LE CAIRE, 31 mars (Reuters) - Le président Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, a transmis dimanche à un groupe de dignitaires religieux un texte de loi autorisant le Trésor à émettre des obligations islamiques, appelées "soukouk".

Cette décision, annoncée dimanche par la télévision publique, risque de compliquer le projet du gouvernement d'adoption de la législation.

Le texte de loi, qui autorise également le secteur privé à recourir à ces obligations compatibles avec les principes du Coran interdisant l'usure, a été votée en mars par la chambre haute du Parlement, la chambre basse ayant été dissoute.

Il a été transmis au chef de l'Etat, ce qui a amené la semaine dernière l'université d'Al Azhar, la plus importante autorité islamique du pays, à émettre une protestation pour n'avoir pas été consultée comme la nouvelle Constitution le stipule.

D'après la Loi fondamentale égyptienne, qui a de fortes connotations islamistes, la Haute Autorité des chefs religieux d'Al Ahzar doit être consultée sur tous les sujets relatifs à la "charia" (loi coranique).

L'émission de "soukouk" pourrait alléger la pression qui pèse sur les finances publiques égyptiennes à l'approche des élections législatives.

Les réserves de change du pays sont tombées à 13,6 milliards de dollars - l'équivalent de moins de trois mois d'importations - et le déficit budgétaire devrait atteindre 12,3% du produit intérieur brut (PIB) fin juin si aucune réforme économique n'est menée d'ici là.

Or, le gouvernement rechigne à adopter des mesures de rigueur impopulaires pendant la période électorale, ce qui retarde d'autant un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) sur l'octroi d'un prêt de 4,8 milliards de dollars.

Selon le ministre des Finances, Al Morsi al Sayed Hegazi, un spécialiste de la finance islamique nommé en début d'année, la Banque islamique de développement (Bid), serait prête à acheter environ six milliards de dollars de "soukouk".

Tous les experts ne sont cependant pas aussi optimistes.

"Le problème, ce ne sont pas les outils, mais le manque d'appétit des investisseurs pour l'Egypte en cette période de confusion (politique)", estime Oussama Mourad, un spécialiste des marchés financiers, selon lequel les soukouk pourraient permettre de couvrir "10 ou 15% des besoins de financement de l'Egypte". (Ahmed Tolba; Tangi Salaün et Jean-Loup Fiévet pour le service français)