* Entretien Macron- Netanyahu à l'Elysée

* Quatre jours après l'onde de choc américaine sur Jérusalem

* Macron met en garde contre une multiplication d'initiatives (Actualisé avec détails sur les gestes attendus §10)

PARIS, 10 décembre (Reuters) - Emmanuel Macron a appelé dimanche Israël à faire des "gestes courageux" pour sortir de l'impasse les négociations de paix avec les Palestiniens dans un contexte de regain de tensions liées à la reconnaissance par les Etats-Unis de Jérusalem comme capitale de l'Etat hébreu.

Quatre jours après l'onde de choc de la décision de Donald Trump de transférer l'ambassade américaine en Israël à Jérusalem, le président français a reçu en début d'après-midi à l'Elysée le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu pour un déjeuner de travail.

Prévu de longue date, cet entretien entre les deux hommes a été largement dominé par les derniers développements dans la région, où quatre personnes ont été tuées dans la bande de Gaza et en Cisjordanie depuis mercredi.

Des violences ont également éclaté à Beyrouth en marge d'une manifestation et un agent de sécurité israélien a été blessé dimanche à coups de couteau par un Palestinien à Jérusalem.

"Tout ce qui menace la sécurité d'Israël et des Israéliens est condamné par la France avec beaucoup de fermeté et de clarté", a dit Emmanuel Macron lors d'une conférence de presse conjointe au cours de laquelle les deux hommes ont multiplié les gestes d'amitié malgré les désaccords. "Israël est un pays ami avec lequel nous avons un dialogue franc et direct et une collaboration étroite."

Réaffirmant son opposition à l'initiative "unilatérale" américaine - "contraire au droit international et dangereuse pour la paix"-, le chef de l'Etat a rappelé l'attachement de la France à la solution dite à deux Etats.

"La France demeure convaincue que la seule solution est de permettre l'établissement de deux Etats vivants côte à côte en paix et que cela peut émerger par la négociation", a-t-il souligné.

"J'ai invité le Premier ministre israélien à mener des gestes courageux à l'égard des Palestiniens pour sortir de l'impasse actuelle", via notamment un gel de la colonisation des territoires palestiniens occupés par Israël. "QU'ABBAS VIENNE S'ASSEOIR ET NÉGOCIE"

"Je lui dis : laisse une chance à la paix, fais un geste envers les Palestiniens, la paix ne dépend pas des Etats-Unis ou de la France toute seule, elle dépend de la capacité des deux dirigeants israéliens et palestiniens à la faire. Give a chance", a déclaré Emmanuel Macron comme en écho à la célèbre chanson de John Lennon.

Des "mesures de confiance" à l'égard de l'Autorité palestinienne, portant sur la liberté de circulation, le développement de projets économiques ou les conditions de détention des détenus palestiniens, pourraient également constituer un geste important en faveur de la paix, a précisé un peu plus tard l'Elysée. S'exprimant aux côtés d'Emmanuel Macron, Benjamin Netanyahu, qui avait critiqué samedi la tiédeur de la réaction des Européens après des tirs de roquettes sur Israël en provenance de la bande de Gaza, a salué la condamnation des violences par "son ami" tout en reconnaissant qu'ils n'étaient pas "d'accord sur tout."

"Nous y travaillons c'est une question de temps", a-t-il dit. "Paris est la capitale de la France, Jérusalem est la capitale d'Israël depuis 3.000 ans. Nous savons qu'en tant qu'amis, vous respectez nos choix".

"Jérusalem est notre capitale et n'a jamais été la capitale d'un autre peuple. Je pense que dès que les Palestiniens accepteront cette réalité nous pourrons avancer pour la paix", a-t-il ajouté, renvoyant la responsabilité de l'impasse au camp palestinien.

"Le plus important pour la paix c'est de reconnaître que l'autre partie a le droit d'exister, je crois que c'est ce qui a retardé les négociations le refus de s'asseoir avec Israël", a-t-il souligné. "Rien ne pourrait être plus simple : si (le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas-NDLR) veut la paix, qu'il vienne s'asseoir et négocier".

INITIATIVES CANNIBALES

Menées sous l'égide de Washington, les dernières négociations de paix directes entre Israël et l'Autorité palestinienne n'ont débouché sur aucun accord en avril 2014, notamment en raison de la poursuite de la colonisation israélienne.

En reconnaissant Jérusalem comme capitale d'Israël, le président américain Donald Trump a également indiqué que les Etats-Unis restaient déterminés "à aider à faciliter un accord de paix acceptable pour les deux parties", sans donner plus de précisions.

La France, qui s'est efforcée en vain sous le quinquennat précédent de raviver le processus de paix, attendra de voir l'accueil réservé à l'initiative de Donald Trump par les parties concernées avant de prendre, éventuellement, le relais, a dit Emmanuel Macron.

"Il y a une volonté de médiation américaine qui demeure, moi je ne veux pas la condamner ab initio, et donc il faut attendre dans les prochaines semaines les prochains mois ce qui sera proposé", a-t-il dit. "C'est ensuite aux parties de dire si elles l'acceptent ou pas".

"Je pense qu'il est préférable quand il y a une annonce d'une initiative de ne pas les multiplier parce qu'elles se cannibalisent les unes avec les autre", a ajouté le chef de l'Etat. (Marine Pennetier, édité par Yann Le Guernigou)