Personnellement, j'éviterais deux métiers cette semaine : premier ministre britannique et président de la Banque centrale européenne. D'ailleurs, je dois plutôt écrire "première ministre" et "présidente" puisque ce sont des femmes qui se retrouvent en première ligne.

Au Royaume-Uni, Liz Truss devrait succéder à Boris Johnson aux commandes du pays. Elle devrait être désignée cheffe de file des conservateurs aujourd'hui par les membres du parti, aux dépens de Rishi Sunak, qui semble distancé. Selon la tradition britannique, la Reine la désignera demain première ministre d'une économie en grandes difficultés. Comme c'est une femme et qu'elle semble avoir des idées très arrêtées sur certains sujets, elle est comparée à Margareth Thatcher. Cela dit Theresa May l'était aussi au début, après avoir finalement été qualifiée d'anti-Margareth Thatcher. De ce côté-ci du Channel, je ne crois pas que quelqu'un ait encore comparé Elisabeth Borne à Edith Cresson, mais il est vrai que Miss Maggie a laissé un souvenir impérissable aux britanniques.

Le second métier compliqué de la semaine est celui de présidente de la BCE. Christine Lagarde et les autres banquiers centraux européens vont devoir décider jeudi de l'ampleur de la hausse de taux qu'ils sont forcés d'annoncer pour tenter de courber l'inflation. Cette phase de resserrement de la politique monétaire intervient au plus mauvais moment, puisque l'Europe est confrontée à une crise énergétique inédite. L'explosion du prix de l'énergie a créé une énorme "taxe" qui pèse sur les consommateurs et les entreprises du continent, payée non à nos gouvernements mais à des fournisseurs externes, comme le soulignait hier l'économiste Erik Nielsen. Cette taxe réduit le niveau de vie des Européens de plus de 3%, ce qui est considérable. Nielsen parle d'un "choc permanent" qui ne se résorbera que lorsque des énergies de substitution seront déployées, ce qui est coûteux, et long.

La Russie est parvenue à imposer un dialogue mélien à une Europe qui se pensait à l'abri. On peut d'ailleurs se demander si nos dirigeants politiques ont bénéficié d'une bonne analyse du risque. Vu la panique actuelle, on peut aisément imaginer que non et que quelques prévisionnistes doivent être cloués aux portes des ministères. Cela pose pas mal de questions, jusqu'à celle d'une opinion publique moins unanime dans son soutien à l'Ukraine, qui pourrait passer pour la source des difficultés de l'UE. Injuste mais envisageable. L'indignation est populaire tant qu'elle est gratuite.

La crise énergétique entraîne de nouvelles mesures sur le vieux continent, tournées soit vers le soutien financier aux énergéticiens (comme en Finlande ou en Suède), soit vers le consommateur (le bouclier tarifaire serait reconduit en France en 2023), soit les deux (l'Allemagne a adopté un plan de 65 Mds€). Tout cet argent va donc filer dans les poches des fournisseurs de combustibles fossiles, on l'aura compris. Je cite à nouveau les travaux de Nielsen et d'Unicredit : l'UE importait avant la pandémie environ 400 Mds€ par an de pétrole (3/4) et de Gaz (1/4), à des prix respectifs de 55 USD le baril et 20€ le MWh. A 100 USD le baril et 100€ le MWh de gaz (ce qui est la moitié du prix spot actuel), la facture s'alourdirait de 600 Mds€ par an, soit une "nouvelle taxe annuelle" de près de 4% du PIB.

Bon, inutile de rabâcher ça plus longtemps, on voit bien qu'un changement considérable est à l'œuvre. C'est la raison pour laquelle le G7 veut plafonner le prix du pétrole russe (sans garantie d'y parvenir) et que les Européens se réunissent pour tenter d'adapter leurs dispositifs énergétiques en place (en particulier la corrélation entre les prix du gaz et de l'électricité).

Voilà l'ambiance pour démarrer cette nouvelle semaine boursière alors que la précédente s'est terminée de façon un peu curieuse. L'Europe a vigoureusement rebondi après cinq séances consécutives de baisses. Les Etats-Unis ont fait mine de prendre le même chemin, mais les indices ont commencé à glisser en milieu de séance, pour finir autour de leurs plus bas du jour, en baisse relativement marquée (-1,1% pour le S&P500). Et je vous le donne Emile, comme diraient Coluche et San Antonio, un seul secteur a grimpé : celui de l'énergie. Aujourd'hui, le vieux continent n'aura pas à se préoccuper du nouveau monde : Wall Street est fermée pour un jour férié.

En Asie Pacifique, les indices évoluent dans des bornes relativement étroites ce matin. Le Japon est à l'équilibre et l'Australie gagne quelques points. Le marché le plus attaqué est Hong Kong, où les valeurs technologiques s'enfoncent et font reculer le Hang Seng de 1,3%. Les indicateurs avancés des marchés européens sont pour leur part fermement ancrés dans le rouge, un mouvement d'autant plus marqué qu'ils ont terminé en hausse vendredi alors que Wall Street a décroché à la clôture. Le CAC perdait 1,8% à 6050 points peu après l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

Les indices PMI finaux d'août pour les services sont publiés tout au long de la journée, à partir de 02h30 au Japon et jusqu'à 10h30 au Royaume-Uni. Jour férié oblige, il sera publié mardi aux Etats-Unis. Les investisseurs attendent aussi les ventes de détail européennes (11h00). Tout l'agenda macro ici.

L'euro reste sous pression à 0,9914 USD. L'once d'or remonte à 1712 USD. Le pétrole évolue en légère hausse, avec un Brent de Mer du Nord à 94,76 USD le baril et un brut léger américain WTI à 88,53 USD. Le rendement de la dette américaine à 10 ans se calme à 3,19%, tandis que le 2 ans atteint 3,50%. Le bitcoin a reculé autour de 19739 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Admicom : Inderes passe d'acheter à accumuler en visant 65 EUR.
  • Aker Solutions : Pareto Securities passe de conserver à acheter en visant 45 NOK.
  • Alpha FX : Liberum reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 2380 à 2425 GBp.
  • Betsson : Deutsche Bank passe de vendre à conserver en visant 64 SEK.
  • Biomérieux : Société Générale passe d'acheter à conserver en visant 101 EUR.
  • Bouygues : JP Morgan reste à surpondérer avec un objectif réduit de 44 à 43 EUR.
  • Brenntag : Oddo BHF passe de neutre à surperformance en visant 97 EUR.
  • Corbion : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 36 à 32 EUR.
  • Deutsche Lufthansa : Société Générale passe de conserver à acheter en visant 7,90 EUR.
  • Don't Nod : Portzamparc reste à l'achat avec un objectif relevé de 16,10 à 16,60 EUR.
  • SES-imagotag : Berenberg démarre le suivi à l'achat en visant 140 EUR.
  • Tyman : Berenberg passe d'acheter à conserver en visant 250 GBp.
  • Yara : Morgan Stanley passe de surpondérer à pondération en ligne en visant 470 NOK.

En France

Annonces importantes (et moins importantes)

  • ArcelorMittal réduit la voilure en Europe en fermant deux haut-fourneaux, sur fond de hausse du prix de l'énergie et de baisse de la demande.
  • Frédéric Oudéa remplacera Serge Weinberg à la présidence non exécutive de Sanofi.
  • En Allemagne, Thales prépare le train autonome dans un autorail rétro.
  • Alstom construira dix trains pour relier Barcelone et El Prat pour 177 M€.
  • La CMA britannique étudie l'impact du rachat de LeasePlan par ALD sur la concurrence.
  • Canal+ (Vivendi) appelle le gouvernement à convaincre TF1 sur la TNT gratuite.
  • OSE Immunotherapeutics présente de nouvelles données sur Tedopi dans l'essai clinique de phase III à la conférence ESMO 2022.
  • Eric de Poncins remplace Bruno Schoch à la président d'Unibel.
  • DBT se dote d'un laboratoire pour les bornes EV.
  • Feu vert au transfert de 2CRSi sur Euronext Growth.
  • Metavisio signe un accord de distribution en Scandinavie.
  • Delfingen a publié ses comptes.

Dans le monde

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Le conseil d'administration de Volkswagen se réunit lundi pour trancher sur l'IPO Porsche. Le constructeur s'apprête à vendre 25% de sa participation dans Porsche à son principal actionnaire dans le cadre de l'opération.
  • UBS abandonne son projet de rachat de Wealthfront, une opération à 1,4 Md$.
  • Logitech veut lancer une console de jeux avec Tencent.
  • Costar et Invitation Homes vont entrer dans le S&P500 aux dépens de PVH et Peen Entertainement. Advanced Micro Devices remplace DuPont dans le S&P100.
  • Crédit Suisse pourrait considérablement réduire la voilure en banque d'investissement, en particulier aux Etats-Unis (SonntagsZeitung).
  • Le directeur financier de Bed Bath & Beyond a fait une chute mortelle du 18e étage d'un gratte-ciel de New York.
  • Israël va interdire en mars 2023 les B747 et d'autres quadrimoteurs pour des raisons environnementales.
  • Bayer va payer 40 M$ pour mettre un terme à des actions en justice aux Etats-Unis concernant de présumés pots-de-vin et fausses déclarations liées aux médicaments Trasylol, Avelox et Baycol.
  • Vistry va racheter Countryside en cash et en titres.
  • Ford Motor enregistre une hausse de 27% des ventes de véhicules aux États-Unis en août.
  • La Comco suisse a lancé une enquête contre Fresenius Kabi (Fresenius) sur une éventuelle infraction à la loi sur les cartels.
  • Samsung révèle que certaines données de clients américains ont été exposées lors d'un piratage en juillet.
  • Le fabricant de yaourts grecs Chobani annonce son IPO à Wall Street.
  • Principales publications du jour : D'Ieteren, Dechra Pharma, Burkhalter… Tout l'agenda ici.

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