* L'Opep suffisamment armée pour compenser Iran et Venezuela-analystes

* Les capacités reculeraient à 1% de la demande au T4- Energy Aspects

* Graphiques interactifs :

* La production de l'Opep : https://tmsnrt.rs/2LArZY3

* La production américaine : https://tmsnrt.rs/2VVVEiv

* Les capacités de l'Opep (EIA): https://tmsnrt.rs/2VVkYFd

par Ahmad Ghaddar

13 mai (Reuters) - Les capacités excédentaires de production pétrolière pourraient représenter moins de 1% de la demande mondiale de brut d'ici la fin de l'année si l'Opep compense les baisses de production de l'Iran et du Venezuela, laissant le marché exposé à de fortes variations en cas de perturbations imprévues, estiment des analystes.

Les capacités excédentaires permettent à un pays producteur de mettre rapidement du pétrole sur le marché pour amortir l'impact d'une pénurie de l'offre due à une catastrophe naturelle, un conflit armé ou tout autre élément de perturbation.

Peu de producteurs ont des capacités inemployées, les plus importantes étant sans surprise aux mains de l'Arabie saoudite, le chef de file de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep).

Ces capacités sont pour l'heure suffisantes pour compenser la baisse de l'offre due aux sanctions américaines contre l'Iran et le Venezuela, disent les analystes.

La production cumulée de ces deux pays a déjà reculé de 1,85 million de barils par jour (bpj) par rapport à ses pics de 2018, d'après les estimations de Reuters.

Les analystes s'attendent à ce que la production vénézuélienne se stabilise plus ou moins à ses niveaux actuels d'environ 700.000-800.000 bpj d'ici la fin de l'année mais pensent que celle de l'Iran baissera encore, l'administration Trump étant déterminée à stopper les exportations de Téhéran.

"L'Iran est à environ 2,5 millions de bpj actuellement et on voit ce chiffre tomber à environ 2 millions de bpj d'ici la fin de l'année", déclare Riccardo Fabiani, analyste géopolitique chez Energy Aspects.

Goldman Sachs s'attend à ce que les exportations de la République islamique se stabilisent autour de 400.000 bpj, soit 900.000 bpj de moins qu'en avril, une perte qui d'après la banque d'affaires américaine peut être compensée par les capacités inemployées de l'Opep.

Barclays est du même avis mais met en garde : "Si l'Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et d'autres pays de l'Opep compenseront vraisemblablement le déséquilibre créé par la baisse des exportations iraniennes, quoiqu'avec davantage de réticence que l'an dernier, cela se fera au prix d'une réduction sensible des capacités disponibles et augmentera aussi le risque d'un conflit potentiel au Moyen-Orient", écrivent les analystes de la banque britannique dans une note.

Les experts pensent que Ryad relèvera plus prudemment sa production que l'an dernier quand le royaume avait donné satisfaction à Donald Trump qui pressait l'Opep de remplacer les barils iraniens sur le marché. La production saoudienne avait alors culminé à plus de 11 millions de bpj, un record.

Malgré les pressions renouvelées de Washington, l'Arabie saoudite rechigne à augmenter trop fortement l'offre de crainte de faire chuter les prix après leur progression de 30% cette année, expliquent-ils.

"Ils (les Saoudiens) vont attendre de voir l'impact sur les cours de la fin des exemptions sur les sanctions avant d'augmenter leur production", dit Riccardo Fabiani.

Energy Aspects s'attend à ce que les capacités excédentaires de l'Opep baissent à environ 920.000 bpj au quatrième trimestre contre 1,4 million au troisième trimestre et 2,05 millions au deuxième.

Si ce chiffre passe sous le million de bpj, soit environ 1% de la demande mondiale de pétrole, les prix seront vulnérables à de fortes variations en cas de perturbations chez des producteurs comme la Libye ou le Nigeria.

La Libye, théâtre d'une guerre civile, produit 1,1 million de bpj mais la compagnie publique National Oil Corporation a dit que le conflit qui a récemment redoublé d'intensité menaçait sa capacité à poursuivre ses pompages.

Le Nigeria, de son côté, voit ses livraisons perturbées par des coupures récurrentes sur son réseau d'oléoducs.

Les analystes de Citi s'attendent à ce que l'Opep et ses alliés augmentent leur production au troisième trimestre, quand la demande atteint traditionnellement son pic de l'année en prévision de l'hiver.

"D'ici août, la demande de brut de la part des raffineries pourrait être supérieure de jusqu'à trois millions de bpj à ses niveaux de mai, et celle pour les produits raffinés pourrait être supérieure de jusqu'à quatre millions de bpj", estiment-ils.

Pendant ce temps, la production américaine poursuit sa progression et devrait atteindre cette année une moyenne de 12,45 millions de bpj, soit une hausse de 1,49 million par rapport à 2018, selon les dernières prévisions de l'Agence américaine d'information sur l'énergie (EIA).

Cette augmentation est supérieure à la croissance de 1,4 million de bpj de la demande mondiale qu'anticipe l'Agence internationale de l'énergie (AIE) pour cette année.

(Véronique Tison pour le service français, édité par Blandine Hénault)