(Actualisé avec déclarations de Boris Johnson)

par Michel Rose et Elizabeth Piper

CARBIS BAY, Angleterre, 12 juin (Reuters) - Le Royaume-Uni fera "tout ce qui est nécessaire" pour préserver son intégrité territoriale dans le différend commercial qui l'oppose à l'Union européenne au sujet de l'Irlande du Nord, a déclaré samedi Boris Johnson, menaçant de prendre des mesures d'urgence en l'absence de compromis.

Depuis la sortie effective du Royaume-Uni de l'UE en début d'année, les relations entre Britanniques et Européens se sont tendues, chaque camp accusant l'autre de mauvaise foi dans l'application de l'accord de Brexit, notamment au sujet du protocole nord-irlandais.

Les entretiens organisés en marge du sommet du G7 se déroulant ce week-end dans le sud-ouest de l'Angleterre ne semblent pas avoir permis de rapprocher les points de vue.

"Je pense que nous pouvons régler cela (...) C'est à nos amis et partenaires de l'UE de comprendre que nous ferons tout ce qui est nécessaire", a dit Boris Johnson à Sky News.

"Je pense que si le protocole continue d'être appliqué de cette manière, alors nous n'hésiterons évidemment pas à recourir à l'article 16", a ajouté le Premier ministre britannique, en référence à une clause de sauvegarde permettant à chacune des parties de prendre des mesures si elle juge que l'accord engendre des difficultés économiques, sociales ou environnementales.

"J'ai parlé à certains de nos amis ici aujourd'hui, qui semblent ne pas comprendre que le Royaume-Uni est un seul pays, un seul territoire. Je dois juste leur faire rentrer ça dans la tête", a poursuivi Boris Johnson après avoir rencontré successivement le président français Emmanuel Macron, la chancelière allemande Angela Merkel et, ensemble, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président du Conseil européen Charles Michel.

Le chef du gouvernement britannique a une nouvelle fois réclamé des solutions urgentes, innovantes et pragmatiques.

MACRON PROPOSE UN "RESET"

Côté européen, les dirigeants disent avoir insisté auprès de Boris Johnson sur le fait qu'ils attendaient de sa part un respect total de l'accord sur le Brexit, difficilement conclu après des années de négociations, soulignant que les Vingt-Sept étaient parfaitement unis sur ce point.

"Les deux parties doivent appliquer ce sur quoi nous nous sommes mis d'accord", a dit Ursula von der Leyen. "Il y a une unité européenne complète là-dessus."

Boris Johnson a repoussé unilatéralement en mars l'instauration de contrôles douaniers sur certaines marchandises expédiées de Grande-Bretagne vers l'Irlande du Nord. Ces contrôles ont été prévus par un protocole intégré dans l'accord sur le Brexit afin de préserver le marché unique européen tout en évitant le rétablissement d'une frontière physique entre l'Irlande, toujours membre de l'UE, et l'Irlande du Nord.

Cette solution a cependant contribué à raviver les tensions entre les différentes communautés d'Irlande du Nord, les unionistes refusant tout différence de traitement avec le reste du Royaume-Uni. Ce réveil des tensions communautaires fait craindre une remise en cause de l'accord de paix dit du "Vendredi saint", qui a mis fin à plusieurs décennies de violences dans la province entre unionistes protestants et nationalistes catholiques.

Emmanuel Macron a été ces dernières semaines l'un des critiques les plus explicites de l'attitude du gouvernement britannique, lui reprochant encore jeudi un manque de "sérieux" tout en insistant sur le fait que "rien n'est renégociable, tout est applicable".

Lors de sa rencontre avec Boris Johnson samedi à Carbis Bay, le président français a proposé un "réengagement" dans les relations entre la France et la Grande-Bretagne si le Premier ministre britannique respecte les accords sur le Brexit conclus avec l'Union européenne.

"Le président de la République s'est dit prêt à engager un 'reset' des relations franco-britanniques", a fait savoir l'Elysée. "(Il) a cependant fortement souligné que ce réengagement imposait que les Britanniques respectent la parole donnée aux Européens et le cadre défini par les accords Brexit."

Cette interprétation de la rencontre entre les deux hommes a été contestée par Londres. "Ce n'est pas ainsi que je caractériserais la rencontre de ce matin", a dit un porte-parole de Boris Johnson. "Le Premier ministre et le président Macron sont convenus de la nécessité d'approfondir la relation bilatérale entre le Royaume-Uni et la France (...) Il n'y a eu aucune condition posée à ce sujet relative au protocole (nord-irlandais)." (Avec William James version française Bertrand Boucey)