FRANCFORT (Reuters) - Les responsables de la Banque centrale européenne sont prêts à se pencher lors de leur prochaine réunion sur la façon dont le coût de l'emprunt est mesuré dans la zone euro avec l'impact économique de la pandémie, faute d'être parvenus à un terrain d'entente sur la question cette semaine, ont déclaré quatre sources à Reuters.

La BCE s'est engagée à maintenir des "conditions de financement favorables" pour aider l'union monétaire à surmonter les répercussions économiques de la pandémie due au coronavirus mais sans jamais préciser comment elles étaient mesurées.

La question est pourtant capitale car elle détermine le montant des achats d'obligations dans le cadre du plan de lutte contre la crise, un sujet qui fait l'objet de spéculations après des déclarations jeudi de Christine Lagarde, la présidente de la banque centrale, sur la possibilité que la BCE n'utilise pas la totalité des 1.850 milliards d'euros alloués à son programme PEPP.

Les dirigeants de la BCE participeront à un séminaire lors de leur réunion des 10 et 11 mars pour étudier quels indicateurs devraient être inclus dans le calcul du coût de l'emprunt, s'ils devraient être examinés individuellement ou compilés dans un indice et comment ils devraient être communiqués, si tant est qu'ils le soient, ont déclaré les sources.

Tous ne sont pas convaincus du mérite d'un indice, de peur d'avoir les mains liées et de ne pas pouvoir étudier d'autres signes avant-coureurs de tensions sur l'économie, a déclaré une source.

Et l'idée de rendre cette information publique rend également beaucoup de gens nerveux à la lumière de l'histoire récente, ont ajouté certaines des sources.

PLUS DE QUESTIONS QUE DE RÉPONSES

Mario Draghi, ancien président de la BCE, s'était fait prendre à son propre piège est élevant au rang de facteur privilégié de la BCE un indicateur de marché des anticipations d'inflation à long terme, qui est devenu une obsession pour les acteurs financiers et a finalement vu sa valeur informative se réduire.

Un porte-parole de la BCE a refusé de commenter l'information.

Christine Lagarde a soulevé plus de questions que de réponses jeudi, lorsqu'elle a déclaré que la BCE ne se contentait pas d'examiner le marché obligataire mais qu'elle procédait plutôt à une "évaluation holistique" de "multiples indicateurs", sans en dire plus.

Elle s'est efforcée de repousser les rumeurs selon lesquelles la BCE s'emploie activement à plafonner les rendements obligataires ou les écarts de taux mais n'a pas pu rentrer dans des détails en raison de l'absence de consensus lors de la réunion du conseil des gouverneurs malgré d'intenses débats, ont indiqué les sources.

Des divergences existent aussi sur la question de savoir si l'économie de la zone euro reste confrontée à des "risques baissiers" prédominants, les plus optimistes étant minoritaires, toujours selon les sources.

Certains responsables de la BCE estiment que les écarts de rendements obligataires et les taux des prêts bancaires sont les deux indicateurs les plus pertinents à l'heure actuelle, selon une source.

Ces deux éléments ont effectivement été les seuls indicateurs mentionnés par Christine Lagarde au cours de sa conférence de presse, ce qui n'a pas suffi à rassurer les investisseurs, le "spread" entre rendements italiens et allemands se creusant.

"Si des conditions de financement favorables peuvent être maintenues avec des flux d'achats d'actifs qui n'épuisent pas l'enveloppe sur l'horizon d'achats du PEPP, l'enveloppe n'aura pas besoin d'être utilisée en totalité", a expliqué jeudi Christine Lagarde.

Les sources ont toutefois signalé que cette déclaration ne devait pas être perçue comme un nouveau signal politique parce que Christine Lagarde avait déjà tenu des propos similaires en décembre et que l'inclusion de cette formule dans le communiqué accompagnant les décisions de la BCE n'a pas été discutée par le conseil des gouverneurs.

(version française Laetitia Volga)

par Francesco Canepa, Balazs Koranyi et Frank Siebelt