Dans un communiqué diffusé, chose rare, en français, l'IATA rappelle que la privatisation "doit viser à améliorer le parcours et l'expérience du passager ainsi que l'efficacité des compagnies aériennes, et non pas de récolter un maximum de recettes". Les propositions actuelles inquiètent l'organisation basée à Montréal, notamment la durée envisagée pour l'accord de privatisation, 70 ans, qui "empêcherait toute flexibilité permettant de répondre aux exigences du marché qui ne peuvent être anticipées à si long terme" et qui introduit la notion de risque, que passagers et compagnies "finiront par payer".

L'IATA craint surtout que le passage au privé ne fasse enfler les coûts aéroportuaires pour ses membres et ne réponde pas aux enjeux de moyen et de long terme. Lors de l'assemblée générale annuelle de l'organisation début juin, Alexandre de Juniac avait rappelé à son auditoire que le secteur privé n'a pas forcément toutes les réponses, avant de marteler qu'aucune privatisation aéroportuaire réalisée à ce jour n'a "rempli à long terme toutes ses promesses".
 

Vers l'infini, et au-delà. La croissance du nombre de passagers depuis 1970, en milliards (Source IATA d'après Banque Mondiale)

Pas de projet, mais une trame

Que propose l'IATA ? En tout cas pas de boucler une vente d'actifs "en vue d'obtenir à court terme une injection de fonds dans le trésor public". Pour aider la décision des autorités françaises (et d'autres par la suite), l'Association a constitué, avec Deloitte, un document de 86 pages dont le propos est d'aider les décideurs à mener une privatisation ou à réguler des infrastructures gérées par des intérêts privés. Publié en juin, ce guide examine différents scénarios et modèles d'aéroports à travers le monde, sans préconiser de solution idéale mais en orientant le débat. L'IATA reste, rappelons-le, un lobby.

Dans le cadre de la Loi Pacte, le gouvernement français a proposé de privatiser pour une durée de 70 ans les infrastructures, qui reviendraient dans le giron de l'Etat à l'issue de cette période. Le modèle sera contractuel et non de type concession. L'Etat conserverait un niveau élevé de régulation et un droit de regard sur les investissements et les travaux. Un contrat de régulation économique sera signé tous les cinq ans. En cas de désaccord, l'Etat aurait la pouvoir de fixer les redevances aéroportuaires et d'engager les investissements nécessaires au maintien du service public.
 

La rhétorique publique pour étayer le projet (Source : document de présentation Loi Pacte juin 2018)