Watford (awp/afp) - Le groupe britannique Intu, propriétaire d'énormes centres commerciaux au Royaume-Uni, a annoncé vendredi son dépôt de bilan en raison de problèmes financiers aggravés par la crise sanitaire.

Intu explique dans un communiqué avoir décidé de se placer sous le régime britannique des faillites et avoir nommé comme administrateur le cabinet KPMG, ce qui sera effectif "sous peu".

Le groupe précise que l'ensemble de ses centres commerciaux restaient toutefois ouverts pour l'instant.

Intu explique dans un communiqué avoir échoué à s'entendre avec ses créanciers sur un aménagement de sa dette et se diriger vers un dépôt de bilan.

Il avait révélé en début de journée avoir échoué à s'entendre avec ses créanciers sur un aménagement de son énorme dette, ce qui rendait sa faillite inéluctable.

Le groupe compte 2.500 salariés au Royaume-Uni mais en fait vivre plus de 100.000 en tenant compte des personnes travaillant dans les magasins de ces centres commerciaux, et 30.000 supplémentaires dans la chaîne d'approvisionnement.

Le groupe devient l'une des victimes au Royaume-Uni les plus emblématiques de la pandémie, qui fait déjà beaucoup de dégâts, avec des vagues de suppressions d'emplois dans de nombreux secteurs, notamment l'aérien et le tourisme.

Intu se retrouve à court d'argent puisque de nombreux commerces ne sont plus en mesure de payer les loyers en raison de la pandémie qui a contraint les centres commerciaux à fermer de longues semaines, sauf pour les commerces essentiels.

L'ensemble des commerces sont autorisés à rouvrir désormais depuis le 15 juin et seront suivis le 4 juillet par les bars et restaurants.

Intu possède notamment les centres commerciaux géants de Trafford près de Manchester (nord de l'Angleterre) et celui de Lakeside dans le sud-est du pays, qui sont parmi les plus fréquentés du pays. Il compte au total 20 de ces centres, dont 17 au Royaume-Uni et 3 en Espagne.

Dans le centre commercial Intu de Watford, ville au nord de Londres, les clients continuaient à faire leurs emplettes vendredi, malgré l'avenir incertain du lieu qui est détenu à 7% par les autorités locales.

Pas de chevalier blanc ?

"Ce serait dommage qu'il ferme", confie à l'AFP Kate, 53 ans, avec à la main un sac de courses de l'enseigne d'habillement à bas prix Primark.

"Je viens ici depuis des années. Ce n'est pas que pour les magasins. Il y a le cinéma maintenant et plein d'endroits pour manger", explique-t-elle.

Chez Herbal Inn, magasin spécialisé dans la médecine chinoise traditionnelle, la gérante Amy indique avoir moins de clients depuis la réouverture mi-juin.

"Nous faisons juste de la vente de produits", et plus d'acupuncture et de massages, "ce qui n'est pas terrible", selon elle.

La mise en danger du groupe est "un événement considérable parce qu'Intu est propriétaire de quelques-uns des plus grands centres commerciaux" dans le pays, relève Richard Lim du cabinet Retail Economics, interrogé par l'AFP.

"Le secteur a été trop lent pour répondre au changement et il doit être plus innovant, avec des espaces de bureaux, des salles de sport. Les commerces ne doivent être qu'un élément de ces énormes centres commerciaux", explique-t-il.

Les difficultés financières ne sont pas nouvelles pour Intu, qui souffrait bien avant la crise sanitaire d'une dette très élevée, laquelle atteint désormais 4,5 milliards de livres, et de la baisse de fréquentation des magasins face à la concurrence des ventes en ligne.

Encore membre de l'indice vedette FTSE-100 en 2017, le groupe a connu une descente aux enfers en Bourse.

Son titre a été suspendu vendredi alors qu'il valait 1,80 pence, soit une valorisation d'un peu plus 20 millions de livres. L'action valait encore plus de 100 pence en 2019.

Pour Russ Mould, analyste chez AJ Bell, Intu paye le prix de l'essor des ventes en ligne et de l'impact de la crise sanitaire, mais également de mauvaises décisions stratégiques, avec des achats d'actifs à un moment peu porteur au milieu des années 2010.

"Le fait que certains prétendants se soient intéressés au groupe lors des deux dernières années avant de passer leur chemin aurait dû servir d'avertissement", selon l'analyste.

En 2018, la société foncière britannique Hammerson avait renoncé à acquérir Intu à cause d'une conjoncture difficile dans l'immobilier commercial, au grand dam de sa cible.

"Les chances de trouver un chevalier blanc sont pratiquement inexistantes désormais et le risque pour Intu est de voir des vautours se partager sa carcasse", prévient M. Mould.

afp/rp