Benjamin Franklin se plaisait à dire « When the well's dry, we know the worth of water » (en français : « C'est quand le puits est sec que l'eau devient richesse »). Bien que, depuis plusieurs années, des sonnettes d’alarmes ont été tirées concernant ce problème, il semble être encore sous-estimé. Ainsi, à plus ou moins long terme, lorsqu’une réelle prise de conscience aura lieu, les industries liées aux ressources hydriques risquent de connaitre un puissant essor.
 
L’eau, ressource limitée, est essentielle à la vie
Même si ce point semble a priori trivial, il est important de le rappeler : l’eau est essentielle à la vie. De ce fait, avec l’air, c’est la seule commodité à avoir une valeur intrinsèque infinie. D’une part, elle n’a aucun substitut possible. D’autre part, Il est impossible d'augmenter l'offre d'eau disponible : il y aura toujours 1.4 milliard kilomètres cubes d’eau sur terre[1]. Parmi cette quantité, seulement 0.014% est de l’eau potable accessible facilement.
 
Toujours plus de monde sur terre
Actuellement, nous sommes environ 7 milliards d’individus sur Terre et déjà certains meurent de soif. D’ici 2030, nous serons 8.32 milliards et 9.31 milliards en 2050[2]. Cette croissance démographique fait fortement pression sur la demande d’eau potable. Nous en avons besoin pour boire, mais aussi pour l’agriculture, pour l’industrie, pour l’utilisation domestique, etc.




La première carte ci-dessus illustre les réserves « brutes » d’eau dans le monde. La deuxième montre les ressources exploitées grâce aux infrastructures en place[3].
Par exemple, la France, en rouge sur la première et en vert sur la deuxième, dispose de peu de ressources brutes mais de part ses infrastructures parvient à les exploiter au mieux pour ne pas connaitre de pénurie en eau.
A l'inverse, Madagascar, en vert sur la première carte et en jaune sur la deuxième, dispose de ressources suffisantes mais n'a pas les capacités pour les exploiter.

 

 
Une balance déséquilibrée
Ainsi, il existe un déséquilibre entre l’offre limitée et la demande croissante d’eau potable. Dans le même sens, certaines régions du monde disposent de ressources excédentaires alors que d’autres connaissent de larges pénuries. Pour essayer de rééquilibrer la balance, de nombreuses technologies se développent pour exploiter de nouvelles sources. Un des moyens envisagés est le dessalement de l’eau de mer. Même si ce secteur est en forte croissance, il reste très gourmand en énergie et a comme défaut de polluer de manière conséquente. Un autre moyen, plus porteur sûrement, est le traitement des eaux usées et polluées car il est moins couteux. Cependant, pour ce faire, il faut déjà disposer d’eau non salée, ce qui explique que les pays de Moyen-Orient préfèrent investir dans la première technologie.
Quoiqu’il en soit, le prix de l’eau potable est appelé à augmenter : soit la pression de la demande impacte les prix à la hausse ; soit les nouvelles technologies utilisées ont des coûts élevés qui se répercutent sur le prix de l’or bleu.
 
Comment investir dans l’eau ?
Il existe de nombreuses façons d’être exposé aux industries reliées de près ou de loin à l’eau. Pour faire plus simple, nous allons décomposer en trois compartiments les investissements possibles : les services reliés à l’eau, les distributeurs d'eau en bouteilles et les ETF indexés sur l’industrie de l’eau.

Les services liés à l’eau consistent à la collecte, au traitement et à la distribution de celle-ci. C’est donc un secteur très large. En 2010, il représentait 657 milliards de dollars[4]. Les analystes anticipent une accélération de la croissance jusqu’en 2015 avec un taux annuel moyen de 4.6% pour atteindre 824.3 milliards de dollars. En Europe, les deux grands acteurs sont Veolia et Suez. Il y a aussi United Utilities au Royaume-Uni. Pour les investisseurs qui préfèrent le continent américain, Flowserve ou ITT sont des options à envisager. Enfin, des entreprises comme Guangdong Investment en Asie peuvent performer.
L’industrie des bouteilles d’eau offre aussi de belles perspectives. En 2010, elle générait 99.3 milliards de dollars. Les analystes prévoient une croissance supérieure à 27% d’ici 2015. Le marché est largement dominé par de grands groupes comme Danone (14.1% de part de marché), Nestlé (13.6%) ou Coca-Cola (8.4%). La concurrence reste très féroce puisque l’eau est la même dans toutes les bouteilles.
Enfin, les investisseurs peuvent aussi s’intéresser aux ETF indexés sur l’industrie de l’eau. Ceux-ci permettent de diversifier le risque et d’investir plus simplement dans cette commodité. Il existe un grand nombre d’ETF dans ce domaine. Invesco PowerShares en propose, tout comme Pictet, First Trust ou encore Guggenheim Investment.

 

Ci-dessus un graphique qui illustre les performances du MSCI World Index (en jaune) et du MSCI World Water Utilities Index (en blanc).
 

Ainsi, l’eau est le nouvel or, bleu, des années à venir. Investir dans celui-ci s’inscrit dans une stratégie à long-terme qui pourrait s’avérer grandement payante.
Aujourd’hui, nous pouvons déjà spéculer sur le CO2 avec la Bourse du Carbone Européenne (EU ETS). A quand celui du H2O ?


[1] "How much do we have?”, ec.gc.ca
[2] "World Urbanization Prospects", ONU
[3]Global threats to human water security and river biodiversity”, Nature journal
[4] "Global Water Utilities", Datamonitor