La Banque centrale européenne (BCE) pourrait, à l'image de ce que vient d'annoncer la Réserve fédérale (Fed), envisager d'opter pour davantage de flexibilité dans son objectif d'inflation en la laissant notamment monter temporairement au-dessus de sa cible, a déclaré mercredi Christine Lagarde.

L'institution de Francfort manque depuis des années son objectif d'une hausse des prix "inférieure à mais proche" de 2% sur an, en dépit d'une politique monétaire de plus en plus accommodante.

La présidente de la BCE a ouvert quelques portes vers une évolution de cet objectif, à l'occasion d'un discours faisant un premier point sur la revue stratégique en cours au sein de la banque centrale.

Elle a évoqué notamment la possibilité que la BCE s'inspire de la nouvelle stratégie de la Fed, qui prévoit que la banque centrale américaine visera une inflation de 2% en moyenne sur la durée, si besoin en laissant filer pendant "un certain temps" les prix à la hausse pour compenser des périodes d'inflation inférieures à l'objectif.

"La discussion plus large aujourd'hui, cependant, est de savoir si les banques centrales devraient s'engager à compenser explicitement les ratés d'inflation lorsqu'elles ont passé un certain temps en dessous de leurs objectifs d'inflation", a dit Christine Lagarde.

"Si elle est crédible, une telle stratégie peut renforcer la capacité de la politique monétaire à stabiliser l'économie face à la borne inférieure", a-t-elle ajouté.

L'échec persistant à atteindre l'objectif d'inflation peut alimenter les anticipations d'inflation et "exigerait un horizon politique plus court", a-t-elle également déclaré.

Lors de la même conférence, intitulée "la BCE et ses observateurs", le président de la Bundesbank, Jens Weidmann, a mis en garde contre les risques d'une revue stratégique trop ambitieuse.

"Nous devons également être très attentifs à la manière dont nous interprétons notre mandat", a-t-il dit.

"Plus nous interprétons notre mandat de manière large, plus grand est le risque de nous empêtrer dans la politique et de nous surcharger de trop de tâches".

Jens Weidmann est considéré comme l'un des chefs de file des partisans d'une stricte orthodoxie monétaire. Ce camp des "faucons" est de plus en plus critique vis-à-vis de la réponse monétaire apportée par la BCE à la crise du coronavirus, selon des responsables de l'institution auxquels Reuters a pu parler.

(Francesco Canepa et Balazs Koranyi, version française Patrick Vignal et Laetitia Volga, édité par Jean-Michel Bélot)

par Francesco Canepa et Balazs Koranyi