Les dégâts économiques et le nombre élevé de décès dus au coronavirus aux États-Unis poussent l'exécutif américain à tenter d'écarter la production et la chaîne d'approvisionnement de la Chine pour les rapatrier, voire à ce qu'elles profitent à des pays dits "amis", ont déclaré des hauts fonctionnaires de l'administration américaine. "Nous avons travaillé sur la réduction de la dépendance de nos chaînes d'approvisionnement en Chine ces dernières années, mais nous mettons maintenant l'accent sur cette initiative", a déclaré à Reuters Keith Krach, sous-secrétaire à la croissance économique, à l'énergie et à l'environnement au département d'État américain. "Je pense qu'il est essentiel de comprendre où se trouvent les zones et les goulots d'étranglement critiques", a-t-il ajouté, en laissant planer la perspective de nouvelles mesures prochainement

Source : Bulletin d’analyse économique du Trésor français Mars 2020
Source : Bulletin d’analyse économique du Trésor français Mars 2020

Le département américain du commerce, l'État et d'autres agences cherchent des moyens de pousser les entreprises à délocaliser leurs approvisionnements et leur production hors de Chine. Des incitations fiscales et des subventions potentielles à la relocalisation font partie des mesures envisagées pour encourager les changements, selon les hauts fonctionnaires en poste ou retraités. "Il y a une pression de tout le gouvernement sur ce point", a déclaré l'un d'entre eux. Les agences s'interrogent sur le type de fabrication qui devrait être considéré comme "essentiel" et sur la manière de produire ces biens en dehors de la Chine. La "tempête parfaite" en cours est une belle occasion pour les faucons de l'administration américaine de prendre le pas sur les "pro-commerce". "La pandémie a cristallisé toutes les inquiétudes que les gens avaient à propos de leurs affaires avec la Chine", selon un responsable américain, qui ajoute que "tout l'argent que les gens pensaient gagner en faisant des affaires avec la Chine a été éclipsé par les dommages économiques" du coronavirus.

Donald Trump a déclaré à plusieurs reprises qu'il pourrait imposer de nouvelles surtaxes douanières en plus de la taxe de 25% sur les 370 Mds$ de produits chinois actuellement en vigueur. Les entreprises américaines, qui paient les droits de douane, se plaignaient déjà des droits existants. Et encore plus avec le Covid-19. Il existe aussi d'autres moyens de sanctionner la Chine, notamment des mesures contre des entreprises ou des officiels, ou des relations plus étroites avec Taiwan.

Les discussions sur le rapatriement des chaînes d'approvisionnement sont concrètes, solides et, ce qui est inhabituel pour l'administration Trump, multilatérales Les États-Unis cherchent à créer une alliance de "partenaires de confiance" baptisé "Economic Prosperity Network" ("Réseau de prospérité économique"). Cette alliance pourrait inclure des entreprises et des acteurs de la société civile avec des positions convergentes sur plusieurs grands sujets. Les Etats-Unis travaillent avec l'Australie, l'Inde, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud et le Vietnam, a déclaré le 29 avril le secrétaire d'État Mike Pompeo. L'Amérique latine pourrait également jouer un rôle.

La Chine a dépassé les États-Unis en tant que premier pays manufacturier du monde en 2010, et était responsable de 28% de la production mondiale en 2018, selon les données des Nations Unies. La pandémie a mis en évidence le rôle clé du pays dans de nombreux secteurs.

China's Rise to Manufacturing Dominance by Statista

Mais de nombreuses entreprises américaines ont investi massivement dans la fabrication chinoise et affichent une forte dépendance au marché chinois et à ses 1,4 milliard d'habitants pour les débouchés commerciaux. "La diversification et une certaine redondance dans les chaînes d'approvisionnement auront un sens étant donné le niveau de risque que la pandémie a mis en évidence", a déclaré Doug Barry, porte-parole du Conseil des affaires États-Unis-Chine. "Mais nous ne voyons pas de ruée vers la sortie des entreprises qui font des affaires en Chine". John Murphy, vice-président senior pour la politique internationale à la Chambre de commerce américaine, a déclaré que les fabricants américains répondent déjà à 70% à la demande pharmaceutique actuelle. La construction de nouvelles installations aux États-Unis pourrait prendre de cinq à huit ans, a-t-il affirmé.