Washington (awp/afp) - Le président de la Fed Jerome Powell a une nouvelle fois balayé les inquiétudes sur une résurgence de l'inflation et préconisé la patience avant toute modification de la politique monétaire ultra-accommodante de la Banque centrale américaine, ce qui a affolé les marchés et fait plonger Wall Street.

"Nous n'avons pas l'intention de rehausser les taux d'intérêt avant que ces conditions soient remplies", a déclaré Jerome Powell, faisant référence au double mandat de la Fed de stabilité des prix et de plein emploi.

Les taux vont donc rester encore un moment dans la fourchette de 0 et 0,25%, dans laquelle ils ont été abaissés il y a un an.

Idem pour les achats d'actifs, il n'est pas encore temps de modifier le programme.

Lorsque le moment sera venu de resserrer la politique monétaire, la communication sera faite largement en amont, "nous n'allons pas surprendre les gens avec ça", a-t-il souligné lors d'une conférence organisée par le Wall Street Journal.

Car, malgré les espoirs d'une amélioration de la situation économique, portés par les vaccinations menées à tour de bras et par les aides financières à venir du gouvernement, le chemin est encore long, selon lui.

Pas de plein emploi pour 2021

Sur l'emploi, premier élément du mandat de la Fed, Jerome Powell a tempéré l'optimisme ambiant: "Je pense qu'il est tout à fait improbable que nous atteignions le plein emploi cette année, je pense qu'il faudra du temps pour y arriver".

L'autre élément à atteindre est une inflation de 2% sur le long terme. Là encore, le pays en est loin, a-t-il dit, malgré les craintes d'une hausse des prix à partir du printemps, et d'un retour d'une inflation trop forte.

"Il y a une différence entre une hausse des prix ponctuelle et une inflation galopante (...) année après année après année", a-t-il répété, comme il le fait depuis plusieurs semaines maintenant que le sujet agite les marchés.

Les vaccinations aux Etats-Unis et les milliers de milliards de dollars du plan de relance de Joe Biden qui viendront s'ajouter aux précédentes aides financières font anticiper une forte reprise économique à partir du printemps.

La consommation devrait bondir, et la situation de l'emploi s'améliorer. Pas assez cependant pour retrouver les niveaux pré-pandémiques, lorsque l'emploi était au meilleur de sa forme en 50 ans.

Terminer le travail

Ces déclarations du patron de la Fed ont fait bondir les rendements obligataires sur les bons du Trésor à 10 ans, dépassant 1,55% au lieu de 1,48% la veille. Le dollar a lui grimpé à son plus haut niveau depuis un mois, et Wall Street a lourdement chuté.

Une fois de plus, "alors que les marchés s'attendaient peut-être à ce que la Fed réagisse à cette montée des taux (...), elle a au contraire embrassé l'idée que les rendements montent à cause des perspectives économiques positives", a expliqué à l'AFP Mazen Issa de TD Securities.

"Cela alimentera la conviction que la direction de la Fed n'est pas trop préoccupée par le nouveau niveau des rendements", a commenté Krishna Guha, économiste pour Evercore, dans une note.

Jerome Powell a aussi défendu les 1.900 milliards de dollars du plan de relance de Joe Biden, jugés trop généreux par une partie des élus et économistes, et considérés comme le déclencheur possible d'une inflation trop élevée.

Ce plan est en train d'être voté au Congrès, et pourrait être définitivement adopté la semaine prochaine.

"Ne vous arrêtez pas tant que le travail n'est pas terminé", a-t-il plaidé, notant que "dans la dernière crise, la politique budgétaire a reculé et s'est affaiblie. Et cela a conduit à une très longue et lente reprise".

La prochaine réunion du comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) aura lieu les 16 et 17 mars.

afp/jh