Londres (awp/afp) - La Banque d'Angleterre a relevé son taux directeur à 4%, au plus haut depuis 2008 pour contrer une inflation tenace au Royaume-Uni, mais a ouvert la voie à la fin du cycle de resserrement.

D'une ampleur d'un demi-point de pourcentage, c'est le 10e tour de vis successif décidé par l'institut monétaire.

"S'il y a des preuves de pressions (inflationnistes) persistantes, alors de nouveaux tours de vis de la politique monétaire seraient nécessaires", affirme la BoE dans les minutes publiées jeudi de sa dernière réunion.

Une promesse d'action au conditionnel alors que la BoE évoquait en décembre simplement s'attendre à de nouvelles hausses.

La BoE, dont les taux n'ont pas été aussi élevés depuis fin 2008 dans le sillage de la grande crise financière, fait face à un dilemme partagé par de nombreux pays dans le monde.

L'inflation ralentit mais reste à des niveaux historiquement élevés, très au-delà de l'objectif de 2% des banques centrales et alimentant une crise du coût de la vie, tandis que l'économie s'essouffle.

La Réserve fédérale américaine (Fed) a remonté ses taux de seulement 0,25 point mercredi, et la Banque centrale européenne (BCE) devrait comme la BoE opter pour une hausse de 0,5 point plus tard dans la journée, selon les analystes.

Ce choix cornélien est exacerbé au Royaume-Uni, seule grande économie mondiale qui devra encaisser une récession en 2023 selon le FMI, et où l'inflation dépasse 10%.

Elle est attisée par un marché du travail tendu, notamment en raison du Brexit, mais aussi par les pénuries liées à la pandémie et par la flambée des prix de l'énergie après l'invasion russe de l'Ukraine.

Sans compter les augmentations de salaires, qui inquiètent la BoE.

La crise du coût de la vie a déclenché une vague de mouvements sociaux britanniques qui touche aussi bien les transports que l'éducation ou la santé, pour réclamer de meilleures rémunérations.

Mais vu le léger fléchissement de l'inflation, et la meilleure résistance de l'activité économique qu'anticipé fin 2022, la Banque d'Angleterre embellit un peu ses prévisions.

Elle s'attendait à ce que le Royaume-Uni soit en récession dès fin 2022, et estime finalement que la contraction devrait n'avoir débuté que début 2023 pour durer cinq trimestres.

Les chiffres officiels de l'Office national des statistiques ne seront publiés que le 10 février.

La contraction du produit intérieur brut devrait aussi s'avérer "bien moins profonde" que la BoE ne le prévoyait lors de ses dernières projections, en novembre, d'après son rapport de politique monétaire jeudi: -0,5% en 2023 et -0,25% en 2024.

La faiblesse de l'économie devrait participer, avec la retombée des prix du gaz, à un ralentissement de l'inflation, à 8% en juin, 4% d'ici la fin de l'année et moins de 2% fin 2024, si la BoE monte ses taux en ligne avec les prévisions du marché, qui prévoit un pic à 4,5% mi-2023.

Une stagnation des prix que la BoE ne souhaite pas et qui explique sa prudence dans ses prévisions, même si elle avertit de "risques de surprise à la hausse de l'inflation", si les augmentations de salaires ne poursuivent, ce qui pourrait l'amener à remonter encore ses taux.

Le ministre des Finances britannique Jeremy Hunt a dit "soutenir l'action" de la Banque d'Angleterre face à l'inflation, qui est selon lui "la plus grande menace pour le niveau de vie en une génération".

Le gouvernement s'abstiendra pour sa part "de financer des dépenses supplémentaires ou des réductions d'impôts par l'emprunt, ce qui ne ferait qu'alimenter" les hausses de prix, a-t-il ajouté.

D'après la maison de recherche Pantheon Macro, "les nouvelles prévisions du comité de politique monétaire laissent entendre qu'il pense ne pas avoir besoin de relever plus les taux".

L'ensemble du marché semblait interpréter les déclarations de la BoE à l'unisson et la livre chutait de 0,72% à 1,2287 livre pour un dollar vers 12H50 GMT.

afp/rp