PARIS, 10 décembre (Reuters) - La réforme ultrasensible des retraites ne sera pas retardée malgré la crise des "Gilets jaunes", a annoncé lundi l'équipe du haut-commissaire chargé du dossier, Jean-Paul Delevoye.

"La réforme n’est pas repoussée, on reste dans le calendrier initial, on allège le calendrier pour permettre aux partenaires sociaux de se consacrer à la concertation gouvernementale", indique-t-on au sein de l'équipe du haut-commissaire, chargé de mettre en oeuvre la réforme potentiellement la plus explosive du quinquennat d'Emmanuel Macron.

Le gouvernement prévoit d'uniformiser les 42 régimes de retraites existants et de passer d'un système en annuités, où les actifs cumulent des trimestres, à un système en points, où les actifs cumulent des points tout au long de leur parcours professionnel.

La CFDT, favorable à la réforme, craint que cette dernière ne soit repoussée voire annulée en raison du climat social.

"Ce serait vraiment dommage parce que c'est une réforme dont on a besoin", a dit à Reuters la secrétaire générale adjointe, Marylise Léon.

Force ouvrière, très opposée à la réforme, émet pour sa part des doutes quant à la réaction de la population.

"Les gens sont tellement comprimés et compressés, ils vivent au jour le jour, comment voulez-vous leur expliquer que dans 30 à 40 ans pour les plus jeunes, ils vont 'ramasser' encore plus à la retraite?", a dit à Reuters le secrétaire confédéral de Force ouvrière, Philippe Pihet.

"Mais si le gouvernement décide de retarder la réforme, nous serions favorables", ajoute-t-il.

Les tentatives de réformes successives ont donné lieu à des mouvements sociaux d'ampleur, notamment en 1995 sous Alain Juppé, en 2003 avec François Fillon à la manoeuvre et en 2010 sous Nicolas Sarkozy.

Le haut-commissaire mène en ce moment des concertations sur l'architecture financière du régime et commencera à partir du 17 décembre à discuter des conditions d'ouverture des droits et des carrières longues puis, en janvier, des départs anticipés, du pilotage et des objectifs.

Jean-Paul Delevoye, qui devait au départ remettre ses recommandations en janvier-février, a demandé un délai au gouvernement pour terminer les concertations vers mars-avril, afin d'"approfondir les sujets et de faire les simulations". Sa demande était encore à l'étude.

La présentation du projet de loi aux parlementaires pourrait se faire en juin ou en septembre, ajoute-t-il. La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a proposé vendredi aux partenaires sociaux de les rencontrer au moins deux fois par semaine pour trouver des solutions à la crise des "Gilets jaunes".

Jugeant le calendrier chargé, les organisations syndicales et patronales ont demandé au gouvernement la suspension de la négociation sur l'assurance chômage qui doit aboutir à une nouvelle convention d'ici janvier-février. (Caroline Pailliez, édité par Yves Clarisse)