* Philippe entend contenir le déficit 2019 à 3,2% du PIB

* Report de la baisse de l'IS pour les grandes entreprises

* L'Etat mis à contribution à hauteur d'un à 1,5 milliard d'euros

* La hausse de 100 euros du SMIC passera par la prime d'activité (Actualisé avec éléments supplémentaires)

PARIS, 16 décembre (Reuters) - Le déficit public de la France devrait s'établir à environ 3,2% du PIB en 2019 sous l'effet des mesures annoncées pour les "Gilets jaunes, qui seront en partie contrebalancées par des dispositions touchant l'Etat et les entreprises, annonce le Premier ministre Edouard Philippe dans une interview aux Echos.

"Nous assumons une légère augmentation du déficit du fait de l'accélération de la baisse des impôts. Mais nous faisons attention aux comptes publics, et nous prenons une série de mesures, sur les entreprises et sur les dépenses, de l'ordre de 4 milliards. Cela devrait permettre de contenir le déficit à environ 3,2% pour 2019", déclare le Premier ministre dans cet entretien diffusé dimanche sur le site du quotidien.

Le coût de l'ensemble des mesures en faveur du pouvoir d'achat annoncées par le chef de l'Etat et le Premier ministre pour apaiser la contestation des "Gilets jaunes" est évalué à 10 milliards d'euros.

Les comptes publics 2019 sont par ailleurs marqués par une dégradation de 0,9 point de PIB liée à la transformation du CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) en baisse de charges pérenne, une mesure sur laquelle Edouard Philippe exclut de revenir.

Sous le poids conjugué de cette bascule et des mesures pour les "Gilets jaunes", le déficit public 2019 aurait pu s'établir à 3,4% du PIB, un chiffre abaissé grâce à la contribution de l'Etat et des entreprises mais qui restera néanmoins en dehors de la limite des 3% fixée par le pacte de stabilité et de croissance européen.

Les grandes entreprises seront mises à contribution "pour nous permettre de dégager une recette supplémentaire de l'ordre de 1,8 milliard d'euros", précise le Premier ministre. Cet effort passera par un report d'un an de la diminution du taux de l'impôt sur les sociétés de 33% à 31% pour les entreprises ayant plus de 250 millions d'euros de chiffre d'affaires.

MAÎTRISE DE LA DÉPENSE DE L'ETAT

Par ailleurs, la taxe sur les grandes entreprises du numérique (GAFA) promise par Bruno Le Maire devrait permettre de générer 500 millions d'euros de recettes dès 2019.

"Enfin nous allons revoir ce qu'on appelle la 'niche Copé' sur les opérations intra-groupe des entreprises, qui rapportera de l'ordre de 200 millions d'euros", poursuit Edouard Philippe.

Outre les entreprises, l'Etat sera mis à contribution.

"Nous allons engager avec les parlementaires au cours de l'année 2019 un exercice de maîtrise de la dépense. Dans le cadre de l'exécution du budget 2019, nous devrons trouver d'1 à 1,5 milliard d'euros d'économies", déclare le chef du gouvernement.

Revenant sur les mesures de soutien au pouvoir d'achat annoncées la semaine dernière par Emmanuel Macron, Edouard Philippe précise leurs modalités.

Ainsi la hausse de 100 euros du Smic promise par le chef de l'Etat "passera par une hausse massive de la prime d’activité". "Cela permet d’aller vite : dès le 5 février, la prime sera versée pour compléter le salaire de janvier et atteindre ainsi la hausse de 100 euros", explique-t-il.

"Nous avons préféré cette solution à une baisse des cotisations salariales, qui était plus injuste et qui, à ce titre, a déjà été censurée par le Conseil constitutionnel", ajoute-t-il.

La prime d'activité sera élargie à 5 millions de foyers (contre 3,8 actuellement) : "Tous les salariés célibataires sans enfant auront 100 euros de plus jusqu’à 1560 euros net de revenus", dit-il.

Le Premier ministre estime par ailleurs à 400 euros par an le gain moyen pour les salariés lié à la défiscalisation des heures supplémentaires.

Interrogé sur la fiscalité, le Premier ministre exclut tout recul sur l'ISF, jugé "handicapant pour les entreprises françaises" : "Nous ne sommes pas favorables à revenir sur la suppression de l’ISF, qui a contribué à l’amélioration de l’attractivité de la France. Les investissements étrangers en France ont augmenté, la France va tirer parti du Brexit", estime-t-il.

L'ensemble des dispositions annoncées devra être débattu au Parlement à compter de la semaine prochaine. (Julie Carriat, édité par Jean-Stéphane Brosse)