La croissance du produit intérieur brut (PIB) chinois est ressortie à 6,4% au quatrième trimestre, soit un plus bas depuis la crise financière mondiale de 2009, montrent les données du Bureau national des statistiques publiées lundi. Les économistes et analystes interrogés prévoyaient en moyenne une croissance de 6,4% en rythme annuel pour octobre-décembre après 6,5% enregistrée sur le trimestre précédent.

Sur l'ensemble de l'année 2018, ces données ramènent la croissance à 6,6%, également comme prévu, ce qui marque son rythme le plus faible depuis 1990, après 6,8% en 2017.

A Washington, Donald Trump, a estimé que ce ralentissement économique était lié au bras de fer commercial qu'il a engagé avec la Chine en application de sa politique de "l'Amérique d'abord".

"La Chine enregistre ses chiffres économiques les plus lents depuis 1990 en raison des tensions commerciales et des nouvelles politiques US. Il serait si sensé pour la Chine de finir par négocier un Véritable Accord, et de cesser de jouer" !", a-t-il tweeté.

Les signes de faiblesse de l'économie chinoise - qui génère près du tiers de la croissance mondiale - soulèvent des inquiétudes pour l'économie mondiale et pèsent sur les profits, aussi bien pour Apple que pour le secteur automobile.

Les responsables politiques chinois se sont engagés à prendre des initiatives pour soutenir la croissance cette année afin d'éviter une détérioration de l'emploi, mais ils ne veulent pas "inonder" l'économie de liquidités comme ce fut le cas dans le passé, afin de ne pas aggraver l'endettement dans le pays.

"Le gouvernement a les moyens de soutenir l'économie. Ils peuvent développer les dépenses d'infrastructure et ils peuvent abaisser le ratio de réserves des banques. Il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter pour les dépenses d'investissement", dit Naoto Saito du Daiwa Institute of Research à Tokyo.

NOUVEAU RALENTISSEMENT EN VUE

"Mais le problème c'est la consommation. Des conflits sur plusieurs fronts entre les Etats-Unis et la Chine ont porté atteinte à la confiance du consommateur. Jusqu'à présent, une croissance solide des salaires a soutenu la consommation mais il semble qu'il y ait un vague sentiment d'anxiété sur l'avenir."

D'un trimestre sur l'autre, le PIB chinois est en hausse de 1,5% après 1,6% sur juillet-septembre. Les économistes et analystes interrogés prévoyaient en moyenne une hausse de 1,5%.

Convaincus que les mesures de soutien prendront du temps à produire leurs effets, de nombreux analystes pensent que la conjoncture devrait encore se dégrader avant de s'améliorer et tablent sur un nouveau ralentissement à 6,3% pour cette année.

Certains observateurs pensent que la croissance chinoise est déjà plus faible que ne le montrent les chiffres officiels.

Les marchés asiatiques ont bien résisté à ces annonces, l'indice SSE Composite de Shanghai et le CSI 300, qui regroupe les principales capitalisations de Chine continentale, ayant terminé tous deux en hausse de 0,6%.

"Les dernières données suggèrent que la croissance économique est restée faible à la fin de l'année mais qu'elle s'elle a tout de même été plus soutenue que beaucoup ne le craignaient, en partie grâce à la reprise des dépenses d'infrastructure favorisée par Pékin", dit Julian Evans-Pritchard, économiste su la Chine chez Capital Economics.

"Néanmoins, avec les vents contraires que sont le refroidissement de la croissance mondiale et l'impact du ralentissement du crédit dont les effets devraient se faire sentir davantage dans les mois à venir, l'économie chinoise devrait ralentir encore avant de se stabiliser au deuxième semestre de l'année à la faveur de la politique de relance."

INCERTITUDES

Malgré les mesures de soutien à la croissance, les données du mois de décembre, tout comme le PIB, reflètent une faiblesse sur un large front à la fin de l'an dernier.

La production industrielle a rebondi en décembre contrairement aux attentes - de 5,7% sur un an, contre 5,4% en novembre, alors que les analystes anticipaient une hausse de 5,3% - mais il s'agit d'un des rares points positifs des données publiées lundi par le Bureau national des statistiques.

Malgré les efforts du gouvernement pour relancer les projets de construction, les activités minière et pétrolière ont été les principaux facteurs de hausse de la production. Selon les calculs de Reuters, la production quotidienne d'acier a touché son plus bas niveau depuis mars, les sidérurgistes ayant réduit leur production dans un contexte de contraction de leurs marges.

Selon les autres données publiées lundi, l'investissement et les ventes aux détail ont été à la traîne, tandis que le taux de chômage a légèrement augmenté.

Les ventes au détail ont augmenté de 8,2% le mois dernier par rapport à décembre 2017, contre 8,1% en novembre, qui avait marqué son rythme le plus faible depuis mai 2003.

L'investissement en actifs immobilisés a progressé de 5,9% entre janvier et décembre par rapport à la même période l'an dernier, à son rythme le plus faible depuis 1996. Les analystes interrogés par Reuters s'attendaient à une hausse de 6,0%.

Ces statistiques peu encourageantes sont publiées tout juste une semaine après l'annonce que les exportations chinoises ont accusé en décembre leur plus net repli en deux ans.

Mais même si Washington et Pékin parviennent à un accord dans le cadre des négociations en cours, les analystes notent que ce ne sera pas la panacée pour la Chine et ses exportateurs, sachant que le ralentissement de la demande est mondial.

Le vice-Premier ministre chinois Liu He est attendu aux Etats-Unis les 30 et 31 janvier pour de nouvelles discussions.

(Arthur Connan et Juliette Rouillon pour le service français, édité par Henri-Pierre André)

par Kevin Yao et Yawen Chen