DUBAÏ, 8 décembre (Reuters) - L'Iran a exécuté jeudi un manifestant condamné pour avoir blessé un paramilitaire et avoir bloqué la circulation dans une artère de Téhéran dans le cadre de la vague de protestations qui secoue le pays depuis mi-septembre, rapporte l'agence de presse iranienne semi-officielle Tasnim.

L'agence Tasnim, qui identifie le manifestant exécuté comme Mohsen Shekari, n'a pas donné davantage de précisions.

Le porte-parole de la justice iranienne avait annoncé mardi la condamnation à mort - susceptible de faire l'objet d'un appel - de cinq personnes condamnées pour le meurtre d'un membre de la milice Basidj (une force paramilitaire constituée de volontaires et qui dépend du corps d'élite des Gardiens de la révolution-NDLR).

Les médias officiels ont publié une vidéo qu'ils présentent comme étant une retransmission des aveux de Mohsen Shekari dans laquelle il apparaît avec un bleu sur la joue droite. Il y admet avoir frappé un membre de la milice Basij avec un couteau et avoir bloqué une route avec sa moto aux côtés d'un de ses amis.

Des groupes de défense des droits ont déclaré que Shekari avait été torturé et contraint d'avouer.

Le vaste mouvement de contestation né en Iran dans le sillage de la mort de Mahsa Amini mi-septembre après son arrestation pour avoir porté un voile non réglementaire a fait l'objet d'une répression sévère condamnée par les puissances occidentales et les Nations unies.

La France a condamné jeudi "avec la plus grande fermeté l’exécution ce jour d’un Iranien condamné à mort à la suite de sa participation aux manifestations en cours en Iran".

"Cette exécution s’ajoute aux nombreuses autres violations graves et inacceptables des droits et libertés fondamentales commises par les autorités iraniennes", a déclaré une porte-parole du ministère des Affaires étrangères à l'issue d'un point avec la presse.

Le ministre britannique des Affaires étrangères James Cleverly s'est dit également "indigné" par la nouvelle de l'exécution.

"Le monde ne peut pas fermer les yeux sur la violence odieuse commise par le régime iranien contre son propre peuple", a-t-il déclaré sur Twitter.

L'Allemagne a également condamné l'exécution. "Le mépris du régime iranien pour l'humanité ne connaît aucune limite", a dénoncé la ministre des Affaires étrangères du pays, Annalena Baerbock.

"Mais la menace d'une exécution n'étouffera pas la volonté de liberté du peuple", a-t-elle ajouté.

PLUS DE 20 CONDAMNATIONS À MORT PRONONCÉES

Selon des chiffres relayés par l'Onu, plusieurs centaines de morts - dont des dizaines d'enfants - ont été recensés depuis le début des manifestations, dont les autorités de Téhéran estiment qu'elles sont fomentées par les puissances étrangères.

Les Gardiens de la révolution ont salué lundi la position ferme adoptée par la justice iranienne et ont plaidé pour qu'elle agisse rapidement et avec détermination pour condamner les personnes accusées de "crimes contre la sécurité de la nation et contre l'islam".

Selon Amnesty International, au moins 21 personnes sont sous la menace d'une condamnation à mort dans le cadre de "simulacres de procès destinés à intimider les participants au soulèvement populaire qui secoue l'Iran".

"Les autorités iraniennes doivent immédiatement annuler l'ensemble des condamnations à mort prononcées, s'abstenir de pousser à ce que la justice inflige des condamnations à mort et abandonner toutes les charges contre les personnes arrêtées en raison de leur participation pacifique à des manifestations", poursuit l'ONG de défense des droits humains. (Rédigé par le bureau de Dubaï, avec la contribution de Miranda Murray à Berlin et de Sarah Young à Londres, version française Myriam Rivet et Blandine Hénault, édité par Nicolas Delame)