Ne comptez pas sur moi pour vous expliquer ce qui se passe cette semaine sur les marchés actions, je n'y comprends rien. Ah si, il y a quand même quelque chose que j'ai saisi, c'est le fait que le baril de pétrole tend plus vers 100 USD que 200 USD et, surtout, le changement radical de ton de la Chine vis-à-vis de son soutien à l'économie. Depuis plusieurs trimestres et jusqu'à avant-hier, Pékin pratiquait une politique de harcèlement systématique contre les secteurs qui prenaient un peu trop de largesse avec la ligne du parti. Un bon ramponneau dans la mâchoire des géants technologiques trop envahissants. Un gros bourre-pif dans la face des promoteurs immobiliers aux pieds d'argile. Ou une jolie beigne quand les producteurs de métaux faisaient flamber les prix. Mais hier, le parti communiste chinois a totalement inversé son discours en se montrant d'une ouverture d'esprit un peu suspecte sur l'immobilier, la technologie et plus globalement le soutien économique. C'est ce qui a alimenté un spectaculaire rebond des indices hier en Chine continentale et à Hong Kong, et continue à le faire aujourd'hui.

Le retour d'une attitude moins punitive et plus constructive de Pékin était attendu depuis longtemps par les investisseurs, qui y voyaient, sans doute à raison, un bon relais à l'essoufflement de la dynamique économique occidentale. Nous y sommes peut-être et cela pourrait constituer ce que les anglosaxons appellent un "game-changer". En tout cas, cela contribue à regonfler l'appétit des investisseurs pour le risque, parce qu'il n'y a pas beaucoup d'autres raisons de s'enthousiasmer par ailleurs. La guerre en Ukraine crée une incertitude supplémentaire dans de nombreux domaines, en renforçant les pressions inflationnistes.

La Fed n'a pas dit autre chose hier, en relevant ses taux d'un quart de point, en réduisant ses prévisions de croissance et en relevant ses projections de hausse des prix. Elle a toutefois rassuré les investisseurs américains en s'employant à paraître sereine face à la situation économique. Les pronostics du marché ont été confortés (sept hausses de taux d'un quart de point cette année) et il n'y pas vraiment eu de signaux de velléités plus va-t-en-guerre de membres du conseil des gouverneurs, qui n'a enregistré qu'une voix dissonante sur huit en faveur d'une hausse d'un demi-point. Bilan, après quelques hésitations, Wall Street est repassé en mode festif en s'adjugeant de gros gains, au diapason des marchés européens un peu plus tôt. En cinq séances, l'Euro STOXX a repris 6,6% (-13% depuis le 1er janvier) et le S&P500 2,2% (-10,6% depuis le 1er janvier).

Moins de croissance, des taux plus hauts, des doutes sur l'inflation… la stagflation a fait un retour remarqué dans le catalogue des risques identifiés par les investisseurs. Tellement remarqué qu'elle est citée par 62% des gestionnaires de fonds interrogés par Bank of America dans son enquête mensuelle, ce qui constitue le plus haut niveau depuis septembre 2008. Si je voulais faire un peu de buzz facile je rappellerais que septembre 2008, c'est le mois de la faillite de Lehman Brothers, mais nous ne serions pas plus avancés. Durant les épisodes de stagflation (c’est-à-dire de croissance faible et d'inflation élevée, pour ceux qui ne suivent pas), les actions qui ont le plus de chances de progresser sont celles qui sont peu risquées, plutôt de grosse taille et qui ont un bon niveau de pouvoir de fixation de prix. Les analystes de BofA ont trouvé 22 titres qui répondent aux critères pour évoluer dans un tel contexte, dont deux français (TotalEnergies et STMicroelectronics) et une suisse (Vifor Pharma).

L'autre enseignement de l'enquête de BofA, le ratio de révision des bénéfices par action à 4 semaines en Europe a reculé à 0,98. Quand le ratio passe sous 1, cela signale qu'il y a plus eu de révisions en baisse que d'augmentations sur la période concernée. Le ratio est plus dégradé que dans d'autres régions "car les analystes intègrent l'impact de la hausse des coûts de l'énergie et d'autres facteurs sectoriels". Les cinq valeurs qui ont connu les plus fortes révisions de perspectives de bénéfices à un an en Europe sont trois valeurs de l'énergie (Equinor, TotalEnergies, Shell) et deux des matières premières (Norsk Hydro, Eramet). Les cinq vilains petits canards sont Alstom (matériel de transport), Asos (consommation), ITV (communication), Admiral (finance) et Rockwool (matériaux de construction).

Dans les jours qui viennent, les marchés risquent de rester tiraillés entre plusieurs tendances. D'abord les craintes que fait peser le contexte économique actuel sur les résultats futurs des entreprises. Et je pense là que les investisseurs n'ont pas encore bien pris la mesure de ce qui est en train de se passer. Ensuite le réveil chinois, qui reste un puissant catalyseur, même s'il n'est pour l'heure que présumé. Enfin bien sûr, la guerre en Ukraine et ses conséquences économiques et géopolitiques.

En ce qui concerne le très court terme, les indicateurs avancés européens sont légèrement haussiers au moment où j'écris et les futures américains sont proches de l'équilibre. La Banque d'Angleterre dévoilera à la mi-journée la teneur de sa politique monétaire, avant une salve d'indicateurs macroéconomiques aux Etats-Unis, où Joe Biden a qualifié Vladimir Poutine de criminel de guerre en parallèle de l'annonce d'envoi de matériel militaire aux forces ukrainiennes. Hier, la Russie n'a pas honoré le paiement de sa dette en dollars, ce qui ouvre la voie aux trente jours habituels de tolérance pour régler la facture. Le CAC40 démarre la séance en hausse de 0,55% à 6624 points.

Les temps forts économiques du jour

Encore une actualité chargée, donc, entre la version définitive de l'indice des prix à la consommation européens de février (11h00), la décision de la Banque d'Angleterre sur ses taux à 13h00, puis aux Etats-Unis l'indice Philly Fed de mars, les nouvelles demandes d'allocations chômage hebdomadaires et les permis de construire de février (13h30), puis la production industrielle de février à 14h15.

La paire euro / dollar se négocie 1,1029 USD, en hausse pour la monnaie unique. L'once d'or se reprend un peu à 1933 USD. Le pétrole se stabilise avec un Brent de Mer du Nord à 100,08 USD et un brut léger américain WTI à 96,78 USD. Le rendement de la dette américaine tient ses pics récents à 2,14% sur 10 ans, pendant que la dette allemande se stabilise à 0,36% sur la même durée. Le bitcoin remonte à 47 000 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Adecco : Exane BNP Paribas passe de neutre à sousperformance visant 39 CHF.
  • Assicurazioni Generali : Kepler Cheuvreux repasse d'acheter à conserver en visant 20 EUR.
  • Befesa : Oddo BHF démarre le suivi à surperformance en visant 78 EUR.
  • Buzzi Unicem : J.P. Morgan passe de neutre à souspondérer en visant 17 EUR.
  • ConvaTec : Berenberg démarre le suivi à l'achat visant 250 GBp.
  • Diageo : J.P. Morgan passe de neutre à surpondérer en visant 4350 GBp.
  • Ericsson : Jefferies reprend le suivi à conserver en visant 90 SEK.
  • HeidelbergCement : J.P. Morgan passe de souspondérer à neutre en visant 60 EUR.
  • Henkel : RBC passe de surperformance à performance sectorielle en visant 67 EUR.
  • Holcim : Credit Suisse réduit son objectif de cours de 65 à 58 CHF.
  • Nestlé : RBC reste à performance sectorielle avec un objectif de cours réduit de 109 à 96 CHF.
  • Nokia : Jefferies reprend le suivi à l'achat en visant 6 EUR.
  • Prosus : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 89 à 55 EUR.
  • Renault : Exane BNP Paribas passe de surperformance à neutre en visant 28 EUR.
  • Rockwool : J.P. Morgan démarre le suivi à souspondérer en visant 1970 DKK.
  • Sika : J.P. Morgan démarre le suivi à neutre en visant 333 CHF.

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