PARIS, 23 juin (Reuters) - Permettre à un enfant d'avoir accès à ses origines : tel est l'un des objectifs du projet de loi de bioéthique, comprenant l'ouverture à toutes les femmes de la procréation médicalement assistée (PMA), défendu par la ministre de la Santé.

Dans un entretien au Journal du dimanche, Agnès Buzyn espère un débat "serein" sur ces questions sensibles, qui font déjà débat jusqu'au sein de la majorité, lors de l'examen du texte prévu fin septembre au Parlement.

"Nous ne souhaitons heurter personne. Je fais confiance aux parlementaires pour que les débats soient sereins et qu'ils nous aident à enrichir le texte", dit-elle.

Alors que le projet de loi est actuellement examiné par le Conseil d'Etat, Agnès Buzyn pose la question de l'établissement d'une filiation, dans le cas d'une PMA, ayant "la même portée et les mêmes effets que la filiation biologique ou adoptive sans bouleverser le droit de la filiation actuel", et qui "reposerait sur une ­reconnaissance de filiation avant la naissance du bébé."

Agnès Buzyn se dit "favorable à l'idée de lever le voile sur l'origine de la filiation pour tous", sans créer de cas particulier pour les couples homosexuels.

Pour ce qui est des dons de sperme et d'ovocyte, Agnès Buzyn explique que "l'anonymat au moment du don sera préservé, mais il s'agit ensuite de permettre à l'enfant d'avoir accès à son histoire et à l'identité de son donneur quand il aura atteint ses 18 ans."

"Ça peut être un accès à des informations non identifiantes sur le donneur voire connaître son identité si le donneur y a consenti soit au moment du don, soit au moment où l'adulte en fait la demande", explique-t-elle.

Elle dit ne pas redouter une chute des dons en sachant que "dans les pays qui ont généralisé cet accès aux origines, les dons ont diminué avant de remonter parce que ce ne sont pas les mêmes personnes qui donnent."

"Les jeunes qui demanderont à connaître l'identité de leur donneur ne prendront pas ce dernier pour un parent. Être parent, ce n'est pas des gamètes mais de l'amour", ajoute Agnès Buzyn.

La ministre confirme que la PMA pour les couples de femmes ou les femmes seules sera remboursée par la Sécurité sociale jusqu'à l'âge de 43 ans, comme pour les couples hétérosexuels.

Le gouvernement entend par ailleurs autoriser la congélation des ovocytes, comme cela se fait en Espagne ou en Belgique.

"Nous allons le faire, de façon très encadrée pour éviter une baisse de la natalité due notamment à l'allongement des études. La conservation des ovocytes pourrait être ouverte à partir de 30 ou 32ans", explique Agnès Buzyn.

Le projet de loi soumis au Conseil d'État ne comprend pas de disposition permettant une PMA post-mortem. "Ça mérite débat, car le projet parental d'une femme célibataire ne peut pas se comparer au projet d'un couple frappé par le deuil", dit la ministre.

Le projet de loi de bioéthique doit être présenté en juillet en conseil des ministres.

Pour prévenir les crispations dans la majorité, le président du groupe LaRem à l'Assemblée, Gilles Le Gendre, vient d'annoncer le lancement d'un groupe de travail animé par les députés Thomas Mesnier, Jean-François Mbaye et Monique Limon.

"J'ai une ambition : que non seulement le groupe mais aussi l'Assemblée nationale soient extrêmement fiers du débat instauré en son sein", a-t-il déclaré mardi lors d'une conférence de presse au Palais-Bourbon. (Elizabeth Pineau, édité par Jean Terzian)