Trump, incarnation parfaite du populisme le plus rudimentaire, desserrer la vis du protectionnisme au bénéfice de Pékin ou de la croissance mondiale.