Louis de Fels, deux fonds microcaps, Gay-Lussac Microcaps et Gay-Lussac Microcaps Europe, figurent parmi notre sélection mensuelle des meilleurs fonds small caps. Quels sont leurs points communs et leurs différences ?
" Les deux fonds, bien que gérés par des équipes différentes, passent par le processus de gestion Gay-Lussac Gestion, strict et différenciant. Celui-ci commence par la définition d’un univers de valeurs répondant favorablement à nos filtres « Faible volatilité, faible beta, momentum » auxquels nous ajoutons des critères ESG. En Europe, seules 200 valeurs passent ce premier filtre, pour finir sur une sélection de 50 valeurs validant des filtres quantitatifs et qualitatifs relativement classiques. La construction et le suivi du portefeuille composé de cette cinquantaine de valeurs (et d’une poche de cash de l’ordre de 10% pour assurer une bonne liquidité) dépend ensuite de l’analyse de la volatilité de chaque valeur et de la corrélation entre leurs performances. Tous deux éligibles au PEA-PME, ces deux fonds microcaps ne se recoupent qu’à 12% et leur différence vient essentiellement de leur exposition géographique puisque Microcaps est investi à 75% en France, contre 24% pour Microcaps Europe. La capitalisation médiane de ce dernier est supérieure, à 600 M€ contre 400 M€ pour le fonds France, mais cela tient au plafond de capitalisation à l’initiation imposée historiquement au fonds France, à savoir 300 M€ contre 500 M€ pour le fonds Europe. A présent, le plafond de 500 M€ s’impose aux deux fonds sachant qu’une fois en portefeuille, la seule limite est la hausse naturelle du beta que l’on constate généralement quand une société est plus connue, plus liquide et qu’elle devient éligible aux ETF. A noter enfin que 85% des sociétés retenues sont familiales et que le fonds France a plutôt décollecté en faveur du fonds Europe."
Comment expliquez-vous la moindre performance des deux fonds sur 1 et 3 ans ?
" Cela tient à la taille des capitalisations boursières en portefeuille, la performance ces dernières années étant directement corrélée à la taille des capitalisations. En France, la remontée du plafond de capitalisation boursière pour être éligible au PEA-PME de 1 milliard à 2 milliards d’euros n’a pas aidé car elle a logiquement généré un transfert progressif des investissements de la part des gérants vers des capitalisations supérieures afin d’améliorer la liquidité des positions. Cela me rappelle l’année 2012, année du « What ever it takes » de Mario Draghi, qui avait précédé une phase de rattrapage de cinq ans pendant laquelle les flux sont venus progressivement sur les plus petites valeurs. "
Qu’est ce qui pourrait déclencher un retour en grâce de ces petites valeurs ?
" Le plan de relance de 500 milliards d’euros annoncé par l’Allemagne suscite beaucoup d’espoirs pour la classe d’actifs. Après des années de récession, c’est un autre « What ever it takes » pour l’Europe. Pour la première fois depuis 2014, il faut s’attendre à une accélération de la croissance de la zone euro alors que les Etats-Unis décélèrent. Les secteurs de la défense, les infrastructures, l’énergie et les transports seront les moteurs de cette reprise. La hausse de 20% en ligne droite observée sur l’indice MDAX des valeurs moyennes allemandes est un premier signe de ce qui doit être le début d’un rattrapage logique des valorisations des petites capitalisations sachant que les ETI puis les PME allemandes devraient profiter directement de ce plan de relance, avec un effet de ruissellement sur les autres pays européens et les flux investis en Europe, d’abord sur les grandes capitalisations puis les plus petites. La fin de la guerre en Ukraine pourrait également favoriser ce retour en grâce."
Quels thèmes d’investissement privilégiez vous actuellement chez Gay-Lussac ?
" La qualité sous valorisée, la transition énergétique et l’électrification, la transition numérique et enfin les valeurs décorrélées restent nos quatre thèmes d’investissement structurels. A travers ces thèmes, l’Allemagne a vu sa pondération passer de 10% à 16%, en privilégiant tout ce qui touche de près ou de loin aux infrastructures. Les bénéficiaires de ces plans de relance sont extrêmement nombreux et certains titres n’ont pas du tout réagit. Je pense notamment à Gérard Perrier Industrie, deuxième pondération des fonds, qui a baissé alors qu’il s’agit d’un acteur de grande qualité positionné sur l’électrification, présent en Allemagne, et exposé à hauteur de 15% de son CA au secteur de la défense. "
Principales positions des fonds Microcaps (à gauche) et Microcaps Europe (à droite) à fin février 2025
Quels sont les derniers arbitrages des fonds ?
" Nous continuons de renforcer Amadeus Fire, spécialiste du recrutement d’employés du secteur tertiaire, qui affiche une solide génération de cash, rachète ses titres et bénéficie d’une valorisation attrayante en amont d’une reprise de cycle. Nous renforçons également KSB, un fabricant et vendeur de pompes de toutes tailles à destination de secteurs très variés. Nous sommes entrés sur le dossier il y a un peu plus d’un an, sa valorisation était très basse alors que la montée en puissance progressive de sa composante Services (maintenance, pièces détachées) depuis 2014 (prévue jusqu’en 2030) pouvait à elle seule soutenir durablement la croissance des résultats. A moins de 5x l’Ebitda contre plutôt 10 à 15x dans le secteur (transaction comparable ou sociétés cotées), le potentiel reste très élevé malgré la hausse récente du titre. Surtout que la communication de la société, minimaliste, et la gouvernance (existence d’actions de préférence) pourraient évoluer favorablement. En contrepartie, nous sommes sortis de Heijmans qui s’était fortement revalorisée. "
Quelles autres pépites européennes enthousiasment vos équipes et justifient une forte pondération dans les fonds ?
" Nous avons un coup de cœur pour l’italien A.L.A. (logistique pour la filière auto-défense et ferroviaire) et le grec Kri-Kri Milk (fabricant de glaces). Ces sociétés valident tous les critères que nous privilégions : société familiale, positionnée sur une niche avec de fortes barrières à l’entrée, endettement négatif et forte génération de cash, le tout pour une valorisation raisonnable. "
Les fonds Microcaps de chez Gay-Lussac (3 points entourés en vert sur le graph) sont les moins volatils de la catégorie