Cette libéralisation aura un impact sur environ 20% des vols quotidiens long-courriers en Chine, selon des données compilées pour Reuters par la société spécialisée chinoise Variflight.

Les compagnies américaines et européennes comme United Airlines et Air France-KLM, dont les coûts sont plus élevés, seront principalement affectées car la demande depuis leur pays d'origine est plus faible et que les clients chinois préfèrent leurs compagnies nationales.

"Les compagnies aériennes nord-américaines et européennes ne font pas le poids face aux transporteurs chinois", dit Corrine Png, directrice générale de Crucial Perspective, une société de conseil en transport basée à Singapour.

Certaines compagnies ont déjà renoncé à des liaisons en Chine. Evoquant une "source de perte colossale" lui coûtant 30 millions de dollars par an, American Airlines a récemment annoncé son intention d'abandonner la liaison Shanghaï-Chicago après avoir déjà supprimé celle reliant Pékin à Chicago.

La règle dite "une liaison, une compagnie aérienne" a été mise en place en 2009; la modifier maintenant est une réponse à l'évolution du marché de l'aviation, a déclaré l'Autorité de l'aviation civile chinoise.

Les liaisons Shanghaï-Paris et Shanghaï-Francfort sont déjà desservies par deux compagnies aériennes chinoises et une troisième pourra s'y ajouter.

AIR FRANCE-KLM ATTENTIF À CETTE ÉVOLUTION

Selon Cong Wei, responsable de l'analyse des données chez Variflight, les compagnies aériennes chinoises transportent environ la moitié des passagers sur les 20 liaisons que Pékin entend libéraliser et leur part de marché est susceptible de croître encore.

Parmi ces 20 liaisons figurent notamment Pékin-Los Angeles et Shanghaï-Londres.

Ces liaisons sont partagées entre les compagnies publiques China Eastern Airlines Corp, China Southern Airlines et Air China, qui sont en concurrence avec des compagnies étrangères telles qu'Air France-KLM, Lufthansa, Air Canada, British Airways, Virgin Atlantic, Air New Zealand, United Airlines, Delta Air Lines et American Airlines.

Une porte-parole d'Air France-KLM a déclaré que la compagnie étudiait ce changement réglementaire mais qu'elle "avait très peu d'influence sur la manière dont cette règle pourrait évoluer".

"La concurrence entre l'Europe et la Chine est déjà présente et s'intensifie", a-t-elle ajouté. "Nous continuons à améliorer nos partenariats actuels pour proposer les produits et services les plus attractifs à des tarifs compétitifs à tous nos clients. C'est sans aucun doute la meilleure réponse à cette éventualité."

Delta Air Lines a déclaré pour sa part que la Chine continuait d'être un marché important à long terme pour son réseau et qu'elle était bien positionnée en raison de son partenariat avec China Eastern.

Air New Zealand a dit avoir pris note des changements à venir et que la compagnie étudiait constamment de nouvelles possibilités de liaisons.

Lufthansa, Air Canada, British Airways, Virgin Atlantic, United Airlines et American Airlines n'ont pas répondu aux sollicitations de Reuters.

MISER SUR LE HAUT DE GAMME ET DES ALLIANCES

Les compagnies aériennes chinoises comme Air China, qui a tiré profit des restrictions chinoises pour s'imposer sur la liaison Pékin-Los Angeles, pourraient aussi souffrir des nouvelles règles qui vont intensifier la concurrence.

De nombreuses compagnies aériennes chinoises font déjà face à une baisse de leur rentabilité à l'international.

Des concurrentes comme Hainan Airlines, numéro quatre du secteur en Chine, développent leurs activités internationales sur des routes secondaires et pourraient se lancer sur de nouvelles liaisons. Sur les 20 itinéraires ouverts à la concurrence, Hainan ne dessert que Pékin et Toronto.

China Eastern et China Southern, respectivement basées à Shanghai et à Canton, devraient également ouvrir de nouvelles liaisons au départ de Pékin, lorsque le deuxième aéroport de la capitale chinoise sera inauguré fin 2019, permettant aux deux compagnies publiques de disposer d'un second hub.

L'ouverture programmée de l'aéroport international de Daxing à Pékin a accéléré la décision du gouvernement de libéraliser un peu plus le secteur, avait déclaré en mai l'organe de régulation du secteur de l'aviation.

China Southern s'est dit favorable à cette modification des règles, tandis que China Eastern n'a pas souhaité s'exprimer. Air China et Hainan Airlines n'ont pas répondu aux demandes de commentaires.

Selon Li Xiaojin, professeur à l'Université de l'aviation civile de Chine, pour rester compétitives, les compagnies étrangères pourraient se concentrer sur le développement de prestations haut de gamme ou renforcer leurs liens avec les transporteurs chinois.

Delta Air Lines et American Airlines détiennent des participations minoritaires dans respectivement China Eastern et China Southern, tandis que China Eastern détient une participation de 8,8% dans Air France-KLM.

(avec la contribution de la rédaction de Shanghai; Claude Chendjou pour le service français, édité par Bertrand Boucey)

par Brenda Goh