SOUTHAMPTON, 10 juin (Reuters) - La Banque d'Angleterre (BoE) aura probablement besoin de relever ses taux plus tôt qu'anticipé par les marchés financiers, a indiqué lundi Michael Saunders, membre du comité de politique monétaire de la banque centrale, s'alignant ainsi sur les propos restrictifs inattendus tenus samedi par l'économiste en chef de la BoE.

Michael Saunders, qui a été le premier des membres du comité de politique monétaire à voter pour une hausse de taux en 2018, estime que la BoE n'a pas forcément besoin d'attendre que les incertitudes entourant la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne soient levées pour procéder à un relèvement de ses taux d'intérêt.

"Nous aurons probablement besoin de revenir à quelque chose comme une biais neutre plus tôt que prévu par les marchés", a-t-il dit lors d'un discours à l'Institut des directeurs de l'Université Solent de Southampton.

"Je voudrais faire remarquer que le comité de politique monétaire n'a pas nécessairement besoin de laisser les taux inchangés jusqu'à ce que toutes les incertitudes sur le Brexit soient résolues", a-t-il ajouté, soulignant que la BoE a relevé deux fois ses taux - en novembre 2017 et août 2018 - depuis que les Britanniques ont voté pour une sortie de leur pays de l'Union européenne en juin 2016.

Les marchés financiers anticipent actuellement une baisse des taux de la BoE plutôt qu'une hausse dans l'année à venir, en raison des signes de ralentissement économique lié aux tensions commerciales internationales et du ton accommodant adopté par la Réserve fédérale américaine.

Les propos de Michael Saunders font écho à ceux d'Andy Haldane, l'économiste en chef de la BoE, qui a écrit samedi dans un éditorial paru dans le Sun que l'heure était proche "où une légère hausse de taux serait prudente afin d'étouffer tous risques inflationnistes dans l'œuf".

La BoE annoncera sa prochaine décision de politique monétaire le 20 juin.

Michael Saunders a précisé qu'il n'essayait pas de signaler comment il voterait à une réunion particulière et qu'il porterait une attention particulière aux données économiques à venir.

Les derniers indicateurs ont montré un tableau plutôt morose de l'économie britannique : les chiffres officiels parus lundi ont montré que le produit intérieur brut (PIB) du Royaume-Uni a reculé de 0,4% en avril, sa plus forte baisse depuis mars 2016, en raison d'une chute de la production automobile.

Pour Michael Saunders, cette baisse de l'activité économique ne constitue pas une surprise pour la BoE, après un premier trimestre qui avait été tiré par la constitution de stocks importants avant la date initiale limite pour le Brexit qui était fixée au 29 mars et qui a été ensuite décalée au 31 octobre.

"Nos prévisions internes étaient sur des chiffres plutôt faibles en avril, et les chiffres d'avril sont faibles", a-t-il dit lors d'une séance de questions-réponses à l'issue de son discours.

Le ralentissement économique mondiale "s'avérera être un autre mini-cycle avec un rebond modéré durant cette année" en dépit des tensions commerciales, a-t-il ajouté.

L'investissement des entreprises devrait aussi se renforcer une fois que les modalités du Brexit seront connues, a dit le responsable de la banque centrale.

Il serait dangereux d'attendre que tous les signaux sur l'inflation, que ce soit sur les salaires, les prix et d'autres parties de l'économie soient au "rouge clignotant" avant de relever à nouveau les taux.

"Une telle approche rendrait moins probable le fait que le resserrement soit limité et graduel et plus probable le fait que l'économie souffrirait d'un ajustement douloureux", a dit Michael Saunders.

(David Milliken, Blandine Hénault pour le service français)