Tokyo (awp/afp) - La Banque du Japon (BoJ) a sondé mercredi des opérateurs du marché des changes, selon la presse locale, une action rarissime renforçant l'éventualité d'une future intervention de Tokyo sur ce marché face à la chute de plus en plus préoccupante du yen.

Interrogé par l'AFP, un porte-parole de la BoJ n'a pas souhaité commenter ces informations du quotidien économique Nikkei.

Un "rate check" de la BoJ consiste à prendre la température auprès des acteurs du marché des changes, a expliqué à l'AFP Toshikazu Horiuchi, analyste de IwaiCosmo Securities.

"C'est en quelque sorte un dernier avertissement avant une intervention" de l'Etat sur le marché des changes, a-t-il ajouté.

Le yen s'est effondré cette année face au dollar, qui évolue au-delà de 140 yens depuis la semaine dernière contre 115 yens en mars.

La monnaie nippone est à son plus bas niveau face au dollar depuis 24 ans, un phénomène notamment dû au décalage grandissant entre le durcissement accéléré de la politique monétaire aux Etats-Unis contre l'inflation et le maintien d'une politique monétaire ultra-accommodante au Japon, où la hausse des prix est moins marquée.

Le "rate check" de la BoJ a eu pour effet immédiat de soutenir le yen: un dollar s'échangeait pour 143,25 yens à 11H00 GMT, alors qu'il avait frôlé la barre symbolique des 145 yens en début de séance en Asie mercredi, au lendemain d'un indice d'inflation CPI plus fort que prévu en août aux Etats-Unis.

Le gouvernement japonais multiplie de nouveau ces derniers jours des déclarations visant à calmer la tempête sur le yen.

Si la situation actuelle persiste, "des mesures qui s'imposent seront prises sur le marché, avec toutes les options sur la table", a ainsi réaffirmé mercredi soir à Tokyo le ministre des Finances Shunichi Suzuki, tout en refusant d'évoquer le "rate check" de la BoJ.

Une intervention directe du Japon, en vendant des dollars issus de ses réserves de change pour acheter du yen, semble toutefois compliquée à mettre en oeuvre, car cela nécessiterait une concertation préalable avec Washington, et le succès de la manoeuvre ne serait pas garanti pour autant, préviennent nombre d'analystes.

La dernière intervention de Tokyo sur le marché des changes remonte à 2011, et l'opération était dans le sens inverse: acheter des dollars contre des yens pour faire baisser le cours de sa monnaie.

Quant au précédent "rate check" de la BoJ, en 2016, il n'avait pas été suivi d'effet.

La chute actuelle du yen a un effet à double tranchant pour le Japon: cela gonfle en théorie les revenus générés à l'étranger des entreprises nippones quand ces dernières les rapatrient, mais cela pèse sur les importations du pays, qui flambent actuellement à cause de l'envolée des prix de l'énergie et de produits alimentaires sur fond de la guerre en Ukraine.

Cela fragilise le pouvoir d'achat des ménages nippons et risque ainsi de freiner la reprise économique du pays.

La Banque du Japon, dont une décision de politique monétaire est attendue le 22 septembre, continue à affirmer pour l'instant que la hausse des prix à la consommation dans l'archipel (+2,4% hors produits frais en juillet sur un an, un nouveau niveau record depuis fin 2014) n'est que transitoire car essentiellement liée au fort renchérissement des importations.

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