L'Argentine avait prévenu à plusieurs reprises d'un nouveau risque de défaut si elle devait se plier à cette obligation et les marchés financiers argentins ont dévissé après cette annonce.

L'indice Merval de la Bourse de Buenos Aires a plongé de plus de 10% lundi entraînant dans son sillage les autres places latino-américaines.

Le risque sur la dette argentine mesuré par l'indice JP Morgan EMBI+ a bondi de plus de 100 points de base. Dans les transactions non officielles, le peso argentin a chuté de plus de 2,30% contre le dollar.

Le refus de la Cour suprême américaine d'examiner l'appel de Buenos Aires revient à confirmer les décisions antérieures en faveur des investisseurs qui avaient refusé les échanges de dettes de 2005 et 2010, décidées après le défaut catastrophique de 2001-2002 sur 100 milliards de dollars d'obligations.

Aucun responsable gouvernemental n'était disponible dans l'immédiat pour commenter la décision de la Cour suprême américaine mais la présidente argentine Cristina Fernandez devait intervenir lors d'une allocution télévisée, a rapporté l'agence publique argentine Telam.

Lors des restructurations de dettes de 2005 et 2010, 93% des créanciers avaient accepté les conditions proposées par Buenos Aires, qui impliquaient un abandon de créances de plus de 70%.

Les créanciers qui avaient refusé ces restructurations, emmenés par les fonds spéculatifs Aurelius Capital Management et NML Capital, avaient fait condamner l'Argentine à leur payer 1,33 milliard de dollars (980 millions d'euros) par la justice américaine.

NML s'est refusé à tout commentaire dans l'immédiat lundi, disant étudier les décisions de la Cour suprême.

UN RISQUE DE PRÉCÉDENT

Buenos Aires refuse de rembourser les fonds qu'elle qualifie de "vautours", en arguant du fait qu'elle ne peut pas leur accorder un traitement de faveur par rapport aux investisseurs ayant accepté les échanges.

Si les autorités argentines s'en tiennent à cette position, le pays pourrait se trouver en situation de défaut dès le 30 juin, lorsqu'arriveront à échéance des obligations régies par le droit de New York.

"C'est un scénario très dommageable pour l'Argentine", a estimé Marco Lavagna, du cabinet de conseil Ecolatina, tout en notant que les modalités de mise en application des jugements antérieurs constituaient un élément clé du dossier. "Il y a peut-être là une ouverture possible permettant de négocier", a-t-il dit.

Le mois dernier, l'Argentine avait laissé entendre qu'elle pourrait négocier avec les fonds concernés, tout en précisant que cela ne pourrait pas se faire avant le 31 décembre, date de l'échéance d'une clause des échanges de dettes interdisant de proposer des conditions plus favorables à certains investisseurs.

Le Club de Paris, qui réunit les pays créanciers de l'Argentine, a annoncé le 29 mai être parvenu à un accord avec Buenos Aires sur la reprise du paiement de sa dette et le remboursement d'un total de 9,7 milliards de dollars d'arriérés.

Cet accord devait permettre à l'Argentine de solliciter à nouveau des financements internationaux dont elle a besoin.

Au-delà du cas argentin, certaines organisations, comme le Fonds monétaire international (FMI), ont dit dans le passé craindre le risque qu'une décision défavorable à Buenos Aires rende plus difficile la restructuration de la dette d'autres pays.

"C'est surprenant parce que cela crée un précédent incitant les 'fonds vautours' à s'opposer à un pays, donc tous les pays seront vulnérables en cas de restructuration", explique Sebastian Centurion, d'ABC Exchange.

(avec Daniel Bases à New York et le bureau de Buenos Aires; Marc Joanny pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat et Marc Angrand)

par Lawrence Hurley et Sarah Marsh