J'espère que vous me pardonnerez de répéter en introduction à peu près la même chose tous les matins depuis quelques jours, mais il faut bien en passer par là. Les places financières stagnent après leurs gains récents, ce qui n'est pas illogique au regard des performances globales affichées en 2020 et depuis le début de l'année. Des indices comme le CAC40 et le S&P500 évoluent à peu près à l'horizontale depuis le début du mois d'avril. Au niveau de la stratégie et des secteurs sur les marchés actions, on sent bien que les investisseurs sont pris entre plusieurs feux. J'en citerai quatre, pas tous compatibles. D'abord les paris "inflation-proof", qui sont assez logiquement à la mode. Ensuite la sécurisation des gains sur les thématiques porteuses des six derniers mois (valeurs financières, énergie). En troisième lieu, la tentation des dossiers technologiques, qui ont perdu un peu de lustre mais qui continuent à faire briller les yeux des actionnaires. Enfin, la voix de la raison qui penche vers les sociétés défensives de qualité.

Les allocations sont un peu plus complexes que lorsqu'il suffisait d'acheter un ETF Nasdaq pour être sûr de participer à la fête. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit, un ETF Nasdaq reste une bonne idée pour tout investisseur de long terme. "Et même de court terme", me souffle ma (jeune) équipe d'apprentis-financiers. Dans l'instant présent en tout cas, le télescopage des stratégies aboutit à des séances calmes au dehors mais parfois agitées au-dedans, à l'image de la journée de la veille où le véhicule électrique et l'énergie verte sont redevenus formidables, ce qui n'était pas le cas des banques ou de la distribution. La veille, c'était le contraire.

La digression du jour porte sur la porosité de plus en plus grande entre l'automobile et la technologie et sur ses conséquences. J'en parle parce que cela devient un thème majeur en investissement, puisqu'il se situe à la croisée des chemins. Le véhicule a de grandes chances d'être le prochain creuset hypertechnologique de l'économie. Les constructeurs traditionnels l'ont tardivement compris, mais la mutation est en marche. Il faut maintenant bâtir des véhicules autour d'un écosystème logiciel – c'est le pari réussi de Tesla – et non des véhicules avec un logiciel dedans. La mécanique passe au second plan. Volkswagen, Stellantis, Toyota et consorts recrutent désormais à tours de bras des développeurs. Les barrières à l'entrée du marché automobile ne sont plus celles du siècle dernier, avec des parts de marché à peu près figées ou difficiles à déplacer.

Les géants de la technologie riches à dizaines de milliards savent qu'ils ont un rôle à jouer. Je dirai même pour certains qu'ils brûlent d'en faire partie. D'insistantes rumeurs circulent par exemple sur les velléités d'Apple à transposer la puissance de sa marque sur quatre roues, avec une force de frappe financière absolument incroyable (près de 200 Mds$ de trésorerie). Ce matin, le FT explique que Tesla réfléchirait à produire ses propres puces en rachetant un fondeur. Les illustrations se multiplient. Je n'ai pas dit que les nouveaux entrants auront la partie facile. Mais il est certain qu'avec leur agilité, leurs ressources et leur expérience en matière de stratégies de rupture, ils sont en capacité de transformer l'une des industries les plus anciennes et les plus structurées qui existent. La vieille Europe, dont l'industrie automobile est un fleuron, n'a pas intérêt à s'endormir sur ses lauriers si elle veut sa part du futur gâteau.

Le CAC40 démarre la séance en baisse de 0,15% à 6382 points. Ça brasse pas mal entre la Chine et le reste du monde concernant les origines du coronavirus. Par ailleurs, les investisseurs attendent une triplette d'indicateurs économiques américains, en particulier les commandes de biens durables et la seconde lecture du PIB américain du 1er trimestre.

Les temps forts économiques du jour

Les indicateurs majeurs sont prévus aux Etats-Unis aujourd'hui, avec la seconde estimation du PIB du T1, les commandes de biens durables et les inscriptions hebdomadaires au chômage (14h30) puis les ventes de logements dans l'ancien (16h00).

L'euro a reculé juste sous 1,22 USD. L'once d'or se négocie 1897 USD. Le pétrole est en baisse, à 68,42 USD le baril de Brent de mer du Nord et à 65,80 USD le baril de brut léger américain WTI. Calme plat sur le rendement du 10 ans américain, qui reste à 1,58%. Le Bitcoin perd à nouveau de l'altitude à 37 600 USD.