Louis Albert, la société de Gestion IDAM, que vous dirigiez et que vous aviez co-fondée, s’est récemment rapprochée d’Auris Gestion. Que pouvez-vous nous dire de cette opération ?

" Nous avons fondé IDAM en 2017, atteignant rapidement un encours nous permettant de couvrir nos charges fixes et d’assurer un équilibre financier. Cependant, les contraintes réglementaires et la taille critique augmentent continuellement dans notre métier et il est compliqué de se développer sereinement en dessous d’un encours d’un milliard d’euros. A la faveur d’une centaine de millions d’euros d’encours et surtout d’une expertise en gestion actions, notamment sur le segment des small & mid caps européennes, mes échanges avec Sébastien Grasset, DG d’Auris, que je connais depuis de nombreuses années, ont révélé l’intérêt de participer à la consolidation en cours de notre industrie. Le groupe Auris totalise près de  5 Md€ d’encours. Auris Gestion a été fondée en 2004 avec une spécialisation dans la gestion privée puis s’est rapidement tournée vers l’asset management. Ce rapprochement nous permet de passer un cap, d’augmenter l’encours de fonds comme IDAM Small Euro (il va d’ailleurs dépasser les 10 M€) tout en maintenant nos processus et notre expertise. Nous sommes persuadés que notre classe d’actifs offrira une belle brique de diversification pour les allocations des clients. 

Critères et caractéristiques des valeurs du fonds Idam Small Euro (source : IDAM)

 

Le processus et l’équipe de gestion du fonds IDAM Small Euro est-il impacté ? Quel est votre regard sur la performance du fonds ces dernières années ?

" La vie du fonds continue comme avant. Que ce soit son nom, son binôme de gérants ou le processus de sélection, tout est maintenu. Idam Small Euro est un fonds investi dans la zone Euro avec une capitalisation médiane de 600M€. Ce dernier point continue de nous pénaliser depuis début 2022, les performances boursières, et dans une moindre mesure financières des sociétés, étant corrélées à leur taille. Nos trois principaux critères de sélection pour ce fonds « GARP » (NDLR : croissance à prix raisonnable) sont la qualité financière, mesurée principalement par le ROE, la croissance des résultats, et la valorisation avec des ratios de PER et de VE/EBITDA qui présentent actuellement une décote de l’ordre de 20% par rapport à l’indice MSCI Emu Small. Ajoutons que nous sommes très attentifs à la génération de flux de trésorerie des entreprises, à leur levier opérationnel en évitant les sociétés dont les marges sont proches de leurs plus hauts pour éviter les mauvaises surprises et les grosses sanctions boursières. Avec une cinquantaine de lignes en portefeuille, rarement pondérées au-delà de 3%, nous cherchons à réduire autant que possible le risque spécifique du portefeuille et monitorons de près le poids de chaque secteur dans le portefeuille tout en étant attentif au momentum de chacune de nos positions. Notre taux d’investissement approche les 100% : les small caps évoluent sur des niveaux de valorisation extrêmement attractifs et l’amélioration des perspectives de croissance en Europe finira par déclencher un rattrapage."


Quelles sont les thématiques conjoncturelles privilégiées par le fonds actuellement ?

" Nous comptons conserver notre exposition aux valeurs du secteur de la défense (6 à 8% du fonds sur Exosens, Indra Sistemas, Theon International). Nous nous sommes positionnés sur deux fournisseurs de produits métallurgiques qui profiteront indirectement de la visibilité offerte par le plan de relance allemand sur les infrastructures : Jacquet (40% du CA en Allemagne) et Outokumpu (30% du CA en Allemagne). Modérément exposées à l’automobile, elles sont moins valorisées que les cimentiers pour jouer le redémarrage du marché immobilier et la reconstruction de l’Ukraine. De manière générale, ces valeurs augmentent notre exposition aux cycles en Europe alors que les indices PMI européens connaissent leur plus longue période de contraction depuis les années 90. A contrario, nous faisons attention à être peu exposés aux sociétés qui vendent significativement aux Etats-Unis sans y produire afin de limiter notre sensibilité aux tarifs douaniers américains. Cela nous a amenés à alléger Ekinops et Powersoft. "


Principales positions du fonds à fin mars 2025

 

Theon International, dont vous nous aviez parlé il y a un an peu après son introduction en Bourse, a très bien performé...

" Nous nous étions positionnés sur cette société chypriote basée en Grèce et cotée à Amsterdam essentiellement pour des raisons de valorisation et de haut niveau de ROCE. Ce spécialiste des systèmes optroniques assemble et commercialise principalement des produits de vision nocturne et d’imagerie thermique, en forte croissance dans le contexte actuel sachant que 100% du CA est exposé à la défense, ce qui n’est pas le cas d’Exosens. La valorisation a beaucoup progressé mais les résultats attendus les prochaines années pourraient dépasser les attentes actuelles, donc nous conservons 2.5% du fonds après avoir allégé la position, étant bien conscients que la thématique pourrait retomber à court terme. "

 

Avez-vous profité de récent krach pour acheter une valeur dont le cours aurait fortement corrigé ?

" Nous avons renforcé notre première position, Técnicas Reunidas, rachetant des titres après avoir allégé en début d’année. Le titre a pâti de la baisse du cours du baril alors que cette société d’ingénierie est directement exposée au gaz et à des projets autour de l’hydrogène, de la capture de carbone et des carburants plus propres.  . Nous apprécions particulièrement sa faible valorisation au regard de comparables comme Technip Energies ou Maire Tecnimont, et son levier opérationnel. "

 

Quelles sont les plus fortes pondérations du fonds en France ?

" Dans un secteur de la plaisance en phase de contraction, notre préférence continue d’aller clairement à Fountaine Pajot compte tenu de ses qualités fondamentales et de sa valorisation alors que d’un côté Beneteau connaît des difficultés aux Etats-Unis et dépense beaucoup d’argent dans sa politique de montée en gamme et de renouvellement des modèles et que de l’autre, Catana est plus cher et plus exposé aux loueurs, ce qui fragilise son carnet de commandes. Dans un secteur où le creux de cycle se dessine plus clairement, nous sommes actionnaires d’Hexaom dont le rebond du carnet de commandes sera amplifié et entretenu par des gains de part de marché. Le matelas de cash et la valorisation offrent une forte opportunité tout en maîtrisant le risque de perte. Enfin, nous apprécions Voyageurs du Monde qui a présenté une solide publication annuelle et des perspectives rassurantes grâce à un positionnement haut de gamme et l’étendue de son offre, que ce soit géographique, sur les voyages d’aventure de plus en plus sur mesure, ou encore le voyage à vélo. Alors que nous nous attendions plutôt à une OPA, le placement de titres sur le marché pourrait finalement redonner une vie boursière intéressante au titre. "

Performances du fonds Idam Small Euro - Source : Quantalys