Les inquiétudes autour du conflit économique sino-américain et la crainte d'une récession continuent de tarauder les investisseurs qui se reportent massivement sur les obligations d'Etat et d'autres actifs jugés sûrs, dont l'or qui a atteint les 1.500 dollars l'once pour la première fois depuis 2013.

Contrairement à mardi, les places européennes ont pu toutefois se maintenir en territoire positif et le CAC 40 a conservé en clôture un gain de 0,61% à 5.266,51 points, mettant fin à une série de trois séances de baisse même s'il a fini nettement sous son point haut du jour à 5.312,31.

Le Footsie britannique a gagné 0,38% et le Dax allemand 0,71%. L'indice EuroStoxx 50 a progressé de 0,56% et le FTSEurofirst 300 de 0,25%, le Stoxx 600 terminant pour sa part sur un gain de 0,24% après avoir pris jusqu'à 1,1% le matin et effectué une brève incursion dans le rouge après l'ouverture de Wall Street.

"Il reste une pression vendeuse, les marchés sont trop nerveux", commente un trader à Londres.

La Banque populaire de Chine (BPC), qui avait rassuré les marchés mardi en fixant le taux pivot du yuan au-dessus des attentes des cambistes, a fait l'inverse mercredi et la décision de la banque centrale de Nouvelle-Zélande de réduire son taux directeur d'un demi-point, plus que prévu, a alimenté les inquiétudes sur la croissance mondiale.

Les intervenants ont en revanche apprécié les déclarations de la Maison blanche sur sa volonté de poursuivre les discussions avec Pékin pour parvenir à un accord commercial, malgré sa décision de jeudi dernier d'imposer de nouveaux droits de douane à compter du 1er septembre.

VALEURS

En tête du CAC 40, EssilorLuxottica a gagné 3,22% alors qu'un de ses dirigeants a dit envisager d'autres acquisitions après l'annonce en juillet du rachat du néerlandais GrandVision GVNV.AS.

A Francfort, Bayer s'est s'adjugé 6,02%, meilleure performance du Dax et de l'EuroStoxx 50, et Lanxess 4,04% après avoir annoncé la vente de leur coentreprise Currenta, un exploitant de sites chimiques, à l'australien Macquarie Infrastructure and Real Assets pour une valeur d'entreprise de 3,5 milliards d'euros.

Les plus fortes baisses sectorielles ont été pour les ressources de base (-0,99%), les hydrocarbures (-0,98%) et les valeurs bancaires (-0,77%), affectées les premières par le conflit commercial, les secondes par la chute des cours du pétrole et les troisièmes par la baisse des taux longs.

Au sein du secteur bancaire, Commerzbank a chuté de 6,43%, la plus forte baisse du FTSEurofirst, et Unicredit de 4,94%, leur recul ayant été amplifié par des résultats trimestriels décevants.

A rebours de ses pairs, Banco BPM a bondi de 4,72% à Milan après une publication supérieure aux attentes.

A WALL STREET

Après avoir ouvert en baisse de plus de 500 points, le Dow Jones cédait encore 361,85 points ou 1,39% vers 16h00 GMT, à 25.667,67. Le Standard & Poor's 500 lâchait pour sa part 1,17% et le Nasdaq Composite 0,75%, effaçant leur rebond de la veille.

"Les gens s'inquiètent de savoir si l'économie sera en mesure de supporter la prochaine phase de la guerre commerciale", dit Mike Loewengart, responsable de la stratégie d'investissement chez E*Trade Financial à New York.

Neuf des 11 grands indices sectoriels S&P 500 évoluent en territoire négatif, la plus forte baisse étant pour les valeurs financières qui perdent plus de 2% dans le sillage des taux longs.

LES INDICATEURS DU JOUR

L'annonce d'une baisse de 1,5%, nettement plus forte qu'attendu, de la production industrielle allemande en juin a conforté le scénario d'une contraction de la première économie d'Europe au deuxième trimestre. Sur les trois mois d'avril à juin, la production industrielle a reculé de 1,8% au total.

CHANGES

Sur le marché des changes, le yen et le franc suisse, traditionnelles valeurs refuge, ont profité des inquiétudes sur l'économie mondiale alimentées par la baisse de taux plus forte que prévu en Nouvelle-Zélande, suivie aussi par des baisses de taux en Inde et en Thaïlande.

Le yen s'octroie 0,66% à 105,74 pour un dollar, revenant près de son pic de huit mois de 105,51 atteint la veille. Le franc suisse s'apprécie pour sa part de 0,37% à 0,9727 face au Billet vert.

Le dollar néo-zélandais décroche de 1,47% à 0,6427, après un point bas à 0,6379, entraînant son voisin australien qui recule de 0,49% à 0,6725. L'Aussie a touché aurapavant un plus bas depuis 2009 à 0,6678 sur le sentiment que la banque centrale australienne devra aussi réduire ses taux plus fortement que prévu, après son statu quo de mardi.

Le yuan offshore cède pour sa part 0,52% à 7,0891 pour un dollar.

L'euro avance lui de 0,3% à 1,1230 dollar et l'indice dollar, qui mesure la valeur du billet vert face à six devises de référence, recule d'autant à 97,377.

TAUX

Les baisses de taux en Nouvelle-Zélande, en Inde en Thaïlande ont déclenché une ruée sur les marchés obligataires en Asie qui s'est ensuite étendue à l'Europe, où le rendement du Bund a touché un nouveau plus bas historique à -0,60%, puis aux Etats-Unis.

Le repli de six points de base du Bund est le plus important depuis le 18 juin et marque une neuvième séance consécutive de baisse, du jamais vu depuis novembre 2015 selon les données de Refinitiv.

Le rendement des Treasuries à 10 ans cédait de son côté 10,20 points de base à 1,6365% au moment de la clôture européenne, après un nouveau plus bas depuis octobre 2016 de 1,595%.

Aux Etats-Unis toujours, la prime des taux à trois mois sur les rendements à 10 ans a atteint 39 points de base, au plus haut depuis mars 2007 d'après les données de Refinitiv. L'inversion de la courbe des taux est considérée comme un signe avant-coureur d'une récession.

Dans cette optique, les futures sur les taux d'intérêt suggèrent maintenant que les traders anticipent trois autres baisses du taux directeur de la Fed cette année pour éviter une récession.

PÉTROLE

Les cours du pétrole ont accentué leur recul avec l'ouverture en baisse de Wall Street et les craintes de récession, et il s'est encore amplifié avec l'annonce d'un gonflement inattendu des stocks de brut et d'essence aux Etats-Unis la semaine dernière.

En fin de journée européenne, le Brent cédait plus de 4% à 56,50 dollars le baril et le brut léger américain (West Texas Intermediate, WTI) plus de 5% à 50,92 dollars.

MÉTAUX

L'or, bénéficiant à plein de son statut de valeur refuge, a gagné plus de 2% pour franchir le seuil des 1.500 dollars l'once pour la première fois depuis six ans. En fin de journée européenne il conservait un gain de 1,6% à 1.497,69 sur le marché au comptant après une pointe à 1.509,80, un plus haut depuis avril 2013.

Le métal fin a ainsi repris près de 20% depuis son point bas de l'année à 1.265,85 dollars en mai.

Dans son sillage, l'argent a touché un plus haut depuis juin 2018 à 17,10 dollars l'once.

ÉMERGENTS

L'indice MSCI des marchés émergents, qui inclut près de 1.200 valeurs de 26 pays en développement, alignait mercredi une 11e séance consécutive dans le rouge - la deuxième série baissière la plus longue de son histoire après deux épisodes de 12 jours de baisse en mai-juin 2015 et septembre 1990.

Ce recul est imputable pour l'essentiel à la baisse des marchés chinois, dont les deux principaux indices ont accusé mercredi un sixième repli consécutif. L'Institute of International Finance estime que le marché boursier chinois a perdu l'équivalent de deux milliards de dollars de capitalisation en quelques jours.

(avec Thyagaraju Adinarayan à Londres)

par Veronique Tison