La réduction du nombre de sociétés non-domestiques cotées à Paris est un mouvement de fond. L'AMF a constaté depuis longtemps une "baisse continue et marquée du degré d’internationalisation de la cote parisienne depuis le milieu des années 1990" (Demartini (2008) : "Peut-on réellement parler d’attrition de la cote parisienne ? Le cas des marchés réglementés entre 1999 et 2006", Lettre économique et financières, AMF, Printemps). Une évolution qui s'explique en partie par les radiations, un phénomène qui n'a pas ralenti ces dernières années. A tel point que la proportion de sociétés étrangères est passée de 21 à 9% en 15 ans à la Bourse de Paris (de 1995 à 2010). Le tableau qui suit, tiré d'une autre étude plus récente d'Anne Demartini pour l'AMF, montre bien cette évolution (comparable à celle de Francfort) et le développement concomitant des places anglo-saxonnes sur la thématique des actions internationales. Il faut toutefois noter qu'une grosse vague de radiations a eu lieu en 2010 parmi les foncières cotées étrangères à cause d'une évolution réglementaire qui ne subordonnait plus les bénéfices du statut SIIC à une cotation dans l'hexagone, ce qui a contribué à accentuer le déclin.
 

L’évolution des radiations de sociétés cotées en France (2006-2010) Anne Demartini Département des Etudes, AMF
 
L'attrition est manifeste pour les grandes entreprises, notamment anglo-saxonnes. En date du 24 juin 2019 et en tenant compte du départ d'Hexcel, la liste des grandes valeurs américaines cotées à Paris se réduit à cinq noms : Caterpillar, General Electric, IFF, Eli Lilly et Merck. On peut y ajouter Schlumberger, malgré une immatriculation aux Antilles Néerlandaises. Les autres grosses capitalisations étrangères cotées à Paris sont peu nombreuses, si l'on excepte les entreprises qui ont de fortes attaches en France mais sont immatriculées dans certains pays pour des raisons fiscales, juridiques ou historiques (par exemple Airbus et STMicroelectronics aux Pays-Bas, Solvay en Belgique, Nokia en Finlande, LafargeHolcim en Suisse ou Aperam et ArcelorMittal au Luxembourg). Outre les six dossiers américains précités, on retrouve le groupe minier brésilien Vale, le spécialiste des spiritueux britannique Diageo et la banque HSBC. Soit un total de neuf noms. Ces dernières années, plusieurs entreprises internationales ont quitté la cote parisienne, comme Ford, Philip Morris, Procter & Gamble ou AbbVie. Les raisons des départs sont à peu près identiques à chaque fois : volumes d'échanges faibles et coût en argent et en temps pour faire vivre cette double cotation. L'internationalisation et la dématérialisation des échanges ne justifient plus cette présence "physique". Pour cette raison, l'argument d'un accès aux investisseurs locaux ne tient plus vraiment. Quant aux introductions en bourse, elles se font rares, surtout sur les gros dossiers. 
 
Le tableau qui suit montre les sociétés qui affichent un code ISIN non français (c’est-à-dire ne commençant pas par "FR") cotées sur le marché réglementé d'Euronext Paris (hors Euronext Access et Euronext Growth). Avant le départ d'Hexcel, la liste compte 39 noms, avec 8 codes américains (en comptant Vale, qui possède un code US mais reste un groupe brésilien), ce qui en fait le pays le plus représenté devant la Belgique (7 sociétés) et les Pays-Bas (5 sociétés, mais comptant parmi elles Airbus, STMicroelectronics, Euronext et Cnova). Les valeurs étrangères cotées sur le marché réglementé d'Euronext ne représentent donc que 7,7% du total des actions cotées à Paris sur les marchés réglementés (492 titres selon notre pointage à partir de la base de données Euronext).
 

Si l'on ajoute les sociétés cotées sur Euronext Growth (ex-Alternext) et Euronext Access (ex-Marché Libre), le total de lignes de cotations étrangères à Paris atteint 96 entreprises, avec de fortes présences belge (17), italienne (11) et suisse (9). Cela représente 11,2% des 858 actions que nous avons recensées. Ces marchés attirent encore des entreprises frontalières qui cherchent à se donner des ressources additionnelles et de la visibilité dans un cadre juridique peu contraignant. Des besoins que n'ont évidemment plus les Ford et autre Procter & Gamble, ce qui explique la part grandissante de petites entreprises dans la poche de valeurs étrangères cotées à Paris... et la disparition progressive des anciens piliers du compartiment des valeurs étrangères.