Destinées à doper une croissance économique pénalisée par le ralentissement de la croissance et la montée de l'inflation, ces réformes pourraient permettre à des groupes comme Wal-Mart ou Carrefour d'ouvrir des magasins en Inde avec un partenaire local et de vendre directement aux consommateurs, pour la première fois dans l'histoire du pays.

Le Premier ministre, Manmohan Singh, a également donné son aval à une politique d'ouverture des compagnies aériennes indiennes aux investissements étrangers et de cession de participations au capital des grandes entreprises contrôlées par l'Etat.

Pour les économistes de Deutsche Bank, ces mesures constituent à la fois "un énorme signal, symbolique de la volonté de réforme du gouvernement, et une prise de conscience de la nécessité urgente de faire passer pour l'instant l'économie avant la politique".

Les débats entourant ces réformes ont provoqué des tensions au sein de la coalition gouvernementale menée par le Parti du Congrès de Manmohan Singh, certains de ses alliés redoutant leurs conséquences sur le plan électoral.

Les analystes se montrent donc prudents, rappelant que l'Inde est déjà revenue par le passé sur des annonces de réformes.

"Toute marche arrière serait désastreuse", prévient Sudip Bandyopadhyay, directeur général de Destimoney Securities à Bombay. "L'application des mesures de réformes sera déterminante pour les marchés à partir de maintenant."

"PAS LA PANACÉE"

Le gouvernement a présenté ces réformes au lendemain de l'annonce d'une forte hausse des prix de l'essence, censée réduire le déficit budgétaire.

Il entend notamment permettre aux distributeurs étrangers de prendre jusqu'à 51% dans les supermarchés indiens, une mesure déjà promise l'an dernier mais à laquelle il avait renoncé en décembre en raison de l'opposition politique qu'elle avait suscitée.

Cette mesure, qui concerne un marché estimé à 340 milliards d'euros, pourrait soulager des distributeurs indiens fortement endettés. Mais elle est assortie à un certain nombre de conditions et les différents Etats indiens conserveront leur droit de regard en matière d'approbation des investissements étrangers.

"Les investissements étrangers directs (FDI) sont une mesure positive, mais ce n'est pas la panacée pour le secteur", estime Macquarie Capital Securities India dans une note datée de vendredi.

"Même les groupes disposant de finances solides n'ont pas été capables de développer leur activité de distribution rapidement. De même, malgré son expérience mondiale, Wal-Mart n'a pas dégagé de bénéfices en Chine au cours des douze dernières années."

Les experts s'attendent à ce que les réformes bénéficient en particulier à Future Group, qui cherche depuis un moment un partenaire étranger pour réduire sa dette de 367,55 millions de dollars (280,63 millions d'euros).

Future contrôle notamment la première chaîne d'hypermarchés indiens, Big Bazaar et détient également une participation dans le distributeur Pantaloon Retail India, qui gagnait plus de 20% à 8h50 GMT.

PEU DE COMPAGNIES AÉRIENNES INTÉRESSÉES

La Bourse de Bombay (BSE) progressait au même moment de 0,71% après avoir atteint son plus haut niveau depuis le 26 juillet 2011 et elle s'acheminait vers une neuvième clôture consécutive dans le vert.

Deutsche Bank et Citigroup ont chacun de leur côté revu à la hausse leur objectif pour l'indice boursier BSE en expliquant tabler sur une accélération des investissements étrangers.

Parmi les autres bénéficiaires potentiels des réformes figurent le distributeur Shoppers Stop (+9,55%) ainsi que les compagnies aérienne SpiceJet (+13,19%) et Kingfisher Airlines (+19,91%).

Très peu de compagnies aériennes étrangères ont toutefois manifesté pour le moment leur intérêt pour le marché indien, même si une porte-parole de SpiceJet a assuré la semaine dernière à Reuters que la société avait entamé des discussions préliminaires avec des compagnies du Golfe.

"Il est trop tôt pour présumer que les compagnies étrangères vont payer une prime significative pour investir (en Inde) vu les difficultés de fond (du secteur)", prévient la banque JP Morgan dans une note datée de lundi.

Parallèlement, la roupie indienne a atteint son plus haut depuis quatre mois, dopée par l'anticipation de flux de capitaux étrangers.

La banque centrale indienne a laissé lundi ses taux d'intérêt inchangés, le principal d'entre eux restant fixé à 8%, mais elle a abaissé le taux de réserves obligatoires des banques, en expliquant que la lutte contre l'inflation restait sa priorité.

L'indice des prix de gros indiens a progressé de 7,55% sur un an en août, tiré notamment par les prix alimentaires.

Marc Angrand et Tangi Salaün pour le service français

par Nandita Bose et Anurag Kotoky