Vendredi 27
mars
Le point hebdo de l'investisseur
intro Après la tumulte de ces dernières semaines, suite à la propagation du coronavirus, les places financières ont nettement repris de la hauteur sur les dernières séances, portées par les récentes mesures de soutien et notamment le plan de 2000 milliards de dollars adopté aux Etats-Unis. Ces récentes annonces ont contribué à ravivé quelque peu l'appétit pour le risque des opérateurs même si la volatilité devrait perdurer dans l'attente du prochain aplatissement de la courbe des "contaminations".
Indices

Sur la semaine écoulée, les grands indices ont tous repris de la hauteur, les opérateurs ayant effectué quelques achats à bon compte, saluant les annonces des banquiers centraux et les plans de soutien des gouvernements.
En Asie, le Nikkei a gagné 2.6%, à la faveur également de la baisse du yen, tandis que le Hang Seng s'est adjugé 17.4%.

En Europe, le CAC40 a engrangé 7.5%, le DAX s'est adjugé 7.9% et le Footsie 6.1%. Pour les pays périphériques de la zone euro, le Portugal, l'Espagne et l'Italie progressent respectivement de 7.4%, 5.1% et 6.9%.

Aux Etats-Unis, à l'heure de la rédaction de ce point, le Dow Jones réalise une performance hebdomadaire de 13.5%, le S&P500 s'adjuge 10.4% et le Nasdaq100 9.1%, malgré les prises de bénéfices de ce vendredi.

Rebond technique du CAC40

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Le CAC se heurte aux premières résistances majeures avec la MM20
Matières premières

La semaine dernière, des producteurs américains avaient soumis l'idée de contribuer au travail de régulation du marché. La Russie confirme à demi-mot ce changement majeur dans la distribution des rôles de chacun en invitant le maximum de pays producteur à adhérer à l'OPEP+ pour trouver un nouvel accord. En attendant d'en savoir plus, les opérateurs se concentrent sur les données réelles et tangibles, tel que le net recul de la demande de pétrole prévu cette année. Le Brent évolue sur ses plus bas annuels, proches de 25 USD le baril tandis que le WTI flirte avec les 21.5 USD. 

Les métaux précieux ont retrouvé des couleurs cette semaine, soutenus par la baisse du billet vert. L'or progresse ainsi de 8% à 1620 USD. L'argent avance de son côté de 13% à 14.35 USD l'once.

L'heure est à la stabilisation sur le segment des métaux industriels. Les pressions baissières deviennent moins violentes, à l'image du cuivre qui oscille autour de 4775 USD la tonne métrique.
Marchés actions

Boeing

L'action Boeing vient de s'offrir une séquence digne d'une "penny stock" en bourse, ces actions qui ne valent plus grand-chose et dont les variations sont parfois énormes. Il serait faux d'affirmer que l'industriel américain ne vaut plus rien, mais il pèse nettement moins lourd qu'il y a un an.

Entre-temps, la crise du B737MAX et l'arrivée du coronavirus sont passés par là. Fragilisé financièrement par l'interdiction de vol des B737MAX, le groupe l'est aussi par le gel du transport aérien de passagers, qui va mettre à genoux ses clients et étrangler ses fournisseurs.
Cela n'a pas empêché l'action de s'envoler sur les quatre premières séances de la semaine, dopée aux plans de relance et aux perspectives de voir le B737MAX revenir en exploitation durant l'été. Les investisseurs, qui pensent opérer des rachats à bon compte, ne sont pas émus outre-mesure de l'abandon du dividende.

Forte poussée du titre Boeing

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Marché obligataire

En cette période économique exceptionnelle, les banques centrales prennent des décisions inédites. La Banque centrale européenne a ainsi décidé cette semaine de mettre fin à la règle par laquelle elle s'interdisait de racheter plus de 33% d'une tranche de dette publique émise par un Etat membre de la Zone euro, dans le cadre de son PEPP (Programme d'achat d'urgence pandémique). En d'autres termes, la banque centrale contrôle de facto les spreads entre dettes publiques, estime KBC.

L'annonce a permis une détente sur les taux du vieux continent, notamment en Italie et en Espagne. La dette publique à 10 ans reste en territoire négatif en Allemagne, en Suisse, aux Pays-Bas ou en France. L'Italie s'affiche à 1,29% et l'Espagne à 0,49%, contre respectivement 1,58% et 0,85% avant les annonces.

Aux Etats-Unis, les Treasuries ont affiché un rendement 10 ans voisin de 0,8% sur la majeure partie de la semaine, avant de reculer à 0,73% vendredi. Le 5 ans est à 0,44%.
Marché des changes

Les cambistes ont décidé de délaisser le dollar américain cette semaine, troquant progressivement leur valeur sûre au fur et à mesure qu'ils retrouvent du goût pour le risque. Les « gigas » plans de relance tendent ainsi à apaiser les craintes des opérateurs, affaiblissant de facto le billet vert. La paire EUR/USD s'est ainsi retournée à 1.10 USD, l'euro ayant par ailleurs accru ses gains face au dollar après une augmentation record du nombre de demandes de chômage aux Etats-Unis.

La fragilité du dollar se dessine dans l'évolution de la paire USD/JPY, le yen gagnant du terrain face au dollar à 108 JPY malgré la flambée des marchés actions.

Concernant l'euro, la monnaie unique profite en plus des mesures de soutien de l'Eurogroupe pour progresser face au franc suisse à 1.07 CHF et au yen à 120.5 JPY.
Statistiques économiques

La semaine a été marquée par des statistiques décevantes des deux côtés de l'Atlantique.
En Europe, les indicateurs d'activité ont globablement déçu, à l'image de l'indice PMI services ressorti à 28.4 en zone euro (consensus 40). L'indice PMI manufacturier a, en revanche, dépassé les attentes (44.8 contre 40.1 anticipé), demeurant néanmoins largement sous la barre des 50. L'indice IFO du climat des affaires en Allemagne, est quant à lui ressorti à 2.7 contre 7.4 attendu.

Aux Etats-Unis, l'élément marquant de la semaine est l'envolée des inscriptions hebdomadaires au chômage à 3283K (contre 1648K anticipé et 282K la semaine passée). Les indices PMI étaient mitigés, (Indice PMI manufacturier à 49.2 et services à seulement 39.1), tandis que la croissance américaine s'est confirmée à 2.1% au quatrième trimestre, comme l'attendait le marché.

Envolée des inscriptions hebdomadaires au chômage avec le Covid-19

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Le temps des paradoxes

Les excès engendrent les excès. C'est exactement ce à quoi nous assistons, la violente chute des marchés laissant désormais place à un puissant rebond. Le risque de contre-pied est donc élevé, un risque qui cristallise encore et toujours le manque de visibilité des investisseurs qui naviguent à vue. Cette période devrait perdurer et s'étendre aux prochaines semaines, amenant avec elle de nombreux paradoxes.

Le paradoxe d'une Europe en passe de passer son pic épidémique alors que la courbe du nombre de contaminés aux Etats-Unis dessine pratiquement une verticale. Le paradoxe d'un marché qui salue le carnage des statistiques économiques, espérant encore plus de relance pour soutenir l'économie mondiale. Le paradoxe d'une situation sanitaire maîtrisée en Chine, synonyme de réouverture d'usines, mais qui ne peuvent tourner à plein régime, faute de demande.

Cet amoncellement de paradoxes testera les capacités des opérateurs à prendre des choix rationnels, questionnant plus largement l'efficience théorique des marchés financiers.